Présentation
EnglishRÉSUMÉ
Depuis les années 2000, les nanotechnologies sont en plein développement. Cependant, le terme « nanosciences » est plus approprié car peu d'applications industrielles ont été réellement développées à ce jour. Le changement d'échelle nécessaire pour la mise au point des nano-dispositifs a abouti à une nouvelle approche : l'approche moléculaire. Cette voie est très prometteuse car elle possède de nombreux avantages pour l'expansion des nanotechnologies. Cet article propose d'exposer les principaux développements relatifs à l'élaboration, aux propriétés et aux applications potentielles de nanostructures (supra)moléculaires.
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Frédéric CHERIOUX : Directeur de recherche CNRS à l’institut FEMTO-ST (Besançon), France
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Frank PALMINO : Professeur des universités de Franche-Comté à l’institut FEMTO-ST (Montbéliard), France
INTRODUCTION
Nous pouvons noter depuis les années 2000 un fort engouement de la recherche pour l'étude des systèmes moléculaires isolés et auto-assemblés sur une surface. Cette effervescence est directement liée aux développements des microscopes à champ proche. Cependant, il serait injuste de ne pas attribuer aussi ce phénomène au rapprochement de deux communautés, celle des chimistes et celle des physiciens, restées trop longtemps éloignées. Aujourd'hui, ces deux disciplines se croisent à l'échelle du nanomètre, pour élaborer, fonctionnaliser, positionner et assembler des structures moléculaires dont les applications potentielles semblent innombrables. Les chercheurs imaginent ces dispositifs dans les domaines de la nano-électronique, des nano-biocapteurs, des nano-moteurs, du photovoltaïsme…
Les molécules présentent l’avantage de pouvoir servir de briques élémentaires pour former des systèmes auto-assemblés ou des objets plus complexes. Ce concept est connu sous le nom générique d’approche du « bas vers le haut », dite ascendante ou monumentalisation. Les propriétés des molécules sont modulées par le contrôle de leur architecture, choisie a priori par le chimiste de synthèse en fonction de la topologie (fil, pavage) ou des propriétés physico-chimiques recherchées (catalyse, fluorescence, conduction électronique, etc.). Elles peuvent dans certains cas être stables à pression atmosphérique et sous vide et posséder une durée de vie très importante (certaines molécules ont une durée de vie de plusieurs dizaines d’années) permettant ainsi d’imaginer des applications sur le long terme. En les fonctionnalisant, il est possible de les greffer sur des surfaces (métal, semi-conducteur, isolant) via un groupement spécifique, ou de permettre qu’elles se reconnaissent entre elles pour former des assemblages de grandes dimensions. Les principaux intérêts du greffage ou de l’auto-assemblage sur une surface portent sur le contrôle de l’arrangement spatial et de l’orientation de ces nano-objets, et ce grâce à leurs interactions avec le substrat et entre molécules.
Il existe donc un très grand nombre de molécules susceptibles d'être utilisées mais pour ce faire il est essentiel de pouvoir les étudier non seulement dans un environnement parfaitement contrôlé mais également au sein de structures relativement simples à interpréter. C’est pourquoi on retrouve un grand nombre d’études sous vide portant sur des molécules isolées ou auto-organisées déposées sur des surfaces parfaitement cristallines.
L’observation de tels objets ou structures à l’échelle nanométrique nécessite l’utilisation de microscopes particulièrement performants comme les microscopes à champ proche, tels que les microscopes à effet tunnel et à force atomique et leurs dérivés, inventés dans les années 1980. Dès lors, il est devenu possible d’observer, d’analyser, de contrôler et de manipuler la matière avec une précision atomique permettant ainsi d’assister à une véritable révolution de ce domaine scientifique. C’est cette révolution scientifique que nous souhaitons présenter, non pas d’un point de vue technique instrumentale, mais au travers des principaux résultats obtenus au niveau international dans une approche quasi chronologique allant des systèmes les plus simples aux plus complexes.
La première partie de cet article est consacrée à une brève présentation des techniques de microscopie en champ proche à effet tunnel et à force atomique utilisées pour l’observation des surfaces à l’échelle atomique.
Dans une deuxième partie, nous présentons l’imagerie à haute puis très haute résolution de molécules isolées et assemblées qui permettent de mettre en évidence certains types de liaisons intermoléculaires avant d’aborder la possibilité de changer la conformation des molécules par des interactions contrôlées avec la pointe.
Nous présentons en troisième partie un large éventail de systèmes auto-assemblés, pouvant être constitués de plusieurs molécules différentes et obtenus aussi bien sous vide, à pression atmosphérique et en milieu liquide. Ces systèmes modèles permettent de mettre en évidence les différentes forces d’interactions « molécules/molécules » et « molécules/surface » qui pilotent l’organisation de la matière à l’échelle nanométrique. La compréhension de ces phénomènes a permis de réaliser des réactions chimiques in situ aussi bien sur des surfaces conductrices qu’isolantes pouvant même aboutir à des phénomènes de polymérisation.
La quatrième partie présente les toutes dernières évolutions dans les domaines très complexes des nano-machines et de la manipulation. Il s’agit ici de comprendre le fonctionnement de systèmes moléculaires dynamiques où les notions macroscopiques de la mécanique classique ne s’appliquent plus et où les états quantiques pourraient imposer la nature des mouvements observés. Cet article se termine par l’étude des propriétés physiques comme la conduction électrique ou l’émission de photons à l’échelle d’une molécule unique.
VERSIONS
- Version archivée 1 de oct. 2006 par Frédéric CHÉRIOUX, Frank PALMINO
- Version archivée 2 de oct. 2012 par Frédéric CHERIOUX, Frank PALMINO
DOI (Digital Object Identifier)
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2. Molécules isolées
2.1 Imagerie haute résolution
Les images de molécules isolées nécessitent une molécule parfaitement immobile et sans contamination. C’est pour cela que ces images sont toujours obtenues par STM ou AFM sous ultra-haut vide (≈ 10−10 mbar). En fonction de la nature des surfaces, les températures d’observation sont très différentes. Sur métaux, comme la diffusion de molécules est très importante, il faut travailler à très basse température (< 77 K) alors que sur semi-conducteurs où les atomes de surface possèdent généralement des liaisons pendantes non saturées qui peuvent interagir avec les molécules, la diffusion des molécules est plus faible et il est possible d’observer des molécules isolées même à température ambiante. Les images obtenues avec des pointes « standards » (c'est-à-dire sans l’adsorption d’une molécule unique en bout de pointe [figure 2 à droite]) ne montrent jamais les différents atomes constituant la molécule mais des groupements d’atomes possédant des caractéristiques électroniques similaires (figure 3). Cette résolution, déjà très élevée, permet de reconnaître dans la plupart des cas et sans ambiguïté la molécule et d’effectuer des mesures précises sur ses dimensions caractéristiques et sa symétrie par exemple. Il est également possible d’obtenir des informations sur les densités d’états électroniques par une spectroscopie I(V) obtenue en mesurant la variation du courant en fonction de la tension pointe-échantillon à distance constante.
Ces expériences ouvrent aussi la voie à l’étude du transport d’un seul électron et de la distribution de charges à l’échelle atomique. Ainsi, le groupe de G. Meyer a obtenu des images en résolution sub-moléculaire par NC-AFM (KPFM) montrant la différence locale de potentiel de contact (DLPC) reflétant la distribution de charges (figure 4). Ce type d’imagerie renseigne non seulement sur la force exercée entre la molécule et la pointe, mais aussi sur la cartographie de la répartition des charges dans une molécule.
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Molécules isolées
BIBLIOGRAPHIE
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(1) - BINNIG (G.), ROHRER (H.) - The scanning tunneling microscope. - Scientific American, Vol. 253, p. 40 (1985).
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(2) - BINNIG (G.), ROHRER (H.) - Scanning tunneling microscopy. - IBM J. Res. Develop., n° 30, p. 355 (1986).
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(3) - BLÉGER (D.), MATHEVET (F.), KREHER (D.), ATTIAS (A.-J.), BOCHEUX (A.), LATIL (S.), DOUILLARD (L.), FIORINI-DEBUISSCHERT (C.), CHARRA (F.) - Janus-Like 3D Tectons : Self-Assembled 2D Arrays of Functional Units at a Defined Distance from the Substrate. - Angew. Chem. Int. Ed. n° 50 p. 6562 (2011).
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(4) - BINNIG (G.), QUATE (C.F.), GERBER (C.) - Atomic force microscope. - Phys. Rev. Lett., n° 56, p. 930 (1986).
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(5) - SUGIMOTO (Y.), POU (P.), ABE (M.), JELINEK (P.), PÉREZ (R.), MORITA (S.), CUSTANCE (O.) - Chemical identification of individual surface atoms by atomic force microscopy. - Nature, n° 446, p. 64 (2007).
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DANS NOS BASES DOCUMENTAIRES
ANNEXES
Nanosciences et nanotechnologies du CNRS : https://www.cnrs.fr/cnrs-images/nano/index.html. Page consultée le 23 septembre 2018.
Techniques de l’ingénieur : https://www.techniques-ingenieur.fr/base-documentaire/innovation-th10/nanosciences-et-nanotechnologies-ti155/. Page consultée le 23 septembre 2018.
Culture science physique, à la découverte des nanosciences : http://culturesciencesphysique.ens-lyon.fr/ressource/nanosciences-Chenevier.xml. Page consultée le 23 septembre 2018.
Galerie d’images STM : http://teams.femto-st.fr/groupe-nanosciences/en/stm-image-gallery. Page consultée le 23 septembre 2018.
Galerie d’images STM et AFM : https://www.pinterest.fr/IOPPublishing/stm-and-afm-favourite-images/. Page consultée le 23 septembre 2018.
Galerie d’images STM et simulation : http://www.polymtl.ca/nanostructures/fr/Galerie.html. Page consultée le 23 septembre 2018.
Au cœur des nanosciences : https://www.canal-u.tv/video/science_en_cours/au_cœur_des_nanosciences.193....
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