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EnglishRÉSUMÉ
Les énergies et les masses mises en mouvement dans le système ferroviaire et les conséquences spectaculaires et parfois dramatiques des accidents ont nécessité dès l’origine la définition de principes de sécurité pour protéger les clients, les riverains et les salariés. Les difficultés de mesure des masses, des vitesses ou des positions des convois ont conduit à des choix technologiques ou organisationnels partagés par tout le secteur. La révolution digitale conduit à réinterroger la stratification des technologies mécaniques ou électromécaniques déployées depuis 1870 en partant des principes de base qui restent toujours d’actualité.
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Pierre MESSULAM : Président de Semaphore SAS - Ancien directeur des Risques, de l'Audit, de la Sécurité et de la Sûreté de la SNCF
INTRODUCTION
La sécurité de tous les systèmes de transport repose sur deux grands principes : la maîtrise des énergies mises en jeu (notamment les risques d’explosion de l’énergie embarquée, ou de perte d’un composant en cours de trajectoire) et la maîtrise de la trajectoire (éviter la collision avec un autre convoi, ou avec des bâtiments ou des installations proches).
Le remplacement des locomotives à vapeur par des locomotives à moteurs thermiques puis électriques a permis une bonne maîtrise des risques énergétiques même si le risque incendie d’un convoi reste toujours un enjeu important. L’intégrité du guidage mécanique du convoi (rails et aiguillages pour l’infrastructure, roues ou essieux pour les convois) est un impératif absolu : une défaillance conduit à des chocs d’une grande violence en raison des énergies mécaniques mises en jeu.
La maîtrise de la trajectoire constitue un second enjeu fondamental. En effet, le ferroviaire étant un mode guidé unidimensionnel, l’équipage ne peut pas changer sa trajectoire pour éviter une collision : il ne peut que l’anticiper par le freinage. La détection à temps du risque de choc n’est pas toujours cohérente avec les distances d’arrêt de plusieurs centaines de mètres (en particulier pour des voies en courbe ou lors de conditions atmosphériques dégradées), conséquences du faible frottement du contact roue-rail. C’est pourquoi le système ferroviaire met un soin tout particulier à la planification détaillée des mouvements pour éviter toute trajectoire sécante entre convois, et a développé des techniques d’espacement des trains afin de garantir des distances d’arrêt suffisantes. Ce dispositif est complété par des procédures très strictes pour les aiguilleurs ou les conducteurs et le développement de technologies de communication en temps réel pour transmettre l’alerte au conducteur avant même qu’il puisse voir lui-même le danger.
Le système ferroviaire est également très vulnérable aux intrusions sur son infrastructure, que ce soit par des véhicules ne s’arrêtant pas à un passage à niveau, par des engins agricoles ou de chantier à proximité immédiate des voies, ou par des évènements géologiques ou atmosphériques venant détériorer l’infrastructure (inondations, éboulements), sans qu’elles puissent toujours être détectées avant le passage du convoi.
Les comportements des riverains ou des passagers constituent une préoccupation croissante aussi bien pour les intrusions que pour les actes malveillants.
Enfin, la généralisation des technologiques digitales accroît les risques de perturbations électromagnétiques entre circuits de puissance et réseaux digitaux à haute fréquence et ceux de cyberattaques affectant des composants clefs.
La physique du système ferroviaire constitue le fondement de ses principes de sécurité ; alors que les décélérations au freinage sont modestes, les interactions entre le matériel roulant et l’infrastructure donnent lieu très fréquemment à des accélérations verticales et transversales de plusieurs g qui peuvent conduire à des déformations plastiques ou à des phénomènes de rupture du guidage roue/rail avec des conséquences considérables en raison des énergies qui sont alors libérées. De même les réactions longitudinales au sein d’un même convoi (phénomène d’accordéon) peuvent atteindre plusieurs g lors d’un freinage et conduire à des ruptures d’attelage ou des délestages de roues provoquant des déraillements.
La méthodologie de gestion des risques du système est articulée en plusieurs étapes et visent au travers de sept principes de sécurité ferroviaire (PSF dans la suite de l’article) à empêcher des évènements redoutés, et de prévoir des dispositions constructives ou organisationnelles qui en limitent les conséquences :
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définir a priori des familles d’évènements proscrits notamment en raison des masses ou des énergies en jeu : c’est l‘objet des PSF 1 à 4 ;
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surveiller par une observation systématique les évènements précurseurs de défaillances critiques pour modifier la conception ou la trame de surveillance ou d’entretien et prévenir des modes de défaillance pouvant conduire à des évènements proscrits, c’est l’objet des PSF 1 à 7 ;
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quantifier par une analyse statistique des estimations des courbes d’usure ou de ruine des composants critiques pour adapter leur surveillance et les remplacer à temps ;
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estimer les probabilités d’occurrence d’évènements redoutés (ruptures de composants mécaniques ou métallurgiques par exemple) après combinaison de parades de différente nature notamment humaines et organisationnelles (enjeu des PSF 5 à 7).
MOTS-CLÉS
gestion des risques facteurs organisationnels et humains révolution numérique infrastructure ferroviaire
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2. Interactions avec l’environnement
Les quatre premiers principes de sécurité ferroviaire permettent de déployer des parades protégeant l’environnement de l’infrastructure des risques ferroviaires. Mais, l’environnement est également source de vulnérabilité pour le système ferroviaire : non seulement les intrusions dans l’infrastructure, mais aussi l’impact de la faune ou de la végétation ou des conditions atmosphériques, peuvent compliquer le respect des quatres premiers principes. Les développements technologiques du numérique conduisent par ailleurs à des risques d’une nouvelle nature pour respecter les principes 5 à 7.
2.1 Risques coutumiers les plus courants
2.1.1 Chocs avec des véhicules routiers
Le réseau français comptait en 2017 (dernier chiffre officiel connu) 15 450 passages à niveau (PN) (contre 25 000 en 1980) franchis par plus de 16 millions de véhicules routiers chaque jour, avec plus de 400 000 fermetures de barrières par jour. Les PN sont proscrits sur les lignes à grande vitesse et ils doivent être gardiennés quand roulent des trains à plus de 160 km/h (pas de PN automatique au-delà de cette vitesse). Trente à quarante personnes décèdent chaque année lors d’accidents à ces franchissements, dus dans la quasi-totalité des cas à des erreurs de conducteurs routiers. Depuis 2000, les deux plus graves accidents sont la catastrophe d’Allinges le 2 juin 2008 (7 enfants tués dans leur bus) et celle de Millas le 14 décembre 2017 (6 enfants tués dans leur bus scolaire). Ces drames ont conduit à des programmes nationaux en 2014 et 2019 de renforcement de la sécurité routière et ferroviaire, notamment par l’expérimentation de radars pour diagnostiquer les véhicules coincés sur un PN, jumelés avec des procédures d’arrêt par radio des trains. Ils ont également conduit à de nouvelles méthodes de construction des matériels roulants français généralisées par une normalisation européenne (cf. le point 4.2.2.4 du règlement UE 1302/2014 de la Commission européenne du 18 novembre 2014) leur permettant d’encaisser des chocs frontaux en protégeant le conducteur et les passagers.
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BIBLIOGRAPHIE
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(1) - ALIAS (J.) - La voie ferrée. - Techniques de construction et d'entretien, Eyrolles (1984).
-
(2) - RÉTIVEAU (R.) - La signalisation ferroviaire. - Presses des Ponts et Chaussées, épuisé mais toujours la référence en langue française (1987).
-
(3) - MESSULAM (P.) - Considérations actuelles sur le pilotage automatique en ferroviaire. - Revue générale des chemins de fer n° 27 (2017).
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(4) - NETWORKRAIL - Adaptation au changement climatique. - Résilience aux conditions météorologiques et adaptation aux changements climatiques. Centrale de sécurité, networkrail.co.uk.
DANS NOS BASES DOCUMENTAIRES
ANNEXES
Sur les normes constructives du matériel roulant européen : voir le texte des STI (spécifications techniques d’interopérabilité) et notamment son § 4.2.2.
EUR-Lex-32014R1302-EUR-Lex (europa.eu).
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