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Black-out au Royaume-Uni : le rapport du gestionnaire de réseau

Posté le 27 août 2019
par Joël Spaes
dans Énergie

Le gestionnaire de système de transport électrique britannique, National Grid, a rendu public mardi 20 août le rapport intermédiaire sur le black-out du 9 août dernier qui a plongé dans le noir un million de points de consommation.

La filiale dédiée à la gestion du système, National Grid ESO (la propriété des lignes étant séparée de sa gestion outre-Manche), a décidé, moins d’un jour avant sa transmission au régulateur du secteur énergétique britannique, Ofgem, de rendre publiques ses premières conclusions sur le black-out le plus important enregistré par le pays depuis 2008, a rappelé John Pettigrew dans une tribune publiée le 12 août dernier. Un rapport qui reprend la séquence des événements qui ont conduit à cet incident, qui a notamment bloqué nombre de passagers des trains en Angleterre et au Pays de Galles pendant plusieurs heures.

Le système avant l’incident

Ainsi, le 9 août dernier, comme le souligne le gestionnaire du réseau (GRT), avant 16h52, le réseau électrique est exploité dans des conditions « normales », sont anticipées de fortes pluies et des épisodes de foudre sont attendus. Au moment de l’incident, quelques 32,13 GW étaient appelés sur le réseau. Environ 30% de la consommation électrique est couverte par l’éolien, 30% par les centrales au gaz, 20% par le nucléaire et 10% à partir des interconnections. L’île anglaise est interconnectée à la plaque continentale européenne via deux interconnexions (2 GW avec la France, via IFA, et 1 GW avec les Pays-Bas, via BritNed) en outre, il existe deux interconnexions avec l’Irlande (500 MW avec l’Irlande du Nord, via Moyle, et 500 MW avec la République d’Irlande, via East West). Le Royaume-Uni n’est pas relié à la plaque européenne électrique de manière synchrone (gestion identique de la fréquence). La fréquence outre-Manche est néanmoins identique à celle de la plaque électrique européenne, soit 50 Hz (Hertz).

16h52, tout bascule

A 16h52, le National Grid ESO enregistre la foudre sur la ligne de transport du circuit nord de Londres Eaton Socon-Wymondley Main. Les mécanismes de protection du réseau entrent en action, et la perturbation dure moins de 0,1 seconde, et la ligne est à nouveau opérante dans les 20 secondes, indique l’opérateur du système. Ce dernier enregistre en outre une chute de production de l’ordre de 500 MW (en général des installations solaires et de petites unités thermiques qui disjonctent). En revanche, quasiment simultanément avec la foudre, « quelques secondes après), deux producteurs réduisent drastiquement leurs livraisons au réseau. Il s’agit de la centrale au gaz de Little Barford (740 MW connecté au réseau à la ligne 400 kV d’Eaton Socon, dont 240 MW disjonctent immédiatement, et une autre unité se met en sécurité entraînant une perte de 641 MW au total) et du parc éolien offshore de Horsnsea (ce parc de 1 200 MW, le plus grand anglais, connecté au réseau 400 kV à Killingholme délivre alors 799 MW, qui « tombent » brutalement à 62 MW après avoir enregistré l’impact de foudre et se mettent en sécurité). Au total, la perte de production atteint 1 378 MW, soit plus que la valeur prévue en termes de réserve primaire (le back-up-pour ce jour (1 000 MW). Malgré le recours à cette réserve, dont 475 MW de batteries de stockage, signale le GRT, la chute de fréquence dépasse l’amplitude acceptée (zone de 49,5 à 50,5 Hz) et descend à 48,8 Hz à 16h53 et 49 secondes. A ce point, les systèmes secondaires de réserve entrent en jeu, et des clients sur les réseaux de distribution sont déconnectés correspondant à quelque 5% de la demande totale, pour protéger les 95% restants. A 16h57, la fréquence est restaurée sur le réseau de National Grid, et dès 17h06, les distributeurs reconnectent les clients, ce qui dure jusqu’à 17h37. A noter, signale National Grid que la durée de remise en service sur le réseau de transport par rail prend plus de temps et sera la cause de massifs blocages qui dureront des heures dans les gares du Sud-Est anglais.

Conclusions préliminaires du GRT

Une analyse plus approfondie sera remise à Ofgem le 6 septembre afin de permettre au régulateur son enquête annoncée le 20 août dernier et devrait permettre de tirer des enseignements pour l’ESO. En outre, ce dernier soutiendra activement l’examen plus large du secteur engagé par l’Energy Emergencies Executive Committee (E3C) à la demande du ministère de tutelle, le BEIS. Le GRT juge notamment nécessaire d’analyser de manière plus approfondie « les mécanismes exacts de défaillance à Little Barford et à Hornsea, en tirant parti de notre bonne compréhension actuelle du calendrier et des niveaux des diverses pertes de production. »


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