Globalement, un tiers des réserves pétrolières, la moitié des réserves de gaz et plus de 80% du charbon devront rester sous terre jusqu’à 2050, soulignent les auteurs de cette étude intitulée « Quelle quantité d’énergies fossiles pouvons-nous exploiter? »
Ce sera le seul moyen d’atteindre l’objectif de l’ONU de limiter le réchauffement à +2°C par rapport à l’ère pré-industrielle, souligne Christophe McGlade, de l’Institute for Sustainable Resources du University College de Londres.
« Les hommes politiques doivent réaliser que leur instinct consistant à recourir aux énergies fossiles disponibles sur leur territoire, est incompatible avec leur engagement à tenir l’objectif de 2°C, » dit-il.
Les experts de l’Onu, qui ont publié en 2014 la plus vaste évaluation scientifique du changement climatique, estiment que pour atteindre ce but, l’homme devra limiter ses émissions de CO2 à environ 1.000 milliards de tonnes (gigatonnes), après en avoir déjà consommé 2.000. Les émissions que générerait l’usage des réserves d’énergies fossiles encore disponibles sont évaluées par l’étude à 3.000 gigatonnes.
« Les entreprises ont dépensé plus de 670 milliards de dollars (565 milliards d’euros) l’an dernier dans la recherche de nouvelles ressources fossiles », souligne Paul Ekins, co-auteur de l’étude. « Elles devront revoir ces budgets si des politiques sont mises en place pour soutenir la limite des +2°C ».
L’étude fait le point sur les réserves et leur localisation, avant d’estimer quelles quantités peuvent être exploitées jusqu’en 2050.
Les auteurs ont pris deux scénarios, l’un dans lequel le monde s’appuie sur un « vaste réseau » de capture et stockage du carbone — des systèmes dans les faits très peu développés encore –, et l’autre sans ces technologies.
– gagnants et perdants –
Même si les systèmes de capture du CO2 étaient répandus, il faudrait renoncer à plus de 430 milliards de barrils de pétrole.
Dans ce cas, le Moyen-Orient à lui seul devrait renoncer à plus de 260 milliards de barils, soit 38% de son stock (l’équivalent de huit années de production aux niveaux de 2013).
L’Amérique latine devrait renoncer à 58 milliards de barrils, le Canada à 39 milliards et les anciens Etats soviétiques à 27 milliards.
La Chine et l’Inde devront éviter d’exploiter près de 70% de leurs réserves de charbon, et l’Afrique presque 90%. L’Europe renoncera à 78%, les Etats-Unis à 92%.
« Ces résultats montrent qu’il faut transformer complètement notre compréhension de la disponibilité des énergies fossiles, » insiste l’étude.
La répartition inégale des réserves à ne pas toucher sera un défi dans la recherche d’un accord mondial sur le climat, espéré à Paris fin 2015, soulignent les experts du climat Michael Jakob et Jerôme Hilaire, dans une analyse jointe à l’étude.
« Seul un accord global qui compensera les pertes des uns et sera perçu comme équitable par tous, pourra imposer de strictes limites au recours aux énergies fossiles », ajoutent-ils.
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