Présentation
EnglishRÉSUMÉ
Deux méthodes seulement permettent de se protéger contre le bruit, celle qui consiste à le réduire à la source, et celle qui consiste à empêcher sa propagation vers la zone à protéger. Disposer sur le trajet de l’onde un ensemble de sources secondaires émettant une deuxième onde de même amplitude, mais de signe opposé, fait partie des techniques de réduction. Au final, par interférence destructive, la résultante sera nulle dans cette méthode déclarée active. Après un rappel des bases physiques et acoustiques, cet article développe le concept de contrôle actif, ses deux stratégies de commande, en boucle ouverte ou fermée, et les différentes recherches de filtrage optimal.
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Gérard MANGIANTE : Professeur des universités - Laboratoire de Mécanique et d'Acoustique (CNRS Marseille)
INTRODUCTION
Classiquement on distingue deux méthodes principales de protection contre le bruit : on peut réduire le bruit à la source ou empêcher sa propagation vers la zone à protéger. La réduction du bruit à la source, lorsqu'elle est possible, devrait toujours être entreprise avant toute autre forme de lutte contre le bruit car c'est souvent elle qui présente la meilleure efficacité. Par exemple, on peut réduire les émissions aux fréquences basses d'une machine en disposant celle-ci sur un socle massif qui agit par inertie, puis éliminer les fréquences hautes par l'interposition, entre le socle et la machine, d'un matériau résilient comme le liège, le caoutchouc ou la fibre de verre. On peut ensuite compléter ces actions à la source par un traitement acoustique dans la machine et un capotage autour de celle-ci. Lorsque la réduction à la source est impossible ou difficile à mettre en œuvre, on interpose, entre la source de bruit et la zone à protéger, des matériaux qui s'opposent à la propagation des ondes sonores. Pour cela, on peut utiliser des matériaux absorbants, constitués de substances poreuses ou fibreuses, comme la laine de roche ou la mousse de polyuréthane, ou des matériaux réfléchissants, qui renvoient les bruits vers des zones où ils sont moins gênants.
Ces deux techniques de réduction du bruit présentent malheureusement un inconvénient majeur : elles sont difficiles à mettre en œuvre lorsque le bruit à réduire présente des contributions importantes dans le domaine des basses fréquences. Par exemple, l'emploi de matériaux absorbants, très efficace aux fréquences élevées ou moyennes, conduit à des encombrements et des masses prohibitifs aux fréquences basses.
L'absorption et la réflexion ne sont pas les seuls moyens utilisables pour empêcher la propagation d'une onde sonore. Si on dispose sur le trajet de cette onde un ensemble de sources secondaires émettant une deuxième onde de même amplitude, mais de signe opposé, l'addition de ces deux ondes va donner, par interférence destructive, une résultante nulle. Alors que les méthodes de réduction de bruit par absorption ou réflexion sont purement passives, la réduction des bruits par interférence est une méthode active car elle nécessite des actionneurs (les sources secondaires, également appelées sources de contre-bruit). Diverses expressions ont été utilisées pour désigner cette méthode, suivant que l'on focalise l'attention sur tel ou tel aspect particulier du mécanisme de réduction du bruit : absorption acoustique active, absorption acoustique stimulée, anti-bruit actif… Elles ont été abandonnées au profit d'un anglicisme, le contrôle actif (traduction raccourcie de active noise control) qui s'est imposé et que nous emploierons dans la suite du présent article.
Le concept de contrôle actif n'est pas nouveau (nous verrons que les premiers brevets sur le sujet ont été déposés dans les années trente) mais pendant longtemps les tentatives de réalisation et d'exploitation sont restées sans suite. Deux raisons expliquent cette longue gestation :
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si elle n'est pas associée à une méthode de reconstitution du champ acoustique à réduire, l'utilisation des interférences ne permet d'obtenir des réductions notables du niveau sonore que dans des domaines de dimensions restreintes. C'est seulement dans les années soixante-dix que les bases physiques du contrôle actif seront établies à la suite des travaux fondateurs de Jessel ;
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les caractéristiques du bruit à réduire sont généralement variables dans le temps, et les conditions de propagation peuvent fluctuer, ce qui rend nécessaire une réactualisation permanente du signal de commande des sources secondaires.
Les développements, dans les années quatre-vingt, de la microélectronique et du traitement numérique du signal, ont permis la réalisation de systèmes de contrôle actif adaptatif capables d'élaborer à chaque instant, et sans action extérieure, la commande optimale des sources secondaires. Ce progrès fut décisif et entraîna, dans les années quatre-vingt-dix, la naissance des premières applications industrielles du contrôle actif. Parallèlement se développait aussi le contrôle actif des vibrations, plus complexe que le contrôle actif acoustique, et qui est traité dans le fascicule [R 6 200].
À ce jour, le contrôle actif continue de faire l'objet de nombreuses recherches car de nombreux problèmes sont loin d'être complètement résolus. Ils concernent, et la liste n'est pas exhaustive, l'optimisation du nombre et du placement des sources secondaires, la commande des systèmes complexes, la mise au point d'algorithmes de commande performants et robustes, capables de traiter des bruits de toute nature, la réduction des bruits rayonnés par des sources mobiles ou les effets psychoacoustiques du contrôle actif.
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1. Aperçu historique
1.1 Précurseurs
C'est à l'ingénieur Henri Coanda que l'on doit la première description d'un système de réduction des bruits basé sur l'utilisation des interférences. Dans deux brevets français, « Procédé de protection contre les bruits » [1], déposé en 1930, et « Procédé et dispositif de protection contre les bruits » [2], déposé en 1932, il indique : « … sur le trajet d'une onde sonore à éliminer on fait intervenir une autre onde (onde compensatrice) de mêmes caractéristiques que la première, mais déphasée d'une ou plusieurs demi-longueurs d'onde par rapport à celle-ci. De l'interférence de ces deux ondes résulte une zone neutre qui est une zone de silence ». Quelques années plus tard, Paul Lueg dépose un brevet sur le même sujet, d'abord en Allemagne en 1933 [3], puis aux États-Unis en 1934 [4]. Lueg analyse en détail le processus de déphasage nécessaire pour obtenir des interférences destructives entre deux ondes se propageant dans le même sens. Il décrit aussi un dispositif électronique, basé sur un microphone et un amplificateur, permettant d'obtenir le gain et le retard nécessaires pour la commande d'une source de contre-bruit. Le lecteur intéressé trouvera des informations détaillées sur les travaux de Coanda et de Lueg dans les références [5] et [6].
Ces travaux n'eurent aucune suite pratique dans les années qui suivirent les dépôts des brevets, et il fallut attendre les années cinquante pour voir naître la première tentative sérieuse de contrôle actif des bruits. Deux ingénieurs des laboratoires RCA, Harry F. Olson et Everett G. May présentèrent dans la parution de novembre 1953 du Journal of the Acoustical Society of America un « absorbeur électronique de son » [7] basé sur les interférences de deux ondes se propageant en sens contraire. Cet absorbeur consistait en un microphone relié à un haut-parleur par un amplificateur réglé de telle façon que ce haut-parleur émette sur le microphone une pression acoustique égale et opposée à celle de l'onde incidente à réduire. La stabilité du système résultait de la faible distance entre le microphone et le haut-parleur qui ne donnait pas lieu à un trop grand nombre de rotations de phase. Pour des fréquences inférieures à 500 Hz, Olson et May obtenaient...
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BIBLIOGRAPHIE
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(1) - GARNIER (B.) - Contrôle actif des vibrations - . [R 6 200], Bruit et vibrations (2002).
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(2) - COANDA (H.) - Procédé de protection contre les bruits. - Brevet français no 722.274, déposé le 21 octobre 1930, délivré le 29 déc. 1931.
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(3) - COANDA (H.) - Procédé et dispositif de protection contre les bruits. - Brevet français no 762.121, déposé le 31 décembre 1932, délivré le 18 janv. 1934.
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(4) - LUEG (P.) - Process of silencing sound oscillations. - Brevet américain no 2,043,416, déposé le 8 mars 1934, délivré le 9 juin 1936.
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(5) - LUEG (P.) - Verfahren zur Dämpfung von Schallschingungen. - Brevet allemand 655508, déposé le 27 janvier 1933, délivré le 30 déc. 1937.
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