Les scientifiques l’ont martélé : pour limiter le réchauffement climatique à 2°C en 2100, il faut renoncer à exploiter 80% des réserves d’énergies fossiles. La France lance donc une dynamique pour « se libérer » du pétrole, du gaz, du charbon et de toute autre énergie conventionnelle, a annoncé ce matin Nicolas Hulot, ministre de la transition écologique et solidaire.
Une fois promulguée, la nouvelle loi mettra fin immédiatement à tout nouveau permis d’exploration d’hydrocarbure, qu’il soit conventionnel ou non conventionnel. Et qu’il soit situé sous la terre, en mer, en métropole ou en Outre-mer. « Il permettra également d’interdire le renouvellement de concessions qui iraient au-delà dans l’exploitation de 2040 », précise Nicolas Hulot. « Ce signal va doper la transition énergétique et le basculement d’un monde carboné vers un monde décarboné », se félicite-t-il . Et il signe la fin du débat sur l’extraction des gaz de schistes, puisque toute exploration sera interdite, quelle que soit la technique utilisée.
Toutefois pour éviter les sanctions sur les permis déjà accordés, mais non encore mis en oeuvre, la France honorera le projet Guyane-Maritime. Ainsi, il est possible qu’il reste quelques permis d’exploitation entre 2040 et 2050. Mais, « si tel est le cas, cela sera tellement marginal ou résiduel que cela n’a pas beaucoup d’importance », prévient Nicolas Hulot. Notons également que le gaz de mine, s’accumulant dans les anciennes galeries de mines pourra être capté pour des raisons de sécurité et de protection de l’environnement.
Une mesure symbolique ?
La France produit environ 815.000 tonnes de pétrole par an et près de 400 millions de m³ de gaz. Cette production française ne couvre que 1% de la consommation énergétique nationale. La France importe donc massivement son pétrole et son gaz. Mais alors que François Duseux, Président de l’Union Française des industries pétrolières monte au créneau contre ce projet de loi, Nicolas Hulot voit plusieurs avantages à cette décision.
Le ministre de la transition écologique et solidaire y voit un triple effet bénéfique : « la France fait sa part », « met en oeuvre un agenda de santé publique» et « en se libérant des énergies fossiles, on se libère de conflits ». « C’est un acte fort, plus qu’un symbole », soutient-il. La France devient ainsi le premier grand Etat à prendre cette décision, unilatéralement. Mais, par cette mesure, elle souhaite entraîner les autres pays à faire de même. À l’occasion de la COP23 et du sommet sur le climat du 12 décembre, « la France va être légitime pour essayer de convaincre nos partenaires de faire de même », annonce Nicolas Hulot.
La France veut montrer l’exemple
Suite au rôle de la France dans l’élaboration de la feuille de route écrite à Paris, il est important que le pays maintienne « son leadership » et « donne l’exemple dans la mise en oeuvre de ses propres engagements », insiste Nicolas Hulot. Au-delà des engagements pris à Paris, la France s’est même engagée début Juillet, à travers son Plan Climat, à la neutralité carbone en 2050. Et le ministre avait alors annoncé la fin de la vente de voitures à essence et diesel dès 2040, ainsi que la fin de production d’électricité à partir de charbon dès 2022.
« Ce que j’annonce fait partie d’un tout, rappelle le successeur de Ségolène Royal. C’est à arrimer aux autres engagements de la loi de transition énergétique ». Cette loi adoptée en août 2015 prévoit en effet une baisse de 50 % de la consommation énergétique en 2050 par rapport à 2012, avec un objectif intermédiaire de 20 % en 2030. Pour cela, la loi prévoit le développement des énergies renouvelables, une réduction de la consommation énergétique primaire en énergies fossiles de 30% en 2030, la rénovation de l’ensemble des bâtiments à l’horizon 2050 en fonction des normes « bâtiment basse consommation » et la multiplication par 5 de la quantité de chaleur et de froid renouvelables et de récupération livrée par les réseaux de chaleur et de froid d’ici 2030.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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