« La question, c’est de savoir ce qu’il y a dans le liquide des vapoteuses. » s’interroge un jour Antoine Piccirilli, directeur scientifique du jeune laboratoire poitevin Xérès. « Du glycol, de la nicotine et des arômes » lui répond son futur associé Vincent Bonnarme. La réponse laisse le chimiste en arrêt. Glycol ? La molécule n’est pas inconnue de ce spécialiste en catalyse hétérogène qui a longtemps travaillé pour le département cosmétique de L’Oréal.
« Le propylène glycol utilisé dans le liquide des cigarettes électroniques est un irritant pour la peau notoire, explique le chimiste. Sa fabrication est également un gouffre de consommation en CO2. » Ce produit était auparavant très utilisé en cosmétique mais, depuis trois ou quatre ans, les entreprises le substituent par d’autres glucoses.
Selon Antoine Piccirilli, des discussions seraient même en cours pour le réglementer Spot 3 (toxicité pour certains organes cibles) dans la classification européenne des produits chimiques Reach. Mais ce glycol présente des avantages qui le rendent inévitable. C’est lui que l’on retrouve dans les fumées utilisées en spectacles et, surtout, il bout à une température proche de celle de la nicotine (environ 170°C).
Du Glycol dans les cigarettes, une molécule irritante qu’évite l’industrie cosmétique
Pour remplacer ce produit issu du pétrole, les fondateurs du laboratoire Xérès utilisent les équipements de l’Institut de chimie des milieux et matériaux de Poitiers. Les analyses thermodifférentielle et thermogravimétrique leur permettent de repérer une substance qui convient à leurs attentes : le 1-3 propandiol, ou Végétol. Non-irritante, la molécule présente d’autres avantages sur le glycol. Son ébullition est encore plus proche de celle de la nicotine et sa basicité en fait un meilleur transporteur de cette toxine. Résultat : la nicotine est plus facilement absorbée par le corps humain.
Pour obtenir son Végétol de façon biologique, le laboratoire fait fermenter des levures avec de la glycérine végétale, un mélange d’huiles. « C’est comme faire de l’alcool avec du raisin, explique le directeur scientifique de Xérès. À la manière des bactéries du vin, qui consomment le sucre du fruit pour rejeter de l’alcool, notre levure consomme la glycérine et synthétise le Végétol. » Et la matière première n’est pas difficile à trouver : cette glycérine est un coproduit abondant de la fabrication des biodiesels.
Par Baptiste Cessieux
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