Chaque année dans l’Union Européenne (UE), plus de 58 millions de tonnes de déchets alimentaires sont produites, soit une perte estimée à 132 milliards d’euros. Ce gaspillage représente environ 16 % des émissions totales de gaz à effet de serre du système alimentaire européen. Face à cette situation, le Conseil de l’UE vient d’adopter sa position sur la révision de la directive-cadre sur les déchets, notamment alimentaires. Il propose de réduire le gaspillage de 10 % au niveau de la transformation et de la fabrication d’ici à 2030 et de 30 % (par habitant) dans le commerce de détail, les restaurants, les services de restauration et les ménages.
Ces objectifs sont le fruit d’un compromis adopté par les ministres européens de l’Environnement. Ils se révèlent moins ambitieux que ceux formulés en mars dernier par le Parlement européen qui souhaitait réduire les déchets d’au moins 20 % dans la transformation et la fabrication des aliments et d’au moins 40 % dans le commerce de détail, les restaurants, les services alimentaires et les ménages. Mais ils sont sensiblement les mêmes que les propositions de la Commission européenne formulées en juillet 2023.
Pour parvenir à cette position, le Conseil de l’UE a ajouté un certain nombre de flexibilités. Ainsi, l’année de référence qui sert de base de calcul à la réduction, a été fixée à 2020, mais les États membres sont autorisés à utiliser une année antérieure, à condition qu’une méthode adéquate de collecte des données soit validée. Des facteurs de correction ont également été introduits afin de tenir compte des fluctuations liées au tourisme et aux niveaux de la production dans la transformation et la fabrication des denrées alimentaires par rapport à l’année de référence.
Reste que ces objectifs de réduction du gaspillage alimentaire sont inférieurs à ceux fixés par le Pacte vert (Green Deal). Dans cette initiative, l’UE s’était en effet engagée à atteindre les objectifs de développement durable des Nations unies, à savoir, réduire de moitié le gaspillage alimentaire par habitant au niveau de la vente au détail et des consommateurs d’ici à 2030, ainsi qu’à réduire les pertes alimentaires le long des chaînes de production et d’approvisionnement. Des discussions doivent à nouveau être engagées avec le Parlement européen en vue d’adopter le texte final de révision de la directive-cadre sur les déchets.
Les quantités de déchets produits par habitant varient de 68 à 397 kg par an
Ces difficultés à s’entendre sur un niveau de réduction en Europe sont en partie liées à la grande hétérogénéité des quantités de déchets produits par les pays membres. Ainsi, avec 129 kg de déchets alimentaires produits par habitant et par an, la France se situe au niveau de la moyenne européenne, qui s’élève à 131 kg, tout comme l’Allemagne (131 kg). Avec respectivement 397 kg et 262 kg par habitant, Chypre et la Belgique sont les deux pays qui en produisent le plus, tandis que la Slovénie (68 kg) et la Croatie (71 kg) sont ceux qui en produisent le moins.
Mais surtout, certains pays ont depuis plusieurs années adopté un plan d’action pour réduire ces déchets et se sont déjà fixé des objectifs plus ambitieux. À l’image de la France, qui s’est engagée dès 2013 dans une lutte contre le gaspillage alimentaire et a aujourd’hui l’intention de réduire de 50 % le gaspillage (par rapport au niveau de 2015) d’ici à 2025 aux niveaux de la distribution alimentaire et de la restauration collective, et d’ici à 2030 aux stades de la consommation, de la production, de la transformation et de la restauration commerciale. De son côté, l’Allemagne souhaite diminuer de moitié le gaspillage alimentaire par habitant au niveau du commerce de détail et des consommateurs d’ici à 2030 et a débuté une stratégie nationale dès 2019.
Pour atteindre son objectif, la France a pris de nombreuses dispositions législatives, comme l’interdiction de rendre impropre à la consommation des denrées encore consommables qui s’applique aux industries agroalimentaires, aux grossistes, aux distributeurs et à la restauration collective. Au-delà d’un chiffre d’affaires annuel de 50 millions d’euros, ces acteurs ont l’obligation de proposer une convention de don à une association habilitée. Des sanctions ont parallèlement été renforcées. En cas de destruction d’invendus alimentaires encore consommables, les contrevenants s’exposent à une amende pouvant atteindre jusqu’à 0,1 % du chiffre d’affaires du dernier exercice clos.
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