Il vaut 42 US gallons ou 159 litres. Ce baril, traditionnellement peint en bleu, a supplanté celui de whisky qui ne représentait que 40 US gallons, grâce a ses 5 % de volume en plus, gracieusement octroyés dit-on par Rockefeller, lassé des complaintes de ses clients qui trouvaient les barils de pétrole insuffisamment remplis. Geste commercial, vrai ou faux, mais à la hauteur de la réputation du personnage.
- Figure 1 : densité des produits pétroliers (données EIA)
Ce comptage en volumes du pétrole et de ses dérivés présente toutefois une source d’ambiguïté majeure, en raison de la variation de densité des produits pétroliers tout au long du processus de raffinage (FIG.I). Un baril de pétrole brut, de degré API =35 et de masse volumique autour des 0,85 g/cm3, conduit par les opérations de raffinage à des produits volatils comme les gaz liquides (propane, butane) de densités 0,55 et d’essence de densité 0,737 ou de white spirit de densité 0,74.
Pour des motifs économiques et de demande du marché en carburants, les pétroliers par de complexes opérations de conversion profonde, produisent de moins en moins de produits lourds (fonds de baril) et de plus en plus de carburants légers ce qui entraîne la première règle de base des productions pétrolières actuelles: il faut en volume de moins en moins de pétrole pour produire un gallon ou un litre de carburant en sortie des raffineries.
Cette règle simple est de plus exacerbée par l’utilisation croissante de biocarburants qui sont utilisés comme additifs aux carburants pétroliers. Selon l’EIA, 85% de l’essence vendue aux Etats-Unis dès 2010 contenait de l’éthanol, de nos jours ce sont près de 100% de l’essence vendue sur ce continent qui sont alcoolisés.
En Europe, d’après EurObserv’ER les consommations de biocarburants en 2012 ont atteint les 14,4 MTEP dont 11,4 pour le biodiesel. Ces quantités représentent en volume autour des 310 mille barils/jour pour une consommation moyenne de produits pétroliers en Europe de 13,5 millions de barils/jour. On le voit, il reste d’énormes progrès à faire dans cette vieille Europe minée par son addiction au pétrole largement importé.
Ces affirmations nécessitent d’être étayées globalement par quelques chiffres issus des publications de Stuart Staniford qui compilent depuis des années les données de l’EIA américaine, de l’IEA parisienne (OCDE) et de l’OPEP.
- Tableau 1 : Extractions en millions de barils par jour de pétrole brut (« crude ») et d’une fraction des condensats de gaz assimilables au pétrole (« C&C ») comparées aux livraisons de produits pétroliers et autres biocarburants en sortie de raffineries (« liquid ») représentés par Stuart Staniford
C&C | Liquid | Delta | Gain (%) | |
2013 | 76 | 91 | 15 | 20 % |
2002 | 67 | 77 | 10 | 15 % |
En 2002 le monde extrayait 67 millions de barils par jour de pétrole brut et de condensats (C&C, TAB.I) pour une livraison en sorties de raffineries de 77 millions de barils par jour de produits raffinés (liquid). Ceci représentait un gain en volume de 15%. En 2013 ces volumes représentaient respectivement 76 et 91 millions de barils par jour et affichaient un gain en volume de 20%.
Entre-temps les volumes de biocarburants consommés dans le monde sont passés de rien du tout en 2002 à 2,5 millions de barils par jour en 2013 (selon la FAO et de nombreuses raffineries obsolètes ont été fermées (surtout en Europe) ou modernisées et équipées de conversion profonde qui fait quasiment disparaître les fonds de barils de fortes densités. Il faut en moyenne de moins en moins de pétrole ou de condensats en volume pour produire un litre de carburant.
En d’autres termes la progression en volume des consommations de produits pétroliers, comptée en sortie de raffineries, est supérieure à celles des extractions de pétrole et de condensats. Les progrès continus dans le raffinage et l’utilisation croissante des biocarburants en sont la cause.
C’est la raison pour laquelle il vaudrait mieux éviter de publier certains chiffres erronés qui alimentent la littérature, surtout française qui traduit gaillardement : « Global oil supply » par « productions mondiales de pétrole brut » (sic) alors qu’il faudrait intituler le graphique par « fournitures mondiales en produits pétroliers raffinés et autres biocarburants » qui sont aux variations de stocks près des consommations.
La notion de « supply » place la mesure en volume à la sortie des raffineries, biocarburants compris. Les publications américaines parlent aussi de « liquid » issus des raffineries qui vont des gaz liquéfiés comprimés (propane, butane) aux fuels lourds ou pétrole brut brûlés dans les chaudières industrielles fixes ou celles embarquées de certains navires.
Il faut reconnaître que les publications d’agences telles que l’IEA ou les publications de l’OPEP ne font que bien peu d’efforts pédagogiques pour que le lecteur non averti s’y retrouve.
Par Raymond Bonnaterre
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