Il convient de souligner que si l’hydrogène n’est pas un gaz à effet de serre en tant que tel, il est considéré comme un gaz climatique indirect : c’est-à-dire qu’il induit des perturbations sur d’autres gaz, comme le méthane, l’ozone et la vapeur d’eau dans l’atmosphère, trois puissants gaz à effet de serre.
Tout un ensemble de recherches et de simulations permettent d’anticiper les conséquences pour le climat et les températures d’une hausse de la concentration atmosphérique en hydrogène, qui résulterait de l’usage massif de cette molécule dans le mix énergétique européen, mais aussi mondial.
Ainsi, les deux problématiques majeures concernant la massification de l’hydrogène en tant que vecteur énergétique résident dans les méthodes de production, et donc dans les conséquences de l’augmentation de sa concentration atmosphérique sur les autres GES.
Les émissions liées à la production
Vecteur principal de la transition énergétique en cours, l’hydrogène peut être produit par différentes méthodes. La plus connue est l’électrolyse de l’eau, qui permet, si l’énergie nécessaire à l’électrolyse est d’origine renouvelable, d’obtenir de l’hydrogène “vert”.
La seconde technologie de production est le vaporeformage de l’hydrogène, qui permet de produire de l’hydrogène “bleu”, si du carbone est séquestré lors de cette phase de production, ou “gris” (pas de séquestration de carbone).
En 2020, 94 % de l’hydrogène en France était gris, c’est-à-dire produit à partir d’énergies fossiles. On voit bien que la méthode de production, au-delà des effets de l’hydrogène sur les autres gaz à effet de serre, induit déjà des conséquences sur l’atténuation des émissions de GES via les méthodes de production d’hydrogène. Les investissements actuels, notamment via le PIIEC sur l’hydrogène, visent à produire un maximum d’hydrogène décarboné, notamment en France en utilisant de l’électricité “nucléaire” pour l’électrolyse de l’eau. On parle d’hydrogène « jaune ».
L’hydrogène, gaz climatique indirect
La seconde source d’augmentation des GES de par l’utilisation massive de l’hydrogène concerne les effets induits par une augmentation du taux d’hydrogène dans l’air atmosphérique. Cette augmentation serait principalement liée à des fuites de la molécule. Naturellement présent dans l’atmosphère mais sous forme de traces – environ 0,510 ppm – l’hydrogène a une durée de vie longue, ce qui lui permet de rejoindre les plus hautes couches de la stratosphère. Lorsque c’est le cas, le gaz réagit avec les radicaux hydroxyles (OH) pour former de la vapeur d’eau, ce qui a tendance à refroidir la stratosphère et ralentit la reconstitution de la couche d’ozone.
En réagissant avec les radicaux hydroxyles, l’hydrogène se substitue à d’autres gaz, qui réagissent habituellement avec ces radicaux, comme le méthane (mais aussi les molécules type CO et NOx). Il convient donc, pour analyser l’impact de l’hydrogène en tant que gaz climatique indirect, d’évaluer quelle pourrait être le volume des fuites de H2 dans l’atmosphère, pour évaluer la quantité de gaz à effet de serre “produite” par la massification de H2 en tant que vecteur énergétique.
Le CNRS a, en simulant les effets que nous venons de mentionner, évalué que le rejet d’une tonne d’hydrogène “vert” dans l’atmosphère correspondrait à l’équivalent de 13 tonnes de CO2 émises.
En ce qui concerne l’hydrogène “bleu” ou “gris”, les émissions de méthane et de CO2 associées à leur production et à leur transport rendent leur bénéfice climatique quasi nul.
En conclusion, il faudra veiller, en cas de massification de l’hydrogène en tant que vecteur énergétique, à quantifier précisément les fuites de H2 potentielles dans l’atmosphère, ainsi que les différents modes de production d’hydrogène utilisés. Ces calculs permettront d’évaluer l’impact réel sur les émissions de gaz à effet de serre du pari technologique que constitue le choix de l’hydrogène pour incarner la transition énergétique.
Par Pierre Thouverez
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