Agir dès à présent pour inverser la tendance, et retrouver des filles dans les filières scientifiques à la rentrée 2023. Agir également pour développer une politique publique, ferme et ambitieuse, pour répondre aux enjeux de “France 2030” [1].
La France veut se réindustrialiser, reprendre sa place dans le nucléaire, conquérir la chaîne de valeur de l’hydrogène, réussir la transition écologique et énergétique, se renforcer dans le digital… Comment réussir ces défis sans la moitié des talents, les filles, alors que nous avons un manque structurel d’ingénieurs ?
5.000 ingénieurs manquent dans la filière hydrogène, 10.000 dans la filière de l’air et de l’air et de l’espace, 10.000 dans le nucléaire… chaque année 38.000 nouveaux ingénieurs sont diplômés, alors qu’il en faudrait 60.000.
Grâce à un travail en profondeur et sans relâche durant les deux dernières décennies, l’effectif des filles avait augmenté jusqu’à représenter 47% des élèves présentant un bac scientifique.
Selon le collectif Maths et Sciences [2], depuis la réforme du bac en 2019, l’effectif des élèves à profil scientifique a plongé de 24% pour un nombre stable de bacheliers. Pire, la part des filles a encore plus baissé : parmi les élèves recevant plus de 6 heures de cours de maths en terminale, l’effectif des filles a baissé de 61% !
Ces résultats confortent ceux des enquêtes de l’association Ingénieurs Et Scientifiques de France (IESF), ainsi que ceux de Gender Scan montrant un recul significatif des jeunes filles dans les filières scientifiques. Un corollaire étant qu’en terminale seulement 1, 6 % des élèves choisissent la voie des sciences de l’Ingénieur ! et 2, 5 % celle du numérique et des sciences de l’information [3] !
Pour cette filière plus spécifiquement, pourtant source majeure d’innovation et de développement économique, les écoles, fédérations professionnelles et les entreprises ont multiplié les politiques d’incitation afin d’attirer plus de femmes vers les métiers du numérique. Pour autant la pénurie de talents en général et de talents féminins en particulier est toujours aussi chronique et inexpliquée dans cette filière.
La désertion des filles des filières scientifiques est catastrophique parce que la mixité est un atout pour la compétitivité de notre industrie et de notre recherche :
- Le rayonnement scientifique de la France au niveau international ne peut pas se faire en se passant de plus de 50% du vivier de talents.
- La réponse à des défis climatiques et sociétaux de plus en plus prégnants, les projets de réindustrialisation de la France, les enjeux de compétitivité et de souveraineté de la France sur la scène européenne et internationale, la pénurie de talents à laquelle sont confrontées les entreprises et tout particulièrement les entreprises du numérique montrent l’importance grandissante des STIM* dans les formations et parcours professionnels.
Tous les grands défis de notre temps nécessitent des équipes mixtes femmes / hommes :
- Énergies propres, sobriété, intelligence artificielle, informatique quantique, gestion des données, cybersécurité…, sont autant de défis qui façonnent déjà le futur de notre société et de notre économie, et qui concernent, dans toutes leurs dimensions, autant les femmes que les hommes.
- Or la pénurie de talents dans les milieux scientifiques et numériques nuit gravement au développement de solutions à ces défis. Nous ne pourrons donc pas construire une société prospère et inclusive, sans les ingénieures, développeuses, chercheuses… indispensables, ne serait-ce que pour éviter les biais de genre dans la conception et l’exploitation des solutions.
C’est pourquoi les membres du collectif signataires de cette tribune appellent à se saisir dès aujourd’hui de ce sujet pour renforcer les initiatives existantes – qui ont fait leur preuve – et impulser une dynamique de changement d’échelle.
Pour agir sur l’orientation des filles afin de les réintégrer dans les parcours scientifiques il est tout particulièrement indispensable de :
-
- 1. Au-delà de modifier au plus vite les programmes de tronc commun de 1ère et de terminale pour les maths et les matières scientifiques, s’attaquer également au sujet dès l’école primaire.
-
- 2. Renforcer les actions systémiques de formation de la part de l’éducation nationale envers les professeurs et notamment les professeurs principaux chargés de l’orientation pour les former aux sciences, aux enjeux de compétences et aux inégalités filles/garçons.
-
- 3. Accélérer la mise en œuvre d’actions pour promouvoir l’égalité filles / garçons, auprès des corps enseignants et des parents sachant que le décalage garçons/filles sur ces sujets liés aux maths commence dès l’âge de 6 /7 ans [4].
-
- 4. Se donner une ambition ferme, volontariste et à grande échelle à travers une loi de programmation pluriannuelle d’orientation des compétences pour répondre aux enjeux de France 2030, en capitalisant sur les actions les plus impactantes proposées et mises en place par les associations, les établissements d’enseignements supérieurs ou les entreprises.
Les cosignataires (mise à jour du 18/11) :
2GAP
AM alumni
Cercle InterElles
Cigref
Conférence des Grandes Ecoles (CGE)
Digital Ladies & Allies
Ensemble contre le sexisme
ESSEC alumni
Femmes@Numérique
Femmes Ingénieures
Institut G9+
Grandes Écoles aux Féminins (GEF)
Ingénieurs Et Scientifiques de France (Iesf)
HEC Au Féminin
Sciences ParisTech au Feminin
UPSTI
[1] https://www.gouvernement.fr/actualite/france-2030-un-plan-d-investissement-pour-la-france-de-demain
[2] https://smf.emath.fr/actualites-smf/22104reformelyceefillessciences
[3] https://smf.emath.fr/actualites-smf/22913reformelyceeprofilssciences1
[4] https://femmes-numerique.fr/et-toi-tu-reves-de-faire-quel-metier-plus-tard-pour-changer-le-monde/
* STIM (science, technologie, ingénierie et mathématiques) ou STEM (science, technology, engineering, and mathematics)
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