Des bus électriques qui brûlent dans Paris, des trottinettes qui émettent de la fumée avant de brûler, des cargos qui coulent suite à un incendie dans les véhicules électriques transportés... Ces cas d’incendie restent très rares. Mais, leur maîtrise incendie est encore un casse-tête pour les pompiers et les industriels.
En avril 2022, un bus électrique a pris feu dans Paris. En juillet dernier, un cargo a pris feu au large des Pays-Bas. À son bord, 3 783 voitures, dont près de 500 étaient des modèles électriques. Trois ans plus tôt, le cargo Höegh Xiamen avait coulé après l’incendie de la batterie d’occasion d’une voiture.
Des vidéos ont également été diffusées sur les réseaux sociaux montrant des trottinettes ou des smartphones prenant feu. Ces cas sont très rares mais en augmentation, car il y a de plus en plus de véhicules électriques. Selon le rapport des activités du Service de sécurité incendie de Montréal (SIM), 24 incendies provoqués par des batteries au lithium-ion ont eu lieu en 2022, soit 3,5 fois plus qu’en 2021.
Contrairement à une idée reçue, la qualité des batteries chinoises n’est pas toujours la principale cause de ces incendies. C’est la conception même des batteries lithium-ion qui pose problème.
La plupart des cellules lithium-ion combinent des matériaux très réactifs dans un espace très compact qui, pour ne rien arranger, se trouvent près d’électrolytes volatils et hautement inflammables.
Noyer une voiture
Lorsque les barrières séparant ces matériaux réactifs sont endommagées, une chaîne de réactions chimiques génère de la chaleur. Cela crée un effet domino où la température peut atteindre une valeur difficile à contrôler de 700 à 800°C. Le matériau séparant l’anode et la cathode va fondre et provoquer un court-circuit.
C’est ce qu’on appelle un emballement thermique. Mais, comment éviter d’atteindre ce seuil fatidique ? « Certains véhicules sont dotés d’une ventilation forcée, cependant moins efficace que les circuits de refroidissement que l’on peut trouver sur les véhicules plus haut de gamme », note Lilian Chavanon, qui dirige Chavanon Conseil, une entreprise spécialisée dans la gestion des risques.
Autre risque souvent négligé, une batterie peut s’enflammer 72 heures après un choc. La sensibilité [des batteries, NDLR] aux chocs mécaniques (suite à un accident ou à une chute s’il s’agit de la batterie d’un smartphone ou d’un appareil de e-mobilité) ou électriques est, en effet, très élevée. Elle peut engendrer des dégâts internes : déformation des cellules, fuite de liquides, risques de surchauffe et à nouveau des courts-circuits.
La situation est d’autant plus inquiétante que les pompiers ne savent pas aujourd’hui éteindre rapidement une voiture électrique qui brûle… Les agents d’extinction classiques sont généralement inefficaces, car ces batteries produisent leur propre oxygène, alimentant ainsi l’incendie.
« La meilleure chose que l’on peut faire, c’est d’envoyer de l’eau à l’intérieur de la batterie afin de refroidir les modules et éviter le risque de propagation aux autres modules. La cellule va ainsi se consumer entièrement sans affecter les autres. Mais, on n’est jamais certain qu’une batterie a complètement brûlé et que l’incendie ne va pas repartir. C’est la raison pour laquelle l’une des options préconisées consiste à noyer la voiture avec des contraintes logistiques et environnementales complexes. Les pompiers de Monaco disposent quant à eux d’un conteneur d’isolement dans lequel ils posent la voiture une fois l’extinction achevée afin d’assurer une surveillance monitorée de la batterie, couplé à un dispositif d’extinction », précise Lilian Chavanon.
Voitures d’occasion
Selon Tesla, il faut en général entre 11 000 et 30 000 litres d’eau pour éteindre l’incendie d’une voiture électrique.
Mais le cas des batteries des véhicules n’est pas le seul à poser des problèmes. Les entreprises sont également concernées. Et, les risques sont là aussi importants. Début 2023, un incendie dans un bâtiment de l’entreprise Bolloré Logistics à Grand-Couronne a mobilisé une centaine de pompiers durant plusieurs heures.
Le feu a démarré dans un stockage de batterie au lithium puis s’est propagé à un entrepôt voisin où sont entreposés des dizaines de milliers de pneus. « Cet incendie a été l’élément révélateur pour de nombreux industriels. Les logisticiens qui stockent des batteries de voiture, de trottinettes ou celles qui sont reliées aux panneaux photovoltaïques doivent mettre en place des systèmes de détection », prévient Lilian Chavanon.
Mais encore trop d’entreprises n’ont pas pris conscience des risques. Or, elles acceptent que des salariés viennent recharger leurs véhicules sur leur parking mais également les vélos et trottinettes dans les locaux, sans intégrer ces risques d’incendie dans leur Document Unique d’Évaluation des Risques, nous a précisé le responsable de Chavanon Conseil.
Ces différentes affaires laissent à penser que ces batteries présentent une menace pour les entreprises mais aussi les particuliers. En réalité, elles sont très sûres si elles sont correctement utilisées et entretenues. Il est important de bien lire les instructions d’utilisation afin de réduire au minimum le risque d’incendie.
« Si on respecte les bonnes pratiques de charge et de décharge, normalement il n’y a pas de raison que cela prenne feu. Par contre, je n’achèterai pas une voiture électrique d’occasion, car j’ignore comment le précédent propriétaire a géré sa batterie au quotidien et comment la batterie réagira après plusieurs années d’usage. C’est la raison pour laquelle la formule de Renault qui loue les batteries est intéressante », note Lilian Chavanon.
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