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RÉSUMÉ
Cet article vise à montrer comment l’oubli des catastrophes du passé contribue à accroître l’exposition aux risques de nos sociétés. Il aborde la question des matériaux et des méthodes historiques, et souligne le rôle de la parole et de la modélisation de l’expert, comme vérité quasi révélée et preuve irréfutable du caractère inédit d’une catastrophe. En pratique, une telle posture conduit souvent à une impréparation face à la catastrophe à venir et à une forme de gestion routinière du risque, comme en témoignent les risques d’inondation à Paris, la tempête Xynthia de 2010 et la crise du Covid 19. Ces faiblesses démontrées, d’autres horizons à même de réduire la vulnérabilité sont proposés.
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The aim is to show how forgetting the disasters of the past contributes to increasing exposure to risks in our societies. It first addresses the question of historical materials and methods and emphasizes the role of expert speech and modeling, as almost revealed truth and irrefutable proof of the unprecedented nature of a catastrophe. In practice, such a posture often leads to unpreparedness in the face of the coming disaster and to a form of routine risk management, as evidenced by the examples of the flood risk in Paris, the Xynthia storm of 2010 and, more recently still, the Covid 19 crisis. These weaknesses demonstrated, it is finally important to propose other horizons capable of reducing vulnerability.
Auteur(s)
-
Emmanuel GARNIER : Directeur de recherche CNRS UMR 6249 CNRS Chrono-environnement, Université de Franche-Comté, Besançon, France
INTRODUCTION
Rédigé en pleine crise de l’épidémie de Covid-19, le contenu de cet article a forcément tenu compte de cette catastrophe venue rappeler, avec brutalité, à quel point le manque d’anticipation et l’oubli du passé favorisent l’impréparation et hypothèquent une sortie rapide de crise. Volontiers présentée par les autorités, les experts et les médias comme « inédite », et donc imprévisible, cette crise illustre magistralement la vulnérabilité croissante de nos sociétés induite par une rupture mémorielle généralisée. Ce travail souhaite donc souligner, au crible de l’expérience du passé et dans une perspective propre aux sciences historiques, l’exposition aux risques qui en découle pour nos contemporains et les limites de la parole de l’expert contemporain, qu’il soit scientifique, ingénieur ou décideur politique. De la sorte, il est possible de comprendre à quel moment cette parole devient hégémonique et légitime au regard des diktats budgétaires et politiques court-termistes, au point d’éradiquer le souvenir d’un désastre qu’on avait, jusque-là, veillé à conserver sous des formes diverses et originales. Il convient également d’apprécier ces expressions mémorielles afin de juger de leur pertinence et, éventuellement, de leur intégration au sein de stratégies d’adaptation plus durables pour le futur, ne serait-ce que sous la forme de séries d’événements historiquement démontrés et connus dans les modèles actuels et les plans de prévention.
L’objectif de cet article est donc de procurer des pistes de réflexions inédites, parce que fondées sur l’expérience du passé et la transdisciplinarité à même de réduire les vulnérabilités auxquelles ingénieurs, aménageurs, entrepreneurs, assureurs et responsables politiques sont confrontés ou seront confrontés en matière de risques. L’approche historique des catastrophes est conçue ici comme un outil pour renforcer les modes de gouvernances des sociétés humaines et des entreprises induits par le processus de globalisation (mondialisation) des vingt dernières années en favorisant une coordination de l’action collective plus efficiente, parce qu’inscrite dans la longue durée et respectueuse des diversités.
KEYWORDS
resilience | covid 19 | crisis | Xynthia storm | H3N2 virus | risk | flood in Paris
DOI (Digital Object Identifier)
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2. Temps longs et ruptures de la vulnérabilité
2.1 Fluctuat nec mergitur : Paris et risque inondation
En juin 2016, le fleuve Seine a inondé Paris à un moment de l’année considéré par les spécialistes comme totalement inhabituel et avec un impact très grave sur l’activité de la capitale puisqu’elle accueillait alors le championnat d’Europe de football ainsi que de nombreux touristes. Sur le plan financier, elle se solda par un coût supérieur à 1,4 milliard d’euros. Plus d’un an après, en janvier 2018 cette fois-ci, la Seine provoquait une nouvelle inondation dans plusieurs régions et à Paris. Ces intempéries causèrent de gros dégâts, estimés entre 150 et 200 millions d’euros selon la fédération française des assureurs. Ces deux événements hydrologiques nous rappellent ainsi que la ville de Paris offre une très forte vulnérabilité face au risque d’inondation. Dans l’hypothèse d’une crue majeure comme celle de janvier 1910, au cours de laquelle la Seine avait atteint la hauteur de 8,62 m, les dommages seraient 50 à 100 fois plus élevés si l’on inclut l’endommagement matériel, les perturbations économiques et l’évacuation des habitants directement menacés. Sur les 463 km2 exposés à ce type de risque en Île-de-France, plus de 25 % sont dédiés à l’habitat (830 000 habitants exposés), aux activités économiques et aux infrastructures de transport. Il faut également savoir qu’en cas d’inondation majeure, des perturbations encore plus importantes sont attendues en raison de la concentration des infrastructures (gares, aéroports internationaux, autoroutes), des centres de décision politique, et de l’enfouissement dans le sol des réseaux électriques et de communication. Dans son rapport de 2014, l’OCDE estimait ainsi les dommages directs provoqués par l’inondation entre 3 et 30 milliards d’euros selon le scénario de crue et surtout une diminution du PIB de 0,1 à 3 % sur 5 ans.
Conscient de ce risque majeur pour le pays, le gouvernement français tente depuis des décennies de se préparer à une telle catastrophe. Et pour la première fois, il a conduit un exercice de préparation en mars 2018 appelé Sequana. Il prévoyait une montée beaucoup plus lente de la Seine (50 cm/jour), un scénario hivernal directement inspiré de la catastrophe de 1910 (sols gelés et redoux brutal), avec néanmoins une montée...
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BIBLIOGRAPHIE
-
(1) - Dictionnaire de l’Académie françoise. - Smits et Cie, Paris, tome 2 (1798).
-
(2) - BENNASSAR (B.) (dir.) - Les catastrophes naturelles dans l’Europe médiévale et moderne. - Presses Universitaires du Mirail, Toulouse (1996).
-
(3) - GARNIER (E.) - A memory for a better resilience to contemporary risks. - United Nations Office for Disaster Risk Reduction, Global Assessment Report on Disaster Risk Reduction 2019, Geneva (2019). GARNIER (E.) – Lessons learned from the past for a better resilience to contemporary risks. Disaster Prevention and Management, 28(6), p. 778-795 (2019).
-
(4) - GARNIER (E.) - Le changement climatique entraîne-t-il plus de catastrophes ? - Risques, Les cahiers de l’assurance (Fédération Française des Assureurs), 115, p. 19-26 (2018) https://www.researchgate.net
-
(5) - FURETIERE (A.) - Dictionnaire universel contenant généralement tous les mots français. - Arnout et Reiner, La Haye et Rotterdam (1694).
- ...
DANS NOS BASES DOCUMENTAIRES
ANNEXES
Plans de prévention des risques naturels (PPRI-PPRL) http://www.vendee.gouv.fr
Risc-kit http://www.risckit.eu
Prévention des risques littoraux et submersions marines dans le Finistère http://www.finistere.gouv.fr
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