Une analyse à grande échelle
Les plantes utilisent le CO2 lors de la photosynthèse. Elles le piègent, le fixent et l’utilisent pour fabriquer leurs propres nutriments. Il existe plusieurs mécanismes de fixation du CO2, parmi lesquels celui dit en « C3 » (pour le blé, le riz, le soja, etc.) et le mécanisme de fixation « en C4 » (mais, sorgho, etc.). Le premier est typique des régions à ensoleillement faible, eau abondante, faible taux de CO2 et températures moyennes. Le second, plus efficace, est typique des zones chaudes, sèches, très ensoleillées et où le taux de CO2 est plus élevé.
Depuis le début des années 1990, les chercheurs ont constaté une diminution des quantités de zinc et de fer dans certaines plantes utilisées pour la nutrition humaine, comme le blé, l’orge et le riz. Cette baisse se produisait lorsque ces plantes étaient cultivées dans une atmosphère artificielle avec un taux élevé de CO2 imposé. Cependant la petite taille des échantillons ne permettait pas de tirer des conclusions significatives. De plus, les conditions de cultures étaient discutables.
Depuis, une nouvelle technologie de culture a été mise au point, le Free Air Concentration Enrichment (ou FACE). Cette technique permet de cultiver des plantes à l’air libre tout en modifiant la quantité de CO2 absorbée par les végétaux. Des tuyaux horizontaux ou verticaux sont placés autour des terrains expérimentaux et diffusent du CO2 jusqu’à atteindre le taux désiré. Celui-ci est dosé grâce à des capteurs eux-mêmes reliés à un ordinateur chargé de réguler les émissions.
Le problème de la petite taille des échantillons a ainsi été résolu en regroupant des données venant de cultures utilisant le FACE au Japon, en Australie et aux Etats-Unis. L’équipe du docteur Kloog du Department of Geography and Environmental Development de l’Université Ben Gourion du Néguev a ensuite analysé ces données, effectuant des comparaisons entre 143 échantillons récoltés après 6 périodes de culture et regroupant 41 génotypes végétaux différents. Les analyses concernaient la partie comestible du riz, du blé, du soja, des petits pois, du mais et du sorgho. Les taux de CO2 administrés étaient de 546 à 586 parties par million, ce qui correspond aux taux atmosphériques moyens estimés pour 2050.
Des résultats inquiétants
Grâce à cette méthode, les chercheurs israéliens ont montré que le zinc, le fer et les protéines diminuent de façon significative dans les plantes « C3 », cultivées avec un haut taux de CO2. Par exemple, on note une baisse de 9,3%, 5,1% et 6,3% respectivement en zinc, fer et protéines dans le blé cultivé dans ces conditions. Pour les légumes (soja et petits pois), la baisse concernait uniquement les taux de zinc et de fer. Autre phénomène inquiétant : l’étude montre que le taux de phytate diminue de façon significative dans le blé cultivé dans les conditions « FACE ». Or, le phytate est une molécule importante, qui conditionne l’absorption du zinc par l’intestin lors de la digestion.
Etant donné que les taux de CO2 sont appelés à augmenter de manière significative (et ce, même si des changements réels sont opérés dans les prochaines années au niveau des politiques environnementales), les carences en fer, zinc et protéines risquent de causer un désastre humanitaire. Néanmoins, un espoir subsiste car les analyses concernant les champs de riz ont montré une grande variabilité entre les échantillons, suggérant qu’il existe certains génotypes moins sensibles à l’augmentation de CO2 que d’autres. Ces plants peuvent servir de base pour créer des cultures plus résistantes et tenter d’éviter ainsi les risques de malnutrition.
Hélas, le choix des cultures dépend de nombreux facteurs comme la disponibilité des semences ou leur coût, ainsi que sur le goût des populations et leur tradition agricole.
Source : Bulletins électroniques
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