Un projet vient de débuter dans l'Ain afin d'expérimenter le stockage souterrain d'hydrogène issu d'énergies renouvelables en cavité saline, sur un site jusqu'ici utilisé pour stocker du gaz naturel. Après 2023, ce site pourrait faire l’objet d'une exploitation commerciale.
Seuls quatre sites dans le monde sont recensés, trois aux États-Unis et un quatrième au Royaume-Uni. Et bientôt un cinquième en France, sous la forme d’un démonstrateur. À Étrez dans l’Ain, un projet vient de démarrer afin d’expérimenter le stockage d’hydrogène en cavité saline. Localisé sur un site de stockage souterrain jusqu’ici dédié au gaz naturel, ce projet baptisé HyPSTER, est coordonné par Storengy, une filiale d’Engie, et regroupe sept partenaires français, anglais et allemands. Doté d’un budget de 13 millions d’euros, il a reçu le soutien financier de l’Europe pour un montant de 5 millions d’euros.
Le stockage en cavité saline est une technique qui existe déjà depuis plus de 50 ans. Elle consiste à créer une caverne souterraine artificielle en injectant de l’eau douce dans une roche sédimentaire composée de sel gemme, c’est-à-dire de cristaux de chlorure de sodium. La cavité créée étant imperméable, elle permet de stocker diverses substances, comme du gaz naturel. Situé en général entre 1 000 à 1 500 mètres sous terre, ce mode de stockage présente l’intérêt d’occuper peu d’espace à la surface. D’importantes quantités peuvent aussi être stockées puisque certaines cavités sont capables d’abriter une Tour Eiffel.
Le projet HyPSTER répond à un besoin de stockage des énergies renouvelables pour pallier leur intermittence. L’hydrogène sera décarboné, car produit par électrolyse de l’eau, à partir d’électricité issue d’énergies vertes, notamment des panneaux photovoltaïques. Cet hydrogène sera dans un premier temps comprimé à environ 150 bar, avant d’être injecté sous une forme gazeuse dans la cavité. L’un des enjeux de cette expérimentation va consister à mesurer les risques de ce stockage en cavité saline.
Aucun incident notable depuis les années 70
Comparé au gaz naturel, l’hydrogène possède des caractéristiques physiques différentes. La molécule se révèle de plus petite taille – 71 picomètres contre 108 pour le méthane – et a une propension à se diffuser beaucoup plus facilement. « Il est donc nécessaire d’être particulièrement attentif aux risques de fuite, analyse Franz Lahaie, chargé de mission hydrogène à l’Ineris (Institut national de l’environnement industriel et des risques). Le sel présente l’avantage d’être un matériau naturel rocheux extrêmement peu perméable. Depuis les années 70, les cavités salines ont déjà prouvé leur capacité à stocker et retenir de l’hydrogène sans incident notable. Nous savons donc que le sel est un matériau propice pour stocker ce type de gaz. »
Le principal risque va se situer au niveau du puits utilisé pour acheminer l’hydrogène depuis la surface jusqu’à la cavité. Dans le cadre de ce projet, des tests spécifiques seront réalisés pour vérifier l’étanchéité de cet ouvrage. Les autres équipements présents à la surface feront aussi l’objet d’une surveillance accrue, comme les canalisations et les compresseurs.
L’hydrogène a également la particularité d’être une substance particulièrement inflammable. Sa plage d’explosivité est extrêmement large puisqu’il peut s’enflammer lorsque ses concentrations dans l’air sont comprises entre 4 % à 75 %, alors que pour le méthane, elles doivent être comprises entre 5 à 15 %. Autre risque : l’énergie nécessaire pour enflammer un mélange d’hydrogène et d’oxygène est extrêmement faible, puisque même l’électricité statique d’un vêtement peut suffire à enflammer un nuage d’hydrogène et donc générer une explosion.
Conformément à la réglementation, des zones ATEX (Atmosphères explosives) devront être définies. « Il s’agit d’une réglementation du code du travail qui vise à protéger les salariés et les opérateurs qui interviennent sur ce type d’installation, ajoute l’expert de l’Ineris. Elle n’est pas spécifique à l’hydrogène, mais s’applique à toutes les installations qui mettent en œuvre des produits inflammables ou combustibles. »
Des cycles d’injections et de soutirages beaucoup plus fréquents
Étant donné que ce stockage va servir à moduler les variations de production d’énergies renouvelables en amont, la cavité va être soumise à un nombre d’injections et soutirages beaucoup plus fréquents, comparé à ce qu’il est d’usage pour le stockage du gaz naturel. La fréquence de ces cycles sera hebdomadaire, voire journalière. « Nous allons vérifier le comportement de la cavité, du puits et de tous les équipements face à la répétition de ces cycles, précise Franz Lahaie. À l’intérieur de la cavité, ce contrôle sera réalisé entre autres grâce à des bilans de masse en mesurant la différence entre les quantités d’hydrogène entrées et sorties. »
D’une durée de trois ans, le projet HyPSTER doit se terminer à la fin de l’année 2023. Un électrolyseur d’une puissance de 1 MW sera construit sur le site et produira chaque jour 400 kg d’hydrogène. Durant la phase expérimentale, seule la partie supérieure de la cavité sera utilisée, soit un volume d’environ 2 tonnes. À l’issue de ce projet, il est possible que cette cavité soit exploitée de manière commerciale par Storengy. Le volume stocké atteindrait alors 44 tonnes, soit l’équivalent de la consommation de 1 760 bus à hydrogène. Ce projet s’inscrit dans un cadre beaucoup plus large, celui de la Zero Emission Valley, un projet situé en Auvergne-Rhône-Alpes qui vise au déploiement de 20 stations hydrogène sur le territoire et à apporter une aide à l’acquisition de 1 000 véhicules.
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