Les insectes dans l’alimentation animale - Une voie prometteuse pour un élevage plus durable

Parmi les questions souvent invitées au débat public, figure celle de savoir comment la planète va répondre aux besoins en protéines de la population mondiale en 2050. En effet, dans un contexte de croissance démographique (plus de 9 milliards d’individus d’ici là) accompagnée de grands phénomènes d’urbanisation ainsi qu’une évolution des régimes alimentaires, la demande mondiale en produits animaux devrait croître de 60 à 70 % d’ici à 2050. Actuellement, la demande en viande de poulet, dont l’empreinte carbone et eau est la plus faible par rapport aux autres sources de protéines animales, est celle qui présente la plus forte augmentation. Adaptée à tous les climats, n’étant l’objet d’aucune interdiction religieuse, et surtout avec de faibles coûts de production et de vente, c’est un produit de choix pour les producteurs et les consommateurs, qui devrait poursuivre sa croissance dans les décennies à venir.

Cependant, à ce jour, la production de viande fait face à de nombreuses critiques et à de nouveaux enjeux. La transition des élevages vers l’agroécologie nécessitera notamment dans les prochaines années de réduire la concurrence homme/animal pour l’utilisation des terres, mais également d’augmenter l’autonomie protéique des élevages, en particulier via la réduction de la dépendance au soja importé et associé pour partie à la déforestation. Sa culture est en effet responsable de 12 % des émissions de gaz à effet de serre (GES), constituant ainsi la deuxième cause de changement climatique après la combustion d’énergie fossile, et elle affecte les moyens de subsistance de 25 % de la population mondiale. Ainsi, le problème ne réside pas dans les animaux eux-mêmes, ni dans la consommation de produits animaux, mais plutôt dans la manière dont les animaux sont ou non intégrés dans les agroécosystèmes. Il est donc important d’améliorer certaines pratiques d’élevage (alimentation animale par exemple) afin de tendre vers plus de durabilité sociale, économique et environnementale. Avec la diminution des espaces alloués à l’agriculture, la question de l’utilisation des terres pour nourrir les animaux d’élevage est aujourd’hui largement et légitimement posée, notamment quand ces animaux sont d’importants consommateurs de protéines, et principalement de tourteaux de soja.

En outre, la qualité et la quantité des aliments pour animaux tels que le maïs et la farine de soja, ingrédients majeurs de l’alimentation de la volaille, peuvent être influencées par le réchauffement climatique, ainsi que par l’augmentation des coûts des aliments pour animaux et de l’énergie, influençant ainsi la sécurité alimentaire mondiale. En effet, la concurrence des aliments et carburants pour les mêmes ressources peut exacerber la situation ; ceci est davantage vrai dans un contexte de guerre comme en 2022 entre la Russie et l’Ukraine.

Cet article souligne l’intérêt d’utiliser un insecte particulier (la mouche soldat noire) comme une potentielle alternative au soja dans l’élevage des volailles de chair. Après une présentation de la place du soja en alimentation animale et de la mouche soldat noire, les deux parties suivantes portent respectivement sur les intérêts nutritionnels de cet insecte en termes de valeur nutritionnelle (taux protéique et lipidique) ainsi que son impact sur les performances zootechniques des volailles. Une autre partie fait l’état des lieux des aspects réglementaires de l’usage des insectes en élevage. L’article aborde ensuite les intérêts de cette alternative dans un élevage environnementalement et économiquement durable. Enfin, le rôle d’une alimentation à base d’insectes dans l’amélioration du bien-être animal est souligné, en guise de perspectives.