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Gérard PASCAL : Directeur de recherches honoraire à l'INRA - Expert en sécurité des aliments de l'OMS
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L'évocation du sigle OGM suscite un intérêt immédiat et déclenche des discussions souvent contradictoires. Cependant, nos concitoyens savent-ils ce qui se cache derrière ces trois lettres, ce que sont les organismes génétiquement modifiés, quels types d'OGM sont aujourd'hui autre chose que des curiosités de laboratoire, quelles sont leurs différents types d'utilisation, quels sont leurs développements possibles, probables ? Enfin, les OGM, et en particulier les plantes génétiquement modifiées utilisées comme source d'aliments, présentent-ils des risques sanitaires ? Telles sont quelques-unes des questions auxquelles cet article se propose de répondre.
Des enzymes issues de microorganismes génétiquement modifiés (MGM) sont utilisées depuis plus de quinze ans pour la fabrication de nombreux produits alimentaires fermentés comme les produits de cuisson céréaliers, la bière, les fromages, c'est-à-dire les produits fermentés. Si ces enzymes sont l'objet d'une évaluation de leur absence de risques sanitaires (la France est l'un des seuls pays à disposer d'une réglementation des enzymes alimentaires), le public n'a pas manifesté de réactions négatives vis-à-vis de ces utilisations. On peut imaginer que c'est en raison de son ignorance et aussi, et peut-être surtout, parce que les MGM dont sont issues les enzymes ne sont pas disséminés dans l'environnement.
Les animaux génétiquement modifiés ne sont pour le moment que des outils de recherche et n'ont pas encore suscité de réelles réactions, alors que la consommation des produits des animaux clonés commence à être l'objet de contestations dans les milieux consommateurs outre-Atlantique.
Le débat au sein de la société concerne aujourd'hui essentiellement les plantes génétiquement modifiées (PGM), aliments, source d'aliments ou source de molécules d'intérêt pharmaceutique ou industriel. L'importance du développement dans le monde des PGM aliments ou source d'aliments ainsi que la spécificité de l'évaluation de leur sécurité sanitaire pour une consommation humaine ou animale sont telles que mon propos se limitera aux PGM.
En 2007, des PGM ont été cultivées sur plus de 114 millions d'hectares de par le monde (cf. figure en ) : 101 Mha sur le continent américain, environ 6 Mha en Inde et 4 Mha en Chine et très peu en Europe (moins de 300 000 ha dont 100 000 ha en Espagne et en Roumanie et environ 22 000 ha en France). Dans le monde, les espèces concernées sont essentiellement le soja (51 % des espaces cultivés), puis le maïs (31 %), le coton (13 %) et enfin le colza (5 %). Ces PGM étaient donc, en 2007, des plantes de grande culture, cultivées dans de grands pays agricoles.
Les applications correspondent d'ailleurs bien à des objectifs de ces pays : tolérance aux herbicides pour 63 % des surfaces cultivées et résistance aux insectes, essentiellement aux lépidoptères, pour 18 %. Les deux caractères ont été introduits simultanément dans des PGM cultivées sur 19 % des surfaces .
On voit donc que pour le moment, les autres espèces végétales et les autres caractères nouveaux des PGM ne sont pratiquement que des curiosités de laboratoire.
L'évaluation du risque alimentaire présenté par ces PGM est étroitement liée à la nature des transformations génétiques réalisées et à leur composition. Elle présente les mêmes difficultés que l'évaluation de la sécurité de tout aliment et suppose donc une approche spécifique du domaine alimentaire. C'est cette approche que nous allons suivre point par point, basée sur la connaissance des propriétés nouvelles de chaque PGM et en utilisant une méthode « comparative » qui consiste à comparer la PGM, ou l'aliment qui en est issu, à une plante ou à un aliment traditionnel dont la consommation bénéficie d'un historique de consommation sans risques (« history of safe use » des Anglo-Saxons). C'est le concept de l'équivalence en substance.
L'évaluation va concerner la toxicité éventuelle des protéines nouvellement produites, leur risque allergène ainsi que la salubrité (absence de toxicité et valeur nutritionnelle) de la PGM ou de l'aliment qui en est issu. Elle sera réalisée au cas par cas.
Des centaines de chercheurs disposant des compétences et de l'expérience de l'évaluation de la sécurité sanitaire des aliments, travaillant au sein de collectifs scientifiques nationaux, européens ou internationaux, ont élaboré cette méthodologie d'évaluation des PGM par étapes, au cours des vingt dernières années. Tous les dossiers de demande de mise sur le marché des PGM ont été examinés et évalués sur la base de cette méthodologie. La conclusion de toutes les évaluations a été : la PGM ou les aliments qui en sont issus ne présentent pas plus de risque que la plante ou l'aliment traditionnel qui servent de « comparateurs ». Aucun des travaux publiés, qui contestent ces conclusions, n'a été considéré comme acceptable par la communauté scientifique qui en a critiqué le protocole et la qualité et en a réfuté les résultats.
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3. Réponses des méthodes classiques de la toxicologie aux questions posées
3.1 Quelques rappels historiques
La toxicologie est une discipline ancienne, mais son application au domaine alimentaire est plus récente. La préoccupation remonte cependant à plus d'un siècle, aussi bien en France qu'aux États-Unis. En France, c'est la loi du 1er août 1905 (qui avait déjà pour objet la protection de la santé publique en assurant la prévention et la répression de la fraude des aliments) qui a été à l'origine de la mise en place progressive d'une réglementation basée sur une approche scientifique de l'évaluation des risques. Aux USA, c'est à peu près à la même époque, en 1906, que les premières mesures de protection des consommateurs ont été prises : « Pure Food and Drug Act » et « Meat Inspection Act ».
C'est véritablement en 1955 que les réflexions sur la méthodologie d'évaluation des risques dans le domaine alimentaire ont pris corps au niveau international. Une conférence mixte FAO/OMS (Organisation pour l'alimentation et l'agriculture et Organisation mondiale de la santé de l'Organisation des Nations unies) a été à l'origine de la création d'un Comité mixte FAO/OMS d'experts des additifs alimentaires (connu sous le sigle de JECFA à partir de son intitulé en anglais). Au cours de sa deuxième réunion, le JECFA a évoqué dans son rapport « des concentrations probablement sans risque pour l'homme ». Le professeur René Truhaut, un français membre très actif du JECFA, a utilisé pour la première fois les termes de « dose journalière acceptable ». Pour cette raison il est considéré comme le parrain du concept de dose journalière acceptable (ou DJA) adopté dans un premier temps pour les additifs alimentaires.
La dose journalière acceptable est la quantité d'un additif alimentaire, exprimée sur la base du poids corporel, qui peut être ingérée par l'homme chaque jour, pendant toute la vie, sans risque appréciable pour la santé.
Ce concept a été étendu au cas des pesticides en 1963, puis aux contaminants avec quelques nuances.
Ce qui va nous ramener à notre propos est la façon dont on détermine cette DJA. Elle ne s'applique tout d'abord qu'à des substances qui ne sont pas des cancérogènes génotoxiques, c'est-à-dire des substances qui sont responsables à la fois de l'apparition de tumeurs (cancérogènes)...
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Réponses des méthodes classiques de la toxicologie aux questions posées
En 2007, des PGM ont été cultivées sur plus de 114 millions d'hectares par le monde (figure ) ; 101 Mha sur le continent américain, environ 6 Mha en Inde et 4 Mha en Chine et très peu en Europe (moins de 300 000 ha dont 100 000 ha en Espagne et en Roumanie et environ 22 000 ha en France). Ces PGM étaient donc, en 2007, des plantes de grande culture, cultivées dans de grands pays agricoles.
HAUT DE PAGE
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JAMES (C.) - Global status of commercialized biotech/GMcrops 2007 - ISAAA, N° 37, brief. Executive summary (2008).
ILSI Europe - Food biotechnology : an introduction - ILSI Europe Concise Monograph Series, 37 pp (1995).
BARLOW (S.) et al - Food safety in Europe (FOSIE) : risk assessment of chemicals in food and diet - Food Chem. Toxicol., 40 (2/3), 427 pp (2002).
OECD - OECD Guidelines for the Testing of Chemicals - OECD Paris (1995).
Ministère de l’Agriculture et de la Pêche - ministère de l’Écologie et du Développement durable - L’expertise scientifique ; 20 années d’évaluation - Commission du génie biomoléculaire (20 septembre 2007).
European Commission - The Joint (SCF, SCAN, SCP) Working Group on Novel Foods and GMOs - Guidance document for the risk assessment of genetically modified plants and derived food and feed, (prepared for the Scientific Steering Committee) (6-7 March 2003).
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