Présentation
Auteur(s)
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Jean CAMASSEL : Directeur de Recherche CNRS
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Sylvie CONTRERAS : Chargée de Recherche CNRS
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Jean-Louis ROBERT : Professeur d’Université - Groupe d’Étude des Semi-conducteurs UMR 5650 Université de Montpellier II
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Pendant plus d’un siècle, les utilisations industrielles du carbure de silicium (plus communément appelé carborundum) se sont limitées à l’exploitation de ses propriétés mécaniques exceptionnelles (dureté) pour la réalisation de poudres abrasives et à l’exploitation de sa résistance à la température et aux agents chimiques corrosifs pour la réalisation de céramiques de revêtement. Pendant ce temps, et en dépit de très fortes potentialités, son utilisation en tant que matériau semi-conducteur ne s’est jamais vraiment développée. La principale raison était la qualité extrêmement médiocre des matériaux obtenus, tant du point de vue structural que de celui de la pureté chimique résiduelle (< 99 %). Cette situation a perduré jusqu’au début des années 1960.
C’est, en effet, à partir du milieu des années 1950 que, sous l’impulsion des groupes militaires et spatiaux, les recherches qui visaient à la mise au point d’une future filière électronique SiC (et qui pendant longtemps avaient été tenues pour purement académiques) se sont fortement accentuées. Elles avaient clairement pour objectif de répondre à une demande stratégique de nouveaux composants, pour la réalisation desquels les filières classiques « silicium » et « arséniure de gallium » n’étaient pas utilisables. C’était (et c’est toujours) le cas dans le domaine des hautes températures ou des hautes fréquences lorsqu’il s’agit de délivrer de très fortes puissances et dans le domaine des composants destinés à fonctionner en milieu hostile (espace, environnement nucléaire, etc.).
Bien que largement initiées dans l’ancienne URSS, le leadership des recherches est vite passé aux États-Unis sous l’impulsion, en particulier, de la NASA (National Aeronautics and Space Administration) et de gros laboratoires de recherche industriels comme le Centre de Recherche Westinghouse (et maintenant de Northrop Grumman Research and Technology Center). Ces efforts ont été rapidement relayés par les laboratoires universitaires (comme l’Université de Pittsburgh, l’Université de Caroline du Nord, etc.) et, à partir des années 1990, par des sociétés privées (comme Cree Research Inc.). Fin 1997 - début 1998, le développement d’une filière « Électronique de puissance SiC » est en bonne voie. Un premier niveau de commercialisation a été atteint et on peut trouver, sur le marché des substrats, des couches épitaxiées et quelques composants élémentaires.
Pour briser ce monopole de fait américain, des efforts de recherche importants ont été consentis en Europe et au Japon. Ils ont souvent été impulsés soit par de grands groupes industriels (comme Daimler-Benz, Toyota, Nippon Steel ou Matsushita) travaillant seuls, soit par des industriels travaillant en collaboration étroite avec une (ou plusieurs) université(s). C’est le cas de ABB avec l’Université de Linköping, en Suède, ou de Siemens avec l’Université de Erlangen-Nürnberg, en Allemagne. En France, l’activité SiC a longtemps été limitée. On citera néanmoins les efforts importants faits au LETI-CEA, à Grenoble, et l’intérêt manifesté par quelques grands groupes industriels (comme Thomson-LCR, SGS-Thomson, Schneider, Schlumberger et plus récemment Sextant Avionique). Enfin, dans le domaine public, outre le soutien accordé par les organismes et ministères à diverses actions en cours, on notera que le Groupement de Recherche du CNRS « Semi-conducteurs à large bande interdite » s’est donné pour objectif de coordonner l’activité des différentes équipes universitaires ou CNRS travaillant sur ce sujet.
En pratique, des progrès importants restent à faire. Ils concernent, à la fois, l’élaboration des substrats, les contacts (surtout pour les applications haute température), la passivation (en particulier pour les applications de redressement très haute tension où il est nécessaire d’éviter la formation d’arcs électriques à l’extérieur de la jonction) et enfin, d’une façon générale, l’encapsulation (parce qu’il n’existe pas de boîtiers spécifiques adaptés aux conditions de fonctionnement visées). On sait, par contre, relativement bien contrôler la technologie des dépôts en couches minces (épitaxie) et les technologies de dopage sélectif (dopage in-situ ou dopage par implantation ionique). On peut contrôler, de façon reproductible, la concentration de porteurs dans plusieurs couches monocristallines successives et, ainsi, poursuivre le développement d’une filière autonome de réalisation de composants.
La filière SiC apparaît comme le développement naturel des filières silicium et arséniure de gallium. C’est la solution idéale pour réaliser des capteurs ou des composants appelés à fonctionner à très haute température ainsi que des composants de puissance. Les enjeux économiques sont clairement identifiés et on estime que, dans les années à venir, le carbure de silicium devrait progressivement remplacer le silicium pour de nombreux composants de puissance devant fonctionner au-delà de 1 000 V.
VERSIONS
- Version courante de août 2012 par Jean CAMASSEL, Sylvie CONTRERAS
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1. Matériau SiC
La possibilité de synthétiser sous forme stœchiométrique le composé binaire SiC a été avancée, dès 1824, par Jöns Jakob Berzelius. Cet auteur suggérait l’existence entre le silicium et le carbone, d’une liaison chimique stable, partiellement ionique, différente des liaisons covalentes rencontrées dans le silicium monocristallin et dans le diamant. Ce n’est cependant qu’à partir de 1891, qu’un procédé de fabrication industrielle de SiC a pu être mis au point par Eugène G. Acheson en Pennsylvanie. La méthode utilisée consistait à faire passer une décharge électrique dans un mélange de poudres de carbone et de silice. Elle est toujours utilisée pour la synthèse des poudres abrasives et donne un mélange de blocs (roches artificielles) de SiC de mauvaise pureté chimique, mais relativement monocristallines.
C’est en étudiant les cristaux directement produits par E. G. Acheson que B. W. Frazier découvrit, en 1893, qu’il existait, à la température ambiante, plusieurs formes stables de SiC (polytypes) dont chacune était caractérisée par une forme différente d’empilement atomique. Ce phénomène constitue toujours la grande originalité du SiC.
1.1 Le polytypisme de SiC
Le terme carbure de silicium (ou carborundum) est un terme générique qui recouvre toutes les formes stœchiométriques de carbone et silicium existant en phase solide. En pratique, il en existe plusieurs dizaines et on peut toutes les décrire en partant d’un empilement de N bicouches élémentaires SiC constituant chacune un plan hexagonal compact.
Un polytype déterminé comprendra N bicouches (plans) et ne différera des autres polytypes que par le détail de la séquence d’empilement des N plans successifs (figure 1).
Dans chaque plan, les atomes de silicium (de carbone) se trouvent au centre d’un tétraèdre formé par leur partenaire intercouche et par trois atomes de carbone (de silicium) situés en position de premiers voisins dans la couche (inférieure ou supérieure) immédiatement adjacente. Seule la position relative des deuxièmes voisins, correspondant aux modes d’empilement de deux plans hexagonaux compacts successifs, peut changer. La symétrie totale du cristal dépendra donc, au travers de ces différences d’empilement, des N bicouches successives qui constituent la cellule unitaire. On utilise...
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