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Philippe DILLMANN : Chargé de recherche au CNRS, laboratoire Pierre Süe CEA/CNRS et laboratoire Métallurgies et cultures UMR 5060 CNRS
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Dès le XIXe siècle, des savants et scientifiques se sont intéressés à la corrosion des objets archéologiques. En revanche depuis, cette époque a toujours perduré un hiatus entre les spécialistes de la conservation des objets archéologiques et les corrosionistes universitaires et industriels. Les premiers ont toujours basé leurs études sur une approche descriptive et naturaliste tandis que les seconds, souvent ont été intéressés par la compréhension phénoménologique des mécanismes de corrosion de matériaux liés à des cas industriels précis et des environnements parfois fort éloignés de ceux des objets archéologiques. Ainsi, la corrosion du fer et des autres métaux a été largement et finement étudiée dans un grand nombre d’environnements, mais uniquement sur des périodes très courtes comparées aux durées concernées par les analogues archéologiques. D’autre part, les couches épaisses des produits de corrosion ont été décrites par les restaurateurs/conservateurs de manière parfois assez détaillée, mais souvent avec des moyens analytiques limités, donnant une bonne appréhension des hétérogénéités que peuvent présenter les systèmes de corrosion archéologiques à l’échelle macroscopique, mais peu d’éléments de compréhension des mécanismes à l’échelle du micromètre. Or, il est patent que seule la combinaison raisonnée de ces deux approches peut permettre de cerner un tel système de corrosion, parfois fort complexe.
Ces dernières années, pour les métaux ferreux principalement, mais également pour d’autres types, s’est fait sentir le besoin de tenter une approche plus fine de la corrosion des objets archéologiques, basée sur la compréhension des mécanismes. Ceci a été motivé, dans les milieux de la conservation/restauration, par la recherche d’informations spécifiques, impossibles à obtenir autrement que par cette compréhension. En particulier, la localisation dans les produits de corrosion de l’ancienne surface de l’objet, sur laquelle peuvent être retrouvées des informations archéologiques primordiales fait l’objet de recherches poussées [1]. De plus, la conservation des objets ferreux dans les musées, ou des pièces de ce métal dans les monuments historiques exige de bien connaître les produits de corrosion formés durant les siècles précédents et leur évolution en fonction de celle du milieu. À cette motivation liée exclusivement au domaine du patrimoine, s’est greffée une problématique plus récente, qui a été à l’origine d’avancées significatives ces dernières années dans le domaine de la compréhension de la corrosion des objets archéologiques. En effet, dans des contextes liés à l’ingénierie nucléaire, le stockage et l’entreposage des déchets radioactifs à vie longue deviennent un sujet crucial. Pour ce faire, il est envisagé, en France (loi no 91-1381) et dans d’autres pays, de conditionner ces déchets dans une matrice d’enrobage et une série d’enveloppes constituées de différents matériaux (verre, acier inoxydable, acier non allié). Dans plusieurs de ces concepts de stockage, la dernière enveloppe du colis de déchets est un surconteneur en acier doux dont il est primordial de connaître le comportement en corrosion sur des durées multiséculaires. Suivant les solutions envisagées, différents milieux, dans lesquels la corrosion de ce surconteneur peut avoir lieu, sont à considérer. Pour toutes ces raisons, les recherches sur les objets archéologiques, considérés en tant que tels ou comme analogues, sont nécessaires et sont menées dans différents laboratoires français et internationaux.
Dans le cas des métaux ferreux, la morphologie et l’épaisseur (de l’ordre de quelques centaines, voire quelques milliers de micromètres) des produits de corrosion nécessite une approche un peu différente de celle classiquement utilisée en corrosion.
En effet, les techniques d’analyse de surface ou d’études électrochimiques ne peuvent plus être employées de la même manière que pour l’étude des couches minces, correspondant aux premiers stades de la corrosion. De plus, un des axes principaux de recherche est de saisir le rôle exact joué par ces couches épaisses sur les mécanismes de corrosion et de quelle manière celles-ci peuvent influencer la vitesse d’altération du métal. Cette compréhension, passant par la caractérisation fine des systèmes de corrosion, nécessite soit l’adaptation de techniques existantes, soit la mise en œuvre de techniques particulières. C’est l’ensemble de ces points qui vont être décrits ci-dessous traitant exclusivement la corrosion des alliages ferreux.
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3. Objets archéologiques ferreux considérés comme analogues
3.1 Définition de l’analogue archéologique
Dans plusieurs domaines des études sur la corrosion 1, les objets archéologiques sont considérés comme des analogues pour comprendre l’évolution en corrosion des systèmes donnés. Il importe donc de définir ce qu’entend exactement cette terminologie. Un objet archéologique pourra être considéré comme un analogue pour l’étude de l’évolution des systèmes physico-chimiques à très long terme dans la mesure où sa composition et sa structure, d’une part, et le milieu dans lequel il a été laissé d’autre part, sont comparables au matériau et au milieu envisagé pour le système dont on désire prévoir le comportement. Dans le cas de l’étude de la corrosion des objets ferreux, ces deux aspects sont à vérifier. En effet, les alliages ferreux anciens, de par leur mode de production peuvent être relativement différents de ceux contemporains. Pour le milieu ayant provoqué la corrosion, certains paramètres sont à vérifier et d’autres demeureront inatteignables.
HAUT DE PAGE3.2 Comparabilité du matériau ancien
De l’origine de la sidérurgie à nos jours, deux procédés de réduction du minerai de fer et plusieurs procédés d’élaboration des alliages ferreux se sont succédés. Nous ne les détaillerons pas ici, on pourra trouver dans la littérature un certain nombre de références à ce sujet [20] [21]...
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