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L’Arctique devient une priorité pour la Russie

Posté le 21 décembre 2017
par Pierre Thouverez
dans Entreprises et marchés

Le président russe Vladimir Poutine a annoncé il y a quelques jours, lors de sa conférence de presse annuelle, placer le développement économique de l’Arctique comme une priorité. Si l’intérêt que porte le Kremlin n’est pas nouveau, plusieurs annonces récentes confirme l’avancée russe dans cette région géostratégique.

La vitrine Yamal

«Nous avons développé un programme de développement de l’Arctique. Ce qui est important, c’est la mise en valeur industrielle de l’Arctique, notamment l’extraction des matières premières», a déclaré Vladimir Poutine. La contrée glacée recèlerait quelque 100 milliards de barils de pétrole et 40 000 milliards de mètres cube de gaz techniquement récupérables, ainsi que de nombreux gisements de métaux et terres rares. La hausse des températures aux pôles et la réduction de la calotte glacière laissent entrevoir d’importantes opportunités pour les compagnies pétrolières et gazière russes qui voient leurs anciens gisements s’appauvrir.

Pour exploiter ces ressources en conditions extrêmes, il faut une technologie de pointe, détenue notamment par des Majors étrangères telles que Total. Le groupe français mène aux côtés de son partenaire russe Novatek, du chinois CNPC et de Silk Road Fund (9,9 %) le projet géant de Yamal dans le grand Nord. C’est une vitrine de la politique russe de développement de l’Arctique, en faisant jaillir en quelques années de nulle part un port, un aéroport, une installation de traitement de gaz et de liquéfaction avec trois trains d’une capacité de 5,5 millions de tonnes par an chacun, ainsi que des réservoirs de stockage. En décembre, Total a annoncé que la première cargaison de gaz naturel liquéfié (GNL) avait quitté le port de Sabetta. «Ensemble, dans des conditions extrêmes, nous avons fait sortir de terre un projet GNL de taille mondiale qui permet de valoriser les immenses ressources gazières de la péninsule de Yamal. Ce projet géant n’aurait pas été possible sans la force de notre partenariat avec Novatek et témoigne de l’engagement de Total envers la Russie», a déclaré Patrick Pouyanné, le pdg Total.

Contrôler les routes maritimes

Au-delà de l’exploitation des ressources naturelles, la Russie s’intéresse à la région pour des raisons de transport maritime. La fonte plus importante de la banquise en raison du changement climatique, créé des routes bien plus courtes en l’Asie et l’Europe notamment et pourraient devenir des trajets saisonniers utiles pour désengorger des points de passages comme le canal de Suez. Le ministère russe de la Défense a annoncé en novembre avoir découvert onze nouvelles îles et six détroits dans l’Arctique ces cinq dernières années, renforçant les prétentions de la Russie dans cette région disputée où elle a revendiqué en 2015 devant les Nations unies la souveraineté sur 1,2 million de km2. «D’après le scénario de base, le fret de la route maritime du Nord atteindra 70 millions de tonnes, et selon certains scientifiques elle pourrait s’élever jusqu’à 105 millions de tonnes d’ici à 2030», estime Evgeny Zagorodniy, le vice-président de la United Shipbuilding Corporation.

Sécuriser la route du Nord nécessitera une flotte conséquente de navires brise-glace. Dans ce domaine, la Russie détient une avance certaine avec des bâtiments à propulsion nucléaire gérés par Atomflot. Plus récemment, une méthanier brise-glace portant le nom de Christophe de Margerie (ancien PDG de Total décédé dans un accident d’avion en 2014), a été inauguré par Vladimir Poutine et a commencé à emprunter la fameuse route du Nord. Tout un symbole.

Romain Chicheportiche


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