La perliculture est la deuxième source de revenus en Polynésie française, mais est associée à une source spécifique de pollution plastique. Coordonnée par l’Ifremer, une nouvelle étude parue dans le Journal of Hazardous Materials confirme une contamination généralisée de trois lagons de l’archipel des Tuamotu dans lesquels la perliculture est bien présente : Ahe, Manihi et Takaroa. Les concessions marines perlicoles y représentent respectivement 5,6 %, 2,5 % et 4,4 % des superficies totales du lagon.
Les campagnes d’échantillonnages se sont déroulées entre novembre 2017 et mars 2018. Elles y ont dénombré de 14 à 716 microplastiques par mètre cube d’eau dans la colonne d’eau, jusqu’à 21 microplastiques par gramme de chair humide d’huîtres perlières en élevage et jusqu’à 8 microplastiques par mètre cube d’eau en surface. « Par comparaison avec d’autres sites au niveau mondial, ces niveaux de contamination par des microplastiques sont élevés, notamment chez l’huître », souligne dans un communiqué Tony Gardon, premier auteur de cette étude réalisée pendant sa thèse à l’Ifremer du Pacifique et actuellement post-doctorant au Centre de recherches insulaires et observatoire de l’environnement (CRIOBE).
Des fragments de plastiques issus de la perliculture
En caractérisant ces microplastiques par spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier, les chercheurs ont trouvé une présence dominante de fragments d’une taille comprise entre 20 et 200 µm en polyéthylène et d’une couleur noire-grise. La forte présence de microplastiques en forme de fragment (plus de 70 %) suggère qu’ils résultent de la décomposition de débris plastiques plus gros. Ces fragments présentent notamment des similitudes avec les équipements en plastique utilisés en perliculture, en particulier les collecteurs de naissains et les cordes qui fixent les stations d’élevage.
L’étude, réalisée dans le cadre du projet Microlag, avec le soutien du gouvernement de Polynésie française via la Direction des Ressources Marines, porte sur des zones pourtant peu peuplées et soumises à une faible pression touristique. Mais ces zones connaissent une activité de perliculture historique. Depuis 40 ans, l’activité ne s’est pas accompagnée de plan structuré de gestion des déchets, souligne l’étude. Et alors que durant les années 2000, la crise du secteur a entraîné plusieurs fermetures de fermes perlières, des installations laissées à l’abandon dans le lagon s’accumulent et se fragmentent lentement.
En 2014, un inventaire réalisé par des scientifiques dans le lagon d’Ahe avait révélé la présence de milliers de tonnes d’engins perlicoles – opérationnels ou abandonnés – en plastique. Les plastiques les plus fragiles peuvent ainsi se fragmenter et s’ajoutent aux microplastiques entrant dans les lagons à partir d’autres sources anthropiques. Ils s’ajoutent également aux microplastiques en provenance du gyre océanique du Pacifique Sud – l’une des 5 grandes zones d’accumulation de déchets plastiques flottant au milieu des océans – situé non loin de là.
La loi du 18 juillet 2017 réglementant les activités professionnelles liées à la production et la commercialisation des produits perliers et nacriers en Polynésie française vise à structurer la filière et prévoit d’obliger à démonter et retirer les installations après usage. Malgré cette loi, le secteur peine toujours à se structurer. Si un plan de gestion et de valorisation des déchets perlicoles est actuellement à l’étude, l’objectif défendu par l’Ifremer à moyen terme consiste à développer des matériaux alternatifs aux plastiques. Car une étude précédente de l’Ifremer avait déjà montré les impacts néfastes des microplastiques sur les huîtres perlières.
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