Générations Futures a acheté 31 salades dans les départements de l’Oise et de la Somme et les a fait analysées par le laboratoire belge Primorise, agréé par les autorités françaises. L’étude comprend 9 laitues, 8 feuilles de chênes, 5 frisées, 4 batavias, 3 scaroles et 2 roquettes. 29 sont d’origine Française, une provient d’Espagne et la dernière vient d’Italie.Sur les 31 échantillons analysés, 25 contiennent au moins un résidu de pesticide et 21 contiennent au moins un résidu de pesticide suspecté d’être perturbateur endocrinien. Seuls 6 salades ne contiennent aucun résidu. En moyenne, les échantillons testés contiennent un peu plus de 4 résidus de pesticides chacuns, dont 2 résidus perturbateurs endocriniens. Une salade en contenait même dix.
Ces résultats portent sur un nombre faible d’échantillons pour permettre de les généraliser à l’ensemble des salades vendues en France. Mais ils corroborent ceux de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes ( DGCCRF) et de l’EFSA , l’autorité européenne de sécurité des aliments. En effet, le plan de surveillance de la DGCCRF publié en 2013 montre la présence de résidus de pesticides dans près de 58 % des échantillons de salades testés. De plus, selon un rapport de l’EFSA portant sur plus de 1000 salades, 36 % des échantillons contenaient plusieurs résidus, de 2 à 13.
De quelles quantités parle-t-on? Des LMR respectées mais un effet cocktail possible
L’ensemble des résidus détectés ont été comptabilisés, que les concentrations soient inférieures ou non aux limites de quantification. Dans un communiqué altertant sur une manipulation de Générations Futures, le collectif de producteurs Sauvons les Fruits et Légumes de France dénonce « la vaste manipulation que constitue cette pseudo-enquête », « l’oubli du cuivre » largement utilisé en agriculture biologique, et le fait que l’ONG « n’avance strictement aucun chiffre ».
Mais des chiffres, il y en a. Et Générations Futures a conscience des limites de son étude. « Nous n’avons relevé aucun dépassement des Limites Maximales Autorisées (LMR) dans les échantillons testés, reconnaît l’ONG. Si nous notons cet aspect positif, il est important de prendre en compte que les LMR, pour de nombreux pesticides sur salades, sont très élevées».
Les chiffres sont là : « La teneur en résidus de pesticides (hors ion bromure) par kilo d’échantillon est en moyenne de 0,549 mg/kg par échantillon, avec un maximum à 4,467 mg/kg pour un échantillon», avance l’ONG. Ces valeurs sont loin d’être négligables. Les LMR sont définies sur la base d’un risque retenu pour la population générale. Mais dans certains cas de consommation importante, des populations à risque peuvent être exposées à des quantités non négligeables de pesticides. Par exemple, l’ONG rappelle que la LMR du boscalid, substance active fréquemment retrouvée dans les échantillons analysés est de 30 mg/kg pour la laitue, mais de 5 mg/kg pour le poireau, 2 mg/kg pour la carotte et 0,05 mg/kg pour l’asperge.
Au-delà des concentrations mesurées, l’association s’inquiète surtout du nombre de résidus différents retrouvés et de leur possible effet « cocktail ». Car en mélange, même à de faibles doses, des molécules peu ou pas toxiques, prises isolément peuvent avoir des effets délétères une fois associées. Les LMR ne prennent pas en compte ces effets et ne s’appliquent que substance, par substance.
Des pesticides interdits
Deux échantillons contiennent une ou plusieurs substances actives interdites et trois des substances interdites d’usage sur salade en France. L’un de ces 3 échantillons contient même 2 substances interdites d’usage sur salade en France (mandipropamid et imidaclopride). La présence de DDT dans 2 échantillons est certainement liée à la persistance de ce produit dans le sol, note Générations Futures.
« La présence de pesticides interdits en Europe ou sur la culture de la salade dans plus de 16% des échantillons testés est inacceptable, s’indigne François Veillerette, porte-parole de Générations Futures. Là encore, nous attendons une action forte du Gouvernement qui doit faire rapidement cesser cette situation, sur cette culture et sur toutes les autres », en faisant appliquer les réglementations européennes et nationales existantes, tant sur les pesticides que sur les perturbateurs endocriniens.
Générations Futures dénonce le retard de la Commission européenne sur la question des perturbateurs endocriniens qui sont contenus dans de nombreux pesticides autorisés. Alors qu’une définition européenne des perturbateurs endocriniens devait être retenue en 2013, les travaux ont été reportés en attendant que soit rendue une étude sur l’impact socio-économique de l’interdiction de ces substances.
Avec 5 kg par an et par ménage selon l’INSEE, la salade est le quatrième légume le plus consommé en France. La France en produit chaque année un peu plus de 250 000 tonnes.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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