28 janvier 2013. Le premier échantillon d’eau est extrait du lac avec beaucoup de précautions. Les scientifiques sont très attentifs à ne pas polluer leur trouvaille, ce qui remettrait en cause toutes les découvertes à venir. Pour assurer l’intégrité des échantillons, l’équipe du projet dédié à l’exploration du lac Whillans a passé pas moins de six années à mettre au point leur protocole. Cela en valait la peine. Les analyses ont révélé la présence de 3931 microbes, majoritairement des bactéries et archéobactéries. Toutefois, 793 organismes restent de nature inconnue.
A l’endroit du forage, la profondeur du lac est faible, 2,20m, et la température y est clémente avoisinant les -0.5°C. Le camp construit tout autour est impressionnant. Tracteurs, laboratoires mobiles mais surtout un système d’injection d’eau chaude nécessaire pour creuser le trou de 60 cm de diamètre et garantir la propreté des échantillons. Soit en tout des centaines de tonnes de matériels pour cette mission en plein cœur de l’Antarctique. Il aura fallu sept jours pour creuser à travers l’épaisse couche de glace. Des rayonnements ultra-violets, la filtration de l’eau et du peroxyde d’hydrogène ont garanti la stérilisation du matériel. Avant que le trou ne se referme, trente litres d’eau ont été prélevés ainsi que plusieurs carottes de sédiments.
793 organismes restent de nature inconnue
Dans leur article paru dans Nature le 21 août 2014, les chercheurs indiquent avoir trouvé 130 000 cellulles/ml d’eau, soit une densité équivalente à celle des océans terrestres les plus profonds. « J’ai été surpris par la richesse de cet écosystème. C’est incroyable » s’enthousiasme John Priscu, microbiologiste de l’Université du Montana.
Situé 800m en dessous de la surface, le lac Whillans recèle donc des formes de vie capables de survivre dans des conditions extrêmes puisque ces bactéries ont passé près de 120 000 années sans voir un seul rayon de soleil. Ces dernières ont donc dû produire leur énergie par oxydation de fer et de soufre présents dans les minéraux des sédiments Mais la plus grande partie des microbes découverts vivent en oxydant les ions ammonium, eux-mêmes pouvant être d’origine biologique.
La découverte d’une vie aussi complexe et dense dans un environnement aussi hostile laisse supposer que d’autres bactéries existent dans d’autres lacs subglaciaux, attendant patiemment d’être mises à jour.
Le projet Whillans Ice Stream Subglacial Access Research Drilling (Wissard) engage une vingtaine de chercheurs provenant de quinze universités de cinq pays.
Par Audrey loubens
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