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Poussée par un vide, notre galaxie surfe à plus de 2 millions de km/h

Posté le 3 février 2017
par La rédaction
dans Environnement

Une équipe internationale, impliquant le CEA, l’Université Claude Bernard Lyon 1 et le CNRS, a découvert la raison du déplacement de notre galaxie à 630 km/s : le Dipole Repeller. Ce résultat, à paraître le 30 janvier 2017, apporte une réponse à une énigme de plus de 40 ans pour les astrophysiciens et a été sélectionné par Nature Astronomy, la toute nouvelle revue du groupe Nature consacrée aux sciences de l’Univers.

Dans notre voisinage extragalactique existe une immense région vide qui exercerait une force de répulsion sur notre galaxie, la Voie lactée. Ce « repousseur » contribue aux forces gravitationnelles qui nous font naviguer à près de 2,3 millions de km/h sur la toile cosmique, la structure suivant laquelle la matière s’organise à grande échelle, notamment sous la forme de filaments qui connectent des galaxies entre elles et séparent des vides.

Quand attraction et répulsion se conjuguent pour nous mettre en mouvement Ce mouvement de notre galaxie (et de sa compagne, la galaxie d’Andromède) était déjà connu des astrophysiciens qui en recherchaient l’origine depuis 40 ans. Pour expliquer ce déplacement, les recherches se sont historiquement d’abord portées sur la possibilité d’un excès de galaxies situées dans la direction générale de notre mouvement.

Le suspect initial a été appelé le Grand Attracteur, une région d’une demi-douzaine d’amas riches en galaxies à une distance de 150 millions d’années-lumière de nous. Puis, l’attention a été portée sur une entité plus importante, toujours dans la même ligne de visée et directement derrière le Grand Attracteur : la Concentration d’amas de galaxies de Shapley, située à 600 millions d’années-lumière de nous. Mais, au fil des ans, le débat s’est enlisé sur l’importance relative de ces deux attracteurs, ceux-ci ne suffisant pas pour expliquer notre mouvement, d’autant qu’il ne pointe pas exactement dans la direction de Shapley comme cela devrait être le cas.

L’hypothèse d’une région sous-dense, un « vide » extragalactique, est alors avancée pour élucider ce phénomène. Obtenir une confirmation de l’observation d’un tel vide est extrêmement difficile. C’est pourquoi les chercheurs ont décidé, au lieu de regarder la répartition de la partie immergée de la masse (celle qui est visible : les galaxies), de cartographier en trois dimensions les mouvements de toute la matière (matière visible, dite aussi baryonique, et matière invisible, dite noire ou plus justement : transparente).

Daniel Pomarède, ingénieur-chercheur au CEA1 , explique que : « C’est grâce au rayonnement microonde émis il y a plus de 13 milliards d’années que le mouvement de la Voie lactée est détecté. Cette lumière nous parvient de toutes les directions, mais du fait de notre déplacement, on l’observe avec un décalage spectral vers le bleu dans la direction de notre mouvement et un décalage spectral vers le rouge dans la direction opposée. Et c’est en analysant cet effet dipolaire qu’on peut en déduire notre vitesse de 630 km/sec. » Hélène Courtois, astrophysicienne à l’Université Lyon 1 2 , complète : « En analysant les champs de vitesse de milliers de galaxies peuplant notre univers local, nous avons identifié le déplacement de « fleuves de matière », comme ceux qui parcourent Laniakea », notre superamas de galaxies découvert en 2014 par la même équipe. « Ces fleuves sont une conséquence directe de la distribution de la masse totale, qui s’éloigne des régions vides et se dirige vers les régions de plus haute densité. »

L’équipe a ainsi découvert qu’à l’emplacement de notre galaxie les forces répulsives et attractives provenant d’entités lointaines sont d’importances comparables et en a déduit que les influences majeures qui sont à l’origine de notre mouvement sont l’attracteur Shapley et une vaste région de vide (c’est-à-dire dépourvue de matière visible et invisible), précédemment non identifiée, qu’ils ont nommé le Dipole Repeller. Cette découverte, publiée le 30 janvier 2017 dans Nature Astronomy, permet en effet d’expliquer l’origine du dipôle (voir l’encadré plus bas) observé dans le rayonnement du fond diffus cosmologique, un ingrédient essentiel du modèle de standard de la cosmologie.

Cette cartographie des courants de matière (les flèches directionnelles) et des surfaces équipotentielles gravitationnelles (régions de l’espace « ressentant » la même attraction de gravitation – en vert et en jaune) permet, en visualisant son influence, de matérialiser la région du Dipole Repeller, ainsi que les nœuds et filaments de la toile cosmique (surfaces rouges et grises). La structure à grande échelle de notre Univers local est ainsi représentée. La flèche jaune est positionnée sur notre galaxie la Voie lactée et indique la direction du dipôle du fond diffus cosmologique. Cette cartographie couvre une région de notre Univers d’environ 2,5 milliards d’années-lumière de large. © Y. Hoffman, D. Pomarède, R.B. Tully, H. Courtois

Dorénavant, les astrophysiciens savent enfin quelle voie suit notre galaxie, attirée par la lointaine concentration de masse Shapley et repoussée par le Dipole Repeller, une région faite de « rien », même pas de matière invisible, dont finalement on ne connaît encore presque rien… C’est pourquoi les astrophysiciens préparent maintenant des relevés ultra-sensibles en optique, proche-infrarouge et radio qui permettront d’identifier les rares galaxies qui peuvent résider dans et autour d’un tel vide afin d’en approfondir notre connaissance.

 Source : cnrs


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