L'animateur doit-il tout noter au tableau ? Ne peut-il pas se faire aider par un « secrétaire de séance » ?
Notez toutes les idées au tableau est un tâche très astreignante mais indispensable pour qu’elles soient visibles de tous. Sachez que si vous demandez à quelqu’un d’écrire pendant que vous animez, vous risquez très vite d’avoir des problèmes de synchronisation. Exercez-vous à écrire vite. N’hésitez pas à dire « Stop » si vous êtes débordé. Un petit conseil : dites à voix haute ce que vous écrivez ; cela vous permet de garder la parole.
Ne peut-on pas utiliser des Post-it® ?
Si, bien sûr. Vous n’avez alors plus besoin d’écrire, ce sont les participants qui le font, et cela vous facilite la tâche : distribuez à chacun un lot de Post-it® (prévoyez en plusieurs paquets) et demandez-leur d’y inscrire leurs idées, puis vous les collez ou faites coller au tableau ; vous pouvez ensuite déplacer les Post-it® pour faire des groupes d’idées apparentées.
Demandez une idée par Post-it®, pas plus de trois ou quatre mots écrits en majuscules.
Mais cette méthode présente des inconvénients : il manque les échanges, le rythme est plus lent, et le souci de classer les idées prend souvent le pas sur la recherche de nouvelles idées.
C’est une bonne entrée en matière (par exemple pour la « purge »), mais rien ne remplace le jaillissement collectif des idées.
Vous pouvez aussi utiliser les post-it dans la phase de sélection des idées : donnez cinq à dix Post-it® à chacun pour noter ses « coups de cœur ».
Est-ce que l'animateur a le droit d'avoir des idées ?
Oui, rien ne l’en empêche. Mais ce n’est pas son rôle : il est là pour recueillir et stimuler celles des participants. Et surtout les idées de l’animateur risquent d’être perçues comme plus importantes que les autres. Donc si vous avez des idées, notez-les dans le flot, sans les mettre particulièrement en valeur.
Que faire s'il y a des blancs, si personne n'exprime d'idée ?
Cela peut arriver. C’est surtout une affaire de rythme : après une production d’idées soutenue, il peut arriver que le silence s’installe. Ne vous inquiétez pas ; prenez conscience que le temps passe plus lentement pour l’animateur : 30 secondes de silence vous paraîtront une éternité, alors que pour les participants c’est une simple respiration. Résistez à la tentation de meubler le silence en proposant vos propres idées. Stimulez des associations à partir des idées existantes. Vous pouvez aussi utiliser la check-list suivante, appelée « concassage », pour associer sur une idée :
- Augmenter (le poids, la taille, le volume...)
- Diminuer (id.)
- Supprimer (des pièces, des fonctions...)
- Inverser (le sens, la chronologie, les caractéristiques...)
- Modifier (le lieu, le temps, l’usage, l’état, le mouvement...)
- Combiner (avec d’autres objets, ou pièces, ou fonctions...)
- Embellir (pour la vue, l’ouïe, l’odorat...)
- Enlaidir (id.)
Et si malgré tout le silence persiste, c’est qu’il est temps de passer à la phase suivante.
Et si une personne ne cesse de censurer les idées ?
Rappelez inlassablement les règles de la créativité. Vous pouvez aussi rebondir sur les critiques en en faisant des thèmes d’associations : « Ça ne marchera pas ? Comment faire pour que ça marche ? », « C’est trop cher ? Comment faire moins cher ? ». Et si malgré tout la personne continue à censurer, n’hésitez pas à avoir une explication avec elle, au cours d’une pause (pas devant tout le groupe) et à lui proposer de quitter la séance.
Le demandeur ne risque-t-il pas d'être mal disposé si on le questionne trop ?
C’est à vous de faire preuve de psychologie : soyez exigeant, bien sûr, mais pas arrogant. Montrez que vous cherchez à comprendre, afin de mieux satisfaire le besoin du demandeur. Vous verrez qu’à la fin il vous sera reconnaissant de lui avoir permis de clarifier sa demande.
Cette démarche ne risque-t-elle pas de « tuer » la créativité en l'enfermant dans un cadre ?
Absolument pas. L’imagination a besoin de limites pour se libérer : il n’y a rien de plus angoissant que la « page blanche ». À vous aussi d’être « raisonnable » : si vous ne fixez pas de limites, la créativité aura du mal à s’exprimer ; si vous en fixez trop, elle sera effectivement bridée. Sachez aussi que les techniques de créativité permettent cette libération, et que, dans le feu de l’action, votre groupe aura vite oublié ces limites !
Est-ce que « le lubion ne va pas remonter trop haut », vers des sujets trop ambitieux ?
C’est un risque : en remontant trop haut, vous risquez de reformuler des sujets trop vastes.
Faites-y attention, et, lorsque vous reformulez le sujet, faites-le bien en accord avec le demandeur, en restant concret.
Peut-on faire participer des personnes extérieures à l’entreprise ?
Oui, c’est possible, c’est même très fructueux d’avoir des personnes extérieures, à cause de leur regard différent ; veillez à la confidentialité (cela peut aller jusqu’à leur faire signer des accords de confidentialité).
Peut-on faire participer des clients ?
Il faut distinguer entre « client interne » et « client externe » :
- Le « client interne » : c’est le demandeur de la séance ; faites attention, il risque de ne pas avoir la neutralité suffisante ; c’est une bonne chose pour le motiver, mais vous devrez être très clair avec lui sur son attitude qui peut freiner la créativité.
- Le « client externe » : si c’est un client « industriel (« Business to Business »), c’est tout à fait possible, à condition là aussi d’être très clair avec lui ; si c’est un consommateur (« Business to Customer »), il risque de se sentir étranger ; un consommateur aura plus sa place dans une séance de recueil de besoins ou de test d’un produit.
Et si le groupe est hostile ?
Sachez que si vous avez été clair sur l’objectif, le déroulement, les règles du jeu, cela a peu de chances de se produire. En tout cas, dédramatisez, dépassionnez, ne le prenez pas pour vous !
Renvoyez ce que vous ressentez, recherchez-en les raisons en faisant s’exprimer les participants, soyez très clair sur votre rôle. Appuyez-vous toujours sur la méthode.
Et si le groupe est apathique ?
Renvoyez ce que vous ressentez, n’agressez pas le groupe, ne le culpabilisez pas.
Faites s’exprimer les participants, utilisez au maximum les tours de table.
Mobilisez le groupe sur un sujet qui le motive.
Et si les participants, surpris par le caractère insolite de la technique, ne veulent pas se prêter au jeu ?
Prenez le temps d’expliquer le principe de la bisociation ; donnez des exemples.
Et si les participants n’ont pas d’idées ?
Cela peut arriver, certaines images peuvent ne pas être inspirantes pour certains. Si, après avoir essayé de rebondir, vous n’y arrivez toujours pas, alors passez à une autre image.
N’est-ce pas un peu aléatoire? Ne risque-t-on pas de « passer à côté » d’idées intéressantes ?
Il y a effectivement une part de hasard dans le choix des images (le choix initial de la banque d’images, et le choix de celles que vous présentez). Mais si vous prenez le soin de présenter des images de domaines très différents et si vous forcez systématiquement à faire des associations, vous ne courrez pas un grand risque, en tout cas pas plus que dans un brainstorming.
Y a-t-il des sujets pour lesquels cette technique n’est pas adaptée ?
Pas particulièrement ; cette technique fonctionne bien pour tous types de sujets, même des sujets très « techniques » pour lesquels elle facilite la « sortie du cadre ».
En tout cas, elle est recommandée dans les cas où les participants ont des difficultés à libérer leur imagination (fatigue, trop grande expertise...).
Est-ce que ces techniques sont vraiment efficaces ?
Ces techniques sont très efficaces à condition de les utiliser rigoureusement. Veillez à une bonne « imprégnation » pour une question bien formulée. Veillez à une bonne constitution du groupe, respectez les conseils d’animation, appliquez scrupuleusement les processus décrits, et les « bonnes idées » fuseront ! Par expérience, les échecs ne viennent pas des techniques elles-mêmes, mais de sujets mal formulés et de groupes mal constitués et mal animés.
Y a-t-il d'autres techniques ?
Oui, bien sûr. Celles-ci sont le plus couramment utilisées et suffisent dans la majorité des cas. Beaucoup d’autres techniques n’en sont d’ailleurs que des variantes. Signalons une autre catégorie, celles des techniques « projectives » à base de jeux de rôles et de manipulation d’objets, de matériels ou d’images. Elles demandent un savoir-faire spécifique.
Quel est le rapport entre créativité et innovation ?
Si l’on définit l’innovation comme l’ensemble du processus qui conduit une idée nouvelle jusqu’à son application pour répondre à un besoin mal ou non satisfait, alors la créativité apparaît comme une des composantes de l’innovation : la démarche et l’état d’esprit pour stimuler l’imagination et concrétiser dans le réel le fruit de cette imagination pour obtenir des idées à valeur ajoutée.
Et si les participants ne veulent pas se prêter au jeu ?
D’abord, expliquez bien le principe de l’éloignement créatif, et en quoi ces techniques permettent de prendre du recul.
Au besoin, prenez un exemple simple pour en montrer le mécanisme.
De toute façon, ne les mettez pas en œuvre sans les présenter, les expliquer. Il est préférable, surtout pour la technique de l’analogie, de les utiliser avec des participants déjà entraînés à libérer leur imagination.
Est-ce que l’inversion ne risque pas de tomber dans le défoulement stérile ?
Oui, cette technique s’y prête. Il faut assumer, cela permet de se libérer. Veillez simplement à ce que cela ne dure pas trop longtemps.
Comment être sûr de trouver la « bonne » analogie ?
Il n’y a pas de règle absolue. La « bonne » analogie, c’est celle qui inspire les participants et qui permet de s’éloigner.
Vous pouvez utiliser, pour en trouver, la liste suivante de domaines possibles :
Animaux, situations de la vie courante (en famille, au travail, etc.), biologie, médecine, coutumes tribales, science-fiction (martiens, etc.), mode, ordinateurs, robots, guerre, agriculture, pêche, finance, économie, botanique (fleurs, plantes), transports (automobile, avions, bateaux, trains...), loisirs, voyages, art, culture, sport, architecture, urbanisme, cuisine, aménagement de la maison, aéronautique, spatial, astronomie, personnages historiques...
Cela paraît bien compliqué, l’analogie ! N’y a-t-il pas plus simple ?
Oui, en effet, il y a ce que l’on appelle l’analogie « directe » : au lieu de se transposer dans un univers imaginaire, on cherche simplement à voir si la problématique n’a pas été résolue dans un autre domaine, ou même dans la nature, et l’on transpose les solutions.
Par exemple, une équipe de chirurgie cardio-vasculaire néonatale s’est inspirée des procédures et du matériel utilisés sur les stands de Formule 1 pour améliorer le transfert des petits opérés de la salle d’opération à la salle de réanimation.
Un autre exemple concerne l’innovation pour un emballage de médicaments : la question « qu’est-ce qui est bien emballé dans la nature ? » a fourni une importante liste de sources d’inspiration : les petits pois, les coquillages, le cœur d’artichaut, l’œuf, le fœtus, etc.
L'analyse morphologique est-elle universelle ?
Non, elle n'est pertinente que pour un secteur dans lequel les solutions bougent peu et ne s'hybrident pas.
L'analyse morphologique se suffit-elle à elle-même ?
Elle peut être couplée à d'autres méthodes, par exemple l'analyse fonctionnelle, le remue-méninges pour extraire les paramètres technologiques, la fouille de données pour cartographier les solutions, TRIZ pour identifier les paramètres associés aux résultats finaux idéaux, etc.