Démocratisation de la détection de cancers ou gadget pour hypocondriaques ? Dans un article paru ce mardi 17 janvier dans Nature Communications, ces scientifiques ont développé un microscope qui s’appuierait sur le capteur photo d’un smartphone pour réaliser des séquençages d’ADN.
Ce dispositif serait en effet capable de détecter les produits fluorescents des réactions de séquençage de l’ADN dans les cellules et les tissus. Il ne serait plus nécessaire de se rendre dans un laboratoire. Un médecin pourrait brancher ce microscope à son téléphone pour effectuer par exemple une analyse moléculaire sur une tumeur.
Un progrès majeur pour repérer à temps, et à moindre coût, un cancer ou une maladie infectieuse. Présente dans chaque cellule vivante, l’acide désoxyribonucléique (ADN) rassemble toute l’information permettant à l’organisme qui la contient de se développer et de se gérer. Le séquençage permet en effet de comprendre et de poser un diagnostic, mais également d’identifier des mutations génétiques. Il permet d’identifier une mutation ou un gène impliqué dans une maladie, mais également d’évaluer les prédispositions génétiques d’une personne pour certaines maladies ou d’en savoir plus sur sa « généalogie génétique ».
Pour relever ce défi, les chercheurs américains et suédois se sont appuyés sur l’impression 3D pour concevoir leur dispositif. Il est équipé de deux diodes laser pour l’imagerie par fluorescence et d’une diode électroluminescente blanche pour l’imagerie de transmission. Des essais concluants ont été réalisés sur des lignées cellulaires de cancer du côlon et sur des échantillons de tumeurs humaines. Le traitement des images a été géré par un algorithme d’apprentissage automatique.
Les Français ne sont pas en reste. Patrick Merel, un biologiste moléculaire qui a fait toutes ses études à Bordeaux, propose une application qui permettrait à chacun de transporter son génome sur son smartphone, de suivre l’évolution des connaissances relatives à son état patrimoine génétique. Une mention « cancer du sein » accompagnée d’une icône rouge soulignera par exemple une prédisposition à cette maladie, tandis qu’une icône verte indiquera l’absence de risque.
Avec deux autres biologistes et une chercheuse en bio-informatique du CNRS au Labri, il a conçu un projet qui en surprend plus d’un : faire entrer ce fichier de 3 Go – notre génome humain – dans un téléphone portable. En ayant toujours avec soi son code génétique, nous pourrions le faire analyser à tout moment par un spécialiste. Une activité en pleine croissance. Moyennant quelques centaines de dollars, des firmes, essentiellement américaines, proposent déjà aux particuliers de séquencer les données contenues dans leur ADN. Un labo décrypte l’ADN, et en quelques clics, le curieux a accès à certaines informations de son ADN via un site sécurisé et peut savoir, par exemple, s’il est porteur de gènes favorisant tel ou tel cancer.
N’ayant pas obtenu de financement en France (le séquençage du génome demeure strictement encadré), Patrick Merel s’est rendu aux États-Unis pour créer la société Portable Genomics. Début janvier, Apple le contactait… Un premier pas vers la génomique portable ? « Ne va-t-on pas inquiéter inutilement des personnes qui ne vont pas forcément déclarer ces maladies ? », s’inquiète au contraire Patrick Gaudray, membre du Conseil consultatif national d’éthique (CCNE) et directeur de recherche au CNRS.
Philippe Richard
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