Près de 750 000 objets de plus d'un centimètre sont en orbite autour de la Terre. Les solutions pour s'en protéger n'ont pas encore été trouvées et leur nombre va croissant. Faisant peser des risques économiques et sécuritaires qui sont devenus loin d'être négligeables.
Du 18 au 21 avril se tenait à Darmstadt (Allemagne), au centre opérationnel de l’ESA, la 7eme conférence européenne sur les débris spatiaux. L’occasion de faire le point sur cette gestion des déchets un peu particulière. Si l’estimation des experts évalue à 29000 le nombre d’objets de plus de 10cm en orbite autour de la Terre et à 750000 le nombre d’objets de plus d’un centimètre, le chiffre des objets entre 1mm et 1cm est encore plus vertigineux : 166 millions ! Sachant qu’à une vitesse de 10km/s, l’impact est équivalent l’explosion d’une grenade, il est facile de comprendre que pour les satellites en fonctionnement les conséquences peuvent être dramatiques.
D’où vient ce nuage de déchets ?
Au-delà de la stratosphère, voici donc la débrisphère. Ces débris sont les déchets laissés par les plus de 5000 lancements qui ont eu lieu entre 1957 et 2017: il s’agit de restes des étages de lancement ou d’éléments associés, d’anciens satellites hors d’usage, de particules issues des dégradations des éléments déjà en orbite et pour une bonne part d’explosions. Parmi tous ces débris, à peu près 18000 sont aujourd’hui suivi par un système de surveillance international. Jusqu’à maintenant les collisions sont rares, même si celle entre le satellite iridium-33 et Cosmos-2251 le 10 février 2009 a marqué les esprits, mais cette probabilité ne fait que grandir et les acteurs de secteur spatial craignent le syndrome de Kessler (du nom de son théoricien, l’astrophysicien de la Nasa Don Kessler) ou collisions en cascade. Selon ce principe, chaque collision engendre plus de débris augmentant la probabilité d’une autre collision etc. Et au final, les débris seront majoritairement issus de collisions plus de des déchets issus de nouveaux lancements. La plus grande concentration de débris se trouvant entre 800-1000 km et 1400 km de la Terre.
Eviter les collisions et les dégâts terrestres
L’agence spatiale européenne a développé des outils qu’elle continue d’améliorer pour détecter, surveiller, caractériser les différents débris (qu’ils soient artificiels ou naturels) et pour modéliser ce “nuage” dont la connaissance devient essentielle pour planifier les lancements et assurer un accès à l’espace sûr. En moyenne, l’ESA exécute une douzaine de manœuvres d’évitement de collisions par an. Quant aux ré-entrées non contrôlées d’objets dans l’atmosphère, ils sont tout de même scrutés même si le risque pour la population ou les infrastructures est aujourd’hui très faible (un homme a 60 000 fois plus de chances d’être touché par la foudre que par un débris spatial). L’atmosphère réduit en poussière les débris spatiaux et pour ceux qui résistent ils ont trois chances sur quatre de tomber sur une surface océanique ou non habitée.
Une politique d’atténuation
En attendant de savoir ce que l’on peut faire avec les débris déjà existants, la politique internationale consiste à atténuer les effets des lancements actuels (entre 50 et 70 par an). Un guide de bonnes pratiques a été rédigé en 2002 et sert de modèle pour les législations nationales concernant les débris spatiaux. Et depuis 2011, il existe une norme ISO (24113) qui définit certaines exigences techniques. L’un des axes de prévention consiste notamment à prévoir la fin de vie des satellites soit en organisant leur retour sur Terre soit en les éloignant de l’orbite terrestre. A ce sujet, l’ESA a d’ailleurs développé un outil à disposition de tous, DRAMA (Debris risk assessment and mitigation analysis), qui permet d’évaluer les risques des différentes options possibles pour la fin de vie d’un satellite.
L’obligation de prévoir des protections
L’étude des impacts d’objets submillimétriques en hypervitesse a révélé les dégâts que peuvent engendrer des débris spatiaux, y compris très petits.
Tests effectués à la Nasa :
L’impact d’un corps d’une dizaine de centimètre peut causer la désintégration totale d’un satellite en orbite car suite à l’impact, l’énergie dégagée peut suffire à rompre la structure en elle-même. Pour s’en protéger, la station spatiale internationale possède des boucliers, constitués d’une double couche de panneaux métalliques espacés de 10cm et on prévoit de tels systèmes sur la plupart des satellites autour des équipements cruciaux à leur fonctionnement.
Supprimer les débris ?
Mais comme le laisse présager le modèle de collision en cascade, la prévention des débris ne peut suffire. Il faut aussi trouver des moyens de supprimer les débris déjà existants. Et si toute la communauté internationale planche sur le sujet, les solutions techniques ne sont pas encore évidentes. Pour preuve l’échec en janvier dernier d’un prototype japonais de nettoyeur spatial qui devait déployer une tige électromagnétique sensée attirer les déchets avant de les réintroduire dans l’atmosphère terrestre. Au niveau européen, la première mission opérationnelle sur le sujet est prévue en 2023 avec le lancement de e-Deorbit qui doit capturer un vieil objet de l’Esa et contrôler sa réentrée. Les systèmes mécaniques qui doivent effectuer la capture sont encore à l’étude. Beaucoup de solutions sont envisagées : du filet à papillon spatial, à l’aspirateur magnétique, au harpon ou au bras robotique. Par ailleurs, d’autres pistes sont explorées par les chercheurs telle que la technologie de destruction ou de déviation par laser (voir encadré)
Un super-laser pour les débris spatiaux ?
Des physiciens australiens (Macquarie University) ont créé un super-laser dont le principe de fonctionnement doit permettre de créer des lasers suffisamment puissants pour servir non seulement à des fins militaires (destructions de drones ou de missiles) mais aussi pour éliminer des déchets spatiaux ou propulser des engins spatiaux. L’étude est parue dans Laser & Photonics Reviews. Pour obtenir leur super-laser ils ont concentré plusieurs lasers sur un même point où ils ont placé un cristal de diamant ultra-pur. Outre l’effet d’accumulation, le diamant présente aussi la capacité à dissiper rapidement la chaleur résiduelle, un des principaux obstacles rencontrés pour créer des super-lasers.
Par Sophie Hoguin
Pas évident ça… En effet il vaut mieux les capturer que les fragmenter encore… Quoi qu’avec un laser on les brûlerait. Mais comment les viser ?
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