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La stratégie de l'Europe pour sécuriser son approvisionnement en graphite

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La stratégie de l’Europe pour sécuriser son approvisionnement en graphite

Posté le par Nicolas LOUIS dans Matériaux

Inscrit sur la liste des matières premières critiques de l’Union européenne, le graphite est un élément clé dans la fabrication de batteries pour la mobilité propre. L'Ifri a publié une note dans laquelle il dresse un panorama mondial de la production de cette substance minérale et des enjeux pour l'UE liés à la sécurisation de son approvisionnement.

Alors que le lithium est inscrit sur la liste des matières premières critiques de l’Union européenne (UE) depuis 2020, le graphite en fait partie bien avant, dès 2011. Moins connu, il est pourtant essentiel à la fabrication de batteries électriques de type lithium-ion. Pour preuve, une voiture Tesla modèle S en contient davantage, avec une quantité estimée à 54 kg. Dans une note1, l’Ifri (Institut français des relations internationales) dresse un panorama mondial de la production de cette substance minérale et fait le point sur la stratégie de l’UE, qui importe près de 97 % de ses besoins, afin de sécuriser son approvisionnement.

Dans un contexte où la demande mondiale pour le secteur de la mobilité pourrait plus que doubler d’ici à 2040 selon l’AIE (Agence internationale de l’énergie), le marché est actuellement dominé par la Chine qui extrait 77 % du graphite naturel dans le monde. Mais ce pays a mis en place des mesures de contrôle de ses exportations et sa domination n’est pas exempte de certaines vulnérabilités, comme le souligne Raphaël Danino-Perraud, chercheur associé au Centre énergie et climat de l’Ifri et auteur de la note : « la production issue des mines de graphite située dans le nord de la Chine souffre des hivers rigoureux. Ces mines sont souvent mises à l’arrêt sur des périodes plus ou moins longues. À cela s’ajoutent les impacts négatifs de l’exploitation minière de graphite, tant sur le plan environnemental que sanitaire. »

L’UE peut aussi se tourner vers des pays de l’Afrique de l’Est, dont la production monte en puissance, mais reste fragile. « Aux côtés du producteur historique qu’est Madagascar, le Mozambique est devenu producteur de graphite à partir de 2015 et la Tanzanie en 2018, observe Raphaël Danino-Perraud. Ces trois pays tentent de développer non seulement leur ressource minière, mais également l’ensemble de la filière avec plus ou moins de succès, les contextes géopolitiques locaux et régionaux restant délicats. » Le Brésil et l’Inde sont aussi des acteurs incontournables en devenir, le premier ambitionne par exemple de monter en puissance sur la filière des matériaux de batterie.

Une production de graphite synthétique non négligeable en Europe

À travers notamment le CRM Act (Critical Raw Materials Act), l’UE s’est fixé l’objectif d’extraire sur le sol européen 10 % du graphite consommé en Europe d’ici à 2030. Actuellement, elle ne possède pas ou peu de capacités d’extraction minière, mais deux projets sont en cours en Suède avec la réouverture d’une mine et l’ouverture d’une autre. « Il est évident que la mine européenne, notamment suédoise, ne pourra pas couvrir tous les besoins de l’industrie en graphite, écrit le chercheur de l’Ifri. Il est cependant nécessaire que les campagnes d’exploration en cours en France et en Europe recherchent du graphite afin de disposer de réserves à mettre en exploitation en cas de nécessité.

Les Vingt-sept peuvent aussi compter sur une production intérieure de graphite synthétique non négligeable pour réduire leur forte dépendance, notamment en Autriche et en Allemagne. Cette substance a d’ailleurs été ajoutée à la liste des matériaux critiques en novembre 2023. Pour augmenter les volumes produits, la société norvégienne Vianode a reçu l’an dernier 90 millions d’euros de la part d’un fonds européen pour construire une usine de production de graphite de synthèse. Plus largement en Europe, certains pays comme la Suisse et l’Ukraine sont également producteurs de graphite synthétique.

L’UE s’est aussi fixée comme objectif de raffiner 40 % du graphite et d’en recycler 25 %. Selon Raphaël Danino-Perraud, « le recyclage du graphite, sa faisabilité technique et la rentabilité financière des procédés doivent être étudiés avec soin, afin que la production secondaire puisse contribuer plus amplement aux approvisionnements. »

C’est en adoptant une stratégie de diversification de ses chaînes d’approvisionnement que l’UE pourra sécuriser ses besoins. Par ailleurs, un enjeu spécifique se joue autour du graphite sphérique revêtu, utilisé dans la fabrication des anodes de batteries destinées à la mobilité propre. Pour le chercheur de l’Ifri, il est nécessaire de développer le maillon clé de sa production, car ce produit a la particularité d’être « le plus sensible industriellement et technologiquement. »

1 Raphaël Danino-Perraud, « Le graphite, un enjeu européen d’autonomie stratégique pour la mobilité propre », Briefings de l’Ifri, Ifri, 20 juin 2024

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Posté le par Nicolas LOUIS


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