La méta-étude « Rapidly falling costs of battery packs for electric vehicles », dont les auteurs sont les Suèdois Björn Nykvist et Måns Nilsson, est basée sur des estimations de coûts provenant de 80 études peer-reviewed, des estimations d’agences, des rapports d’industries et de cabinets de consultants, des rapports intégrant les analyses de représentants de l’industrie et d’experts, et enfin de manufacturiers leaders du domaine.
Alors que le coût des batteries était de 1300$ par kWh en 2006 (régression logarithmique sur la base de l’ensemble des estimations) il est tombé à 410$ en 2014, ce qui correspond à une réduction des coûts de 14% par an. Pour les entreprises leaders (le Californien Tesla Motors et le Japonais Nissan), le coût est même descendu à 300$ en 2014.
Le taux d’apprentissage (Learning rate) obtenu, c’est à dire la réduction du coût suite à un doublement du volume de production, est de 6 à 9%, ce qui est « en accord avec les études antérieures sur les technologies de batteries pour voitures » indiquent les co-auteurs. La stratégie du multimilliardaire Elon Musk, construire une usine géante (« GigaFactoty ») dans le Nevada, consiste précisément à pousser les volumes de production pour faire baisser les coûts et ainsi s’imposer sur le marché. Le chinois Byd, acronyme de « Build Your Dreams », a annoncé vouloir produire un volume identique à celui de Tesla Motors. La compétition s’annonce musclée. L’Europe n’a toujours pas réagit à ces offensives américaines et chinoises dans ce secteur hyper-stratégique.
Ci-dessus : Evolution du coût des batteries de 2005 à 2014 et projections pour la décennie et demi à venir (d’après Nykvist et al 2015)
Une très bonne nouvelle pour mettre le soleil en bouteille
Les batteries de voitures électriques peuvent aussi être utilisées pour le stockage stationnaire, par exemple pour stocker l’énergie solaire. Arrivées en fin de leur première vie dans les véhicules au bout d’environ 8 ans, les batteries conservent environ 80% de leur capacité de stockage initiale. Elles peuvent alors être réutilisées pour les applications stationnaires. Le slogan de Nissan en la matière est « Reuse, Resell, Refabricate and Recycle ».
SolarCity, le numéro 1 du solaire résidentiel aux USA fondé par Elon Musk, vient précisément de lancer son nouveau produit « GridLogic » qui consiste à fournir un micro-réseau (MicroGrid) complet : panneaux solaires, batteries pour la gestion intra-journalière, micro-lignes électriques et micro-générateur thermique de secours pour les longues (et peu fréquentes) périodes sans soleil. Cela tombe bien, Tesla Motors produit précisément des batteries avec son allié Panasonic ! GridLogic est un produit que le PDG SolarCity, Peter Rive, a décrit dans le New-York Times comme “un modèle (template) qui peut être répliqué jusqu’à obtenir la nouvelle génération du réseau électrique. » Un nouveau modèle énergétique basé sur une production très décentralisée et ainsi à haute résilience en cas de catastrophe naturelle ou de conflit armé. Ce qui séduit fortement outre-Atlantique où les passages de tornades et d’ouragans provoquent chaque année des coupures de courant. Dans les régions du Japon qui ont été dévastées par le méga-tsunami en 2011, seules les maisons équipées de panneaux solaires étaient éclairées le soir.
La Deutsche Bank a publié début le 2 mars 2015 un rapport qui annonce un coût incrémental du stockage batterie de seulement 2 c€ par kWh solaire en 2020, contre 14 c€ aujourd’hui. Certains observateurs, comme par exemple Ken Munson, le fondateur de la start-up americano-australienne Sunverge spécialisée en systèmes énergétiques intelligents, estiment que la chute des coûts pourrait être encore plus rapide.
L’Australie, pays baigné de soleil et aux très longues (et donc coûteuses) lignes électriques, est l’un des marchés les plus prometteurs au monde pour le solaire + stockage. Sunpower, filiale solaire du groupe Français Total, est dès aujourd’hui présent sur ce marché. »
Même si le charbon était gratuit, les centrales à charbon ne peuvent plus concurrencer le solaire » en Australie soulignait dès juillet 2014 l’expert Gil Parkinson dans The Guardian, propos rapportés par l’entreprise française Comwatt. Ceci à cause du coût du transport de l’électricité. « Dans une démocratie d’énergie, même le charbon gratuit n’a pas de valeur. »
Par Olivier Daniélo
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