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Article

1 - SOLS FORESTIERS : UNE RESSOURCE DIVERSE, NON RENOUVELABLE ET FRAGILE

2 - MENACES PESANT SUR LES SOLS FORESTIERS

3 - GESTION DURABLE DES SOLS : DÉFINIR DES PRATIQUES ADAPTÉES AU SITE

4 - EXEMPLE DE PRATIQUE POUR RESTAURER LA STRUCTURE D’UN SOL TASSÉ : LE TRAVAIL DU SOL

5 - CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES

6 - GLOSSAIRE

Article de référence | Réf : GE1083 v1

Gestion durable des sols : définir des pratiques adaptées au site
Sols forestiers : enjeux environnementaux et sociétaux

Auteur(s) : Noémie POUSSE, Christophe CALVARUSO

Date de publication : 10 nov. 2024

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RÉSUMÉ

Les sols représentent une ressource non renouvelable, limitée et fragile, porteuse d’une multitude de fonctions écologiques et environnementales qu’il convient de gérer de manière durable. Face aux nombreuses pressions et à la difficulté de concilier les enjeux socioéconomiques et de préservation de la qualité des sols forestiers, ces sols subissent d’importantes dégradations affectant les fonctions et les services qu’ils procurent. Cet article traite des spécificités des sols forestiers, des services qu’ils rendent, des menaces qui pèsent sur eux et présente des outils de diagnostic opérationnels visant à préserver le fonctionnement des sols et des forêts. En effet, la plupart des dégradations pourraient être évitées via la mise en œuvre de pratiques adaptées aux caractéristiques des sols.

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ABSTRACT

Forest soils: environmental and societal issues

Soils are a non-renewable, limited and fragile resource with a multitude of ecological and environmental functions that must be managed sustainably. Faced with numerous pressures and the difficulty of reconciling socio-economic issues and the preservation of the quality of forest soils, these soils undergo significant degradation affecting the functions and services they provide. This article deals with the specificities of forest soils, the services they provide, the threats they pose and presents operational diagnostic tools aimed at preserving the functioning of soils and forests. Indeed, most degradation could be avoided through the implementation of practices adapted to the characteristics of the soil.

Auteur(s)

  • Noémie POUSSE : Chargée de R et D pédologie et stations en climat changeant - Office national des forêts, pôle Recherche, développement et innovation de Chambéry, France

  • Christophe CALVARUSO : Responsable scientifique - Greenback SAS, agence de notation de la santé des sols, Lisors, France - EcoSustain, bureau d’étude recherche et développement en environnement, Mercy-Le-Bas, France

INTRODUCTION

Des écosystèmes forestiers sains fournissent un large éventail de services à l’origine de nombreux besoins fondamentaux, processus économiques et valeurs culturelles ou spirituelles de la société . Outre, la fourniture de bois (énergie et matériau) et de produits non ligneux, la forêt constitue un habitat pour une grande diversité d’organismes vivants, contribue à l’atténuation du changement climatique en stockant le carbone atmosphérique, régule le cycle de l’eau, produit de l’eau potable et procure de nombreux avantages récréatifs.

Le fonctionnement et la santé des forêts tempérées sont intimement liés à la qualité* du sol qui la supporte. En effet, le sol représente le réservoir prospectable par les racines pour l’ancrage et l’alimentation minérale et hydrique de l’arbre. Mais le sol, de par sa position à l’interface entre l’atmosphère, l’hydrosphère*, la lithosphère* et la biosphère*, est bien plus qu’un simple support pour la croissance des plantes, il est à l’origine de sept fonctions écologiques en interactions :

  • habitats pour les organismes du sol et régulation de la biodiversité des sols : support d’habitat pour les organismes du sol et interactions entre les organismes influençant leur abondance et leur diversité (patrimoine biologique) ;

  • rétention et fourniture d’éléments nutritifs essentiels aux organismes vivants et à leur développement : azote, phosphore, potassium, calcium, magnésium, oligoéléments, etc. ;

  • stockage, recyclage et transformation des matières organiques qu’elles soient endogènes ou exogènes ;

  • infiltration, rétention et circulation de l’eau : réserve utile, lixiviation, ruissellement, percolation… ;

  • filtre, tampon et dégradation des contaminants organiques et inorganiques. Notons que la rétention de contaminants dans le sol, si elle permet d’épurer l’eau, induit un risque de transfert de ces contaminants vers la végétation ou les autres organismes du sol (exemple des éléments traces métalliques) ;

  • support physique stable permettant l’implantation et le développement de végétaux (ancrage et croissance des racines) ;

  • contrôle de la composition chimique de l'atmosphère via les échanges gazeux et contribution aux processus climatiques via les échanges d’énergie entre le sol et l’atmosphère.

Pour être fonctionnel et procurer ces multiples services, le sol doit être sain. Or, les sols forestiers font face à de nombreuses pressions et perturbations qui résultent notamment de la difficulté de concilier les enjeux socioéconomiques, à savoir la mécanisation pour augmenter la productivité et réduire la pénibilité du travail, un travail à flux tendu pour optimiser les approvisionnements et rentabiliser les équipements, la récolte de bois-énergie pour rentabiliser l’exploitation…, et les enjeux de préservation de la qualité des sols forestiers. Ces évolutions technologiques et pratiques ont des impacts sur le fonctionnement des sols et des écosystèmes forestiers, auxquelles s’ajoutent d’autres perturbations telles que le changement climatique, les attaques biotiques et la pression du gibier (abroutissement*, frottis*, écorçage*, affouillement*) qui peuvent aggraver le dépérissement des peuplements en fragilisant le fonctionnement de l’écosystème forestier  .

Ces pressions croissantes sont à l’origine de dégradations importantes des sols, parfois irréversibles, telles que la perte de fertilité chimique, de matière organique et de biodiversité, le tassement et l’érosion hydrique . Dans la majorité des cas, ces dégradations résultent de la mise en œuvre de pratiques inadaptées qui vont altérer une ou plusieurs fonctions du sol. Pourtant, il existe des outils de diagnostic opérationnels et robustes qui permettent de caractériser les sols, d’identifier les pratiques et les itinéraires sylvicoles adaptés aux conditions d’un site avec pour finalité une gestion durable des sols et des forêts. Mais pour diverses raisons, ces diagnostics sont encore peu réalisés. Un enjeu majeur est donc de sensibiliser sur l’importance de préserver les sols, et de déployer les outils d’aide à la décision au sein de la filière forêt-bois. En effet, les connaissances sur les impacts de la mise en œuvre de pratiques inadaptées renforcent l’acceptation de la transition vers des pratiques qui soient à la fois cohérentes d’un point de vue social et économique et qui préservent le bon fonctionnement des écosystèmes et leur résilience.

Dans cet article, nous allons revenir sur la diversité et les spécificités des sols forestiers qui influent à la fois sur leurs potentialités agronomiques en lien avec le fonctionnement de l’écosystème forestier et sur leurs sensibilités face à diverses pressions. Nous identifierons et caractériserons ensuite les principales menaces qui pèsent sur ces sols. Enfin, nous décrirons les approches permettant une gestion durable des sols forestiers basée sur l’utilisation d’outils d’aide à la décision développés spécifiquement pour ces sols, à partir des connaissances acquises par la recherche.

Nota

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KEYWORDS

diagnosis   |   ecosystem services   |   forest soils   |   ecological functions   |   sustainable management

DOI (Digital Object Identifier)

https://doi.org/10.51257/a-v1-ge1083


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3. Gestion durable des sols : définir des pratiques adaptées au site

Prévenir les sols de toute dégradation est essentiel car leur restauration, qu’elle soit naturelle ou via une intervention humaine, est lente, jusqu’à plusieurs décennies, et peut s’avérer coûteuse (cf. exemple du travail du sol dans le chapitre 4). Dans certains cas, elle n’est même pas possible.

Pour adapter la gestion des forêts (figure 13) aux potentialités et aux contraintes de chaque type de sol et donc éviter toute dégradation, quatre diagnostics de qualité des sols forestiers ont été élaborés et inclus dans l’application android gratuite « For-Eval » (figure 14).

3.1 Préservation de la fertilité chimique des sols forestiers

L’exportation de feuillage est à proscrire sur tous les types de climat et de sol. Par contre, les effets de l’exportation des menus bois sont moins systématiques. Les sols les plus riches étant capables de supporter cette exportation supplémentaire, il est primordial d’identifier les sols capables de supporter durablement la récolte des menus bois pour y rentabiliser les premières éclaircies. Par exemple, sur les sols sensibles et dès lors que le prix du matériau bois ne permet pas de couper et laisser au sol seulement leurs houppiers (2e découpe à prévoir par arbre), on coupe et on laisse au sol les arbres de premières éclaircies. Tandis que, sur les sols peu sensibles, on récolte hors feuille les arbres en entier. L’ensemble des deux opérations permet de limiter le coût de la coupe sans sortir les bois sur le sol sensible et ainsi de limiter les impacts sur la fertilité des sols tout en réalisant l’opération sylvicole sur les deux sols.

  • Diagnostic de sensibilité du sol à une exportation de menus bois

    Pour...

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BIBLIOGRAPHIE

  • (1) - EFESE -   L’évaluation française des écosystèmes et des services écosystémiques français.  -  Les écosystèmes forestiers (2018).

  • (2) - KIRILENKO (A.P.), SEDJO (R.A.) -   Climate change impacts on forestry.  -  Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, 104, p. 19697-19702 (2007).

  • (3) - GUEGAN (J.-F.), DE THOISY (B.), GOMEZ-GALLEGO (M.), JACTEL (H.) -   World forests, global change, and emerging pests and pathogens.  -  Current Opinion in Environmental Sustainability, 60, p. 101266 (2023).

  • (4) - ROONEY (T.P.) -   Deer impacts on forest ecosystems : a North American perspective.  -  Forestry, 74, p. 201-208 (2001).

  • (5) - SAMEC (P.), KUCERA (A.), TOMESOVA (G.) -   Soil degradation processes linked to long-term forest-type damage.  -  In : Forest degradation under global change, ed. Samec, P. (2022).

  • ...

1 Données

Quelques chiffres clés de la forêt française métropolitaine :

  • 28 % du territoire métropolitain est couvert de forêts ;

  • 3,2 millions de propriétaires privés se partagent 12 Mha, soit 75 % de la forêt ;

  • plus de 15 600 collectivités sont propriétaires de 2,9 Mha, soit 16 % de la forêt ;

  • l'État possède 1,7 Mha de forêts domaniales, soit 9 % de la forêt ;

  • la forêt publique représente un quart de la forêt française ;

  • 5,1 millions d'ha sont écocertifiés PEFC ;

  • la forêt française séquestre chaque année 45 millions de tonnes de CO2 net, soit 8 % du total des émissions nationales de gaz à effet de serre ;

  • la forêt abrite 40 % des zones Natura 2000 ;

  • la forêt accueille plus de 500 millions de visiteurs chaque année ;

  • la diversité des climats (océanique, continental, méditerranéen et montagnard), du relief et des stations forestières permet à la France d’avoir des forêts très variées comparativement à ses voisins européens. Près de 190 espèces différentes d’arbres se répartissent sur le territoire ;

  • la forêt est composée majoritairement de feuillus (67 % des peuplements). Le chêne est l’essence feuillue la plus fréquente. Les conifères se situent essentiellement en zone montagneuse (surtout Alpes, Massif central, Jura, Vosges), dans le massif landais et dans les plantations assez récentes de l’ouest de la France.

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