Situé dans le Parc Naturel Régional de la Haute Vallée de Chevreuse, le campus agricole Hectar réunit, dans un écosystème unique de 600 hectares, 300 hectares d’expérimentation en agriculture régénératrice pour préserver les sols agricoles, et un accélérateur de start-up. « L’agriculture régénératrice part du principe qu’il faut prendre soin de nos sols pour qu’on puisse continuer à se nourrir sainement », a expliqué Audrey Bourolleau, fondatrice de l’association Hectar, lors de l’Université de la Terre le 25 novembre à l’Unesco.
« 95 % de ce que nous mangeons provient des sols agricoles, rappelle Audrey Bourolleau. La moitié de notre territoire sont des terres agricoles, mais on a 25 % de nos sols en France qui souffrent. » Alors, l’entrepreneure souhaite profiter du renouvellement des générations pour régénérer les sols et attirer de nouveaux profils vers l’agriculteur. « On doit attirer des talents parce qu’on va avoir 160 000 fermes à reprendre dans les 5 ans en France », prévient-elle. Hectar se présente ainsi comme « créateur de solutions pour la transition agricole ».
Attirer des entrepreneurs vers l’agriculture
Face à ce défi considérable, Audrey Bourolleau souhaite attirer des « super-entrepreneurs ». « On part du principe que l’agriculteur est un super-entrepreneur, un entrepreneur du vivant », explique-t-elle. « Aujourd’hui, on va passer d’un modèle historique de transmission familiale de nos fermes à un modèle où il faut reprendre du foncier, ou investir dans la terre », poursuit-elle.
Les nouveaux agriculteurs vont aussi devoir diversifier leurs activités. « Créer de la valeur, c’est peut-être transformer des produits sur sa ferme, faire de la vente directe faire de l’agrotourisme, faire des énergies vertes », énumère-t-elle. « 70 % de nos fermes en France vont produire des énergies d’ici 2050 », prédit-elle. Et pour faciliter le quotidien des agriculteurs, Hectar propose un programme de 3 mois dédié à l’accélération des startups de l’agritech et de la foodtech en partenariat avec l’incubateur HEC Paris.
Audrey Bourolleau s’est confrontée à de lourdes résistances dans son projet au service de la transition agricole. « J’ai eu une très forte résistance des syndicats en place qui disent qu’Hectar détourne les agriculteurs de leur vocation nourricière », raconte-t-elle. Mais elle l’assure : « Factuellement, un nouvel agriculteur installé dans notre pays ne peut pas vivre sur le modèle économique actuel, il n’y a pas assez de valeur. »
Financer la transition agricole
Hectar cherche ainsi à trouver des financements adaptés au monde agricole. « Faire la transition, c’est réconcilier les différentes échelles de temps du vivant face à des modèles d’investissement et des modèles économiques qui ont été plutôt structurés sur une économie un peu standardisée », explique Audrey Bourolleau. « La diversification des cultures met en jeu toutes les chaînes de stockage, de logistiques qui se sont bâties sur une massification des flux, une standardisation des variétés », poursuit-elle.
Pour tester de nouveaux modèles, Hectar mise sur la collaboration au sein de son campus agricole. « C’est la coalition d’acteurs engagés qui fera bouger les entreprises de manière un peu plus systémique, et qui peut inspirer les grands groupes », partage Audrey Bourolleau. Hectar a ainsi lancé, en collaboration avec le Fonds Danone pour l’Écosystème, La Laiterie des Godets. Cette ferme laitière pilote vise à améliorer les conditions de travail des éleveurs pour lever les freins au maintien de l’activité d’élevage laitier dans notre pays, et susciter des vocations notamment auprès des jeunes générations. Hectar souhaite ainsi bâtir un référentiel documenté de reprise des fermes laitières, un enjeu majeur. « Il reste 51 000 fermes laitières en France et il en resterait 38 000 en 2025 », calcule Hectar.
Dans l'actualité
- Les terres agricoles européennes seraient une immense réserve de microplastiques
- La clarification des politiques publiques, clé de la transition agricole
- Les drones au service de l’agriculture durable
- L’Ademe publie une étude nationale inédite sur l’agrivoltaïsme
- En image : un agriculteur sème des poils de chien dans ses champs pour éloigner les sangliers
- L’agriculture de conservation pourrait mieux résister à l’évolution du climat
- L’agrivoltaïsme gagne ses galons et se structure
- Réchauffement et gel tardif : un cocktail désastreux pour l’agriculture
- Avec la réforme de la PAC, les agriculteurs bio craignent pour leur avenir
- Les thèses du mois : l’agriculture urbaine
- Favoriser la biodiversité en France
- La science décentralisée pourrait accélérer la recherche pharmaceutique
- Les start-up à vocation industrielle séduisent les investisseurs
- A vos agendas : l’inclusivité s’invite au printemps de l’innovation
- Trois scénarios pour une agriculture européenne sans pesticides en 2050
- Lionel Ranjard : préserver la qualité microbiologique des sols permettrait de limiter les intrants chimiques et techniques d’entretien du sol
- Accord UE-Nouvelle-Zélande : importation et baisse des émissions de CO2, est-ce compatible ?
Dans les ressources documentaires
- La faune du sol pour évaluer l'impact des pratiques agricoles et la santé des sols
- Impact des pratiques viticoles sur la qualité biologique des sols : bilan des connaissances internationales
- Sciences participatives au service de la qualité écologique des sols
- Biocontrôle : pour une agriculture compétitive et durable
- Agriculture de précision - Étude des variabilités spatio-temporelles des agrosystèmes