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Des micromachines propulsées par les algues

Posté le 30 juillet 2024
par Romain FOUCHARD
dans Innovations sectorielles

Quelle innovation biotechnologique ne doit-on pas rater en juillet ? Des algues vertes transformées en moteurs pour des micromachines...

Les micro-organismes comme certaines algues possèdent des capacités motrices remarquables. Il n’en fallait pas davantage pour que des chercheurs croient en leur potentiel pour propulser des micromachines, bien utiles pour la recherche biologique ou environnementale. C’est tout particulièrement le cas de l’équipe de recherche menée par Haruka Oda, de l’université de Tokyo (Japon). Le scientifique et ses collègues se sont focalisés sur l’algue verte mobile Chlamydomonas reinhardtii. Leur idée était de l’utiliser comme un moteur pour micromachine dont la force propulsive serait captée à l’aide de minuscules pièges, à la manière d’un traîneau tiré par des chiens ou d’une charrue tractée par des bœufs. Les chercheurs se sont donc attelés à développer de tels micro-pièges, à évaluer leur efficacité, et à étudier la dynamique du mouvement des machines bio-hybrides. Le résultat de leurs efforts est paru le 7 juillet 2024 dans le journal Small.

Des pièges à algues en forme de paniers

La première étape du travail mené par l’équipe de Haruka Oda tenait à créer des microstructures 3D capables de piéger les algues tout en contrôlant leur direction. Et ce, sans abîmer leurs moyens de propulsion, soit deux flagelles situés à l’avant du micro-organisme. Les expériences initiales ont montré que les algues vertes Chlamydomonas reinhardtii ne pouvaient pas traverser un anneau avec un diamètre inférieur à 7 μm. La suite du projet a consisté à former des genres de paniers constitués de plusieurs anneaux de différents diamètres, permettant de piéger le micro-organisme sans gêner son mouvement vers l’avant. Quatre structures ont ainsi été testées, et la meilleure s’est révélée être la configuration 7-10-13 avec un taux de capture de 80 % contre à peine 30 % pour les trois autres. Le premier anneau de 13 μm sert à guider l’algue à l’intérieur de la structure. Le second, de 10 μm de diamètre, restreint ses possibilités de mouvement afin de l’empêcher de s’enfuir. Enfin, celui de 7 μm de diamètre sert de point d’appui pour la propulsion à proprement parler.

Images du Scooter (gauche) et du Rotator (droite) obtenus par microscopie à balayage électronique. Barre d’échelle : 10 μm. Crédits : 2024 The Shoji Takeuchi Research Group at the University of Tokyo.

Une fois le piège conçu, les scientifiques ont mis au point deux types de micromachines : le Scooter et le Rotator. Toutes deux ont été fabriquées par la technique d’impression 3D connue sous le nom de stéréolithographie à deux photons. Celle-ci use de la lumière afin de façonner des microstructures à partir de blocs de plastique. Le Scooter est pourvu de deux pièges éloignés de 40 μm l’un de l’autre. Le Rotator, quant à lui, en compte quatre séparés à chaque fois de 90°. Une fois alimenté par deux spécimens de Chlamydomonas reinhardtii, le Scooter a présenté des mouvements complexes et aléatoires tels des embardées et des roulis à une vitesse moyenne de 21,2 μm/s. Le Rotator et ses quatre algues, en revanche, ont suivi une rotation contrôlée avec une vitesse moyenne angulaire de 1,43 rad/s, soit quelque 34 μm/s. Pour continuer leurs recherches, Haruka Oda et ses collègues ont déjà prévu d’améliorer encore la rotation du Rotator et de créer de nouveaux designs de machines plus complexes.


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