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1 - LES INGÉNIEURS ET LEURS FORMATIONS JUSQU’À LA MOITIÉ DU XXE SIÈCLE

  • 1.1 - De l’Ancien Régime au XIXe siècle : l’essor des ingénieurs
  • 1.2 - Du XIXe au XXe siècle : de la science industrielle au rôle social de l’ingénieur
  • 1.3 - Du côté des formations : humanités et formation humaine

2 - ÉVOLUTION DES CONCEPTIONS DE L’INGÉNIEUR ET DE SA FORMATION DEPUIS 1950

  • 2.1 - Vers la responsabilité sociétale des ingénieurs
  • 2.2 - Du côté des formations : place ambigüe des sciences humaines et sociales

3 - SHS : LES CONDITIONS D’UNE VOIE D’ACCÈS À LA RESPONSABILITÉ SOCIÉTALE DES INGÉNIEURS

  • 3.1 - Prise en compte de la question des valeurs en science
  • 3.2 - Prise en compte de la dimension culturelle des sciences et techniques
  • 3.3 - Prise en compte de la place des ingénieurs au cœur des systèmes bio-sociotechniques

4 - CONCLUSION

Article de référence | Réf : AG109 v1

Conclusion
Évolution du rôle social à la responsabilité sociétale des ingénieurs

Auteur(s) : Catherine ROBY

Date de publication : 10 janv. 2017

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RÉSUMÉ

Le retour sur la sociohistoire des ingénieurs et de leurs formations semble inéluctable pour comprendre leurs difficultés à s’emparer de la notion de responsabilité sociétale. Le puissant ancrage historique de la profession en France renvoie au poids et à l’extension de la rationalité scientifique et technique dans tous les domaines de la vie sociale. L’appropriation de certains travaux de recherche en sciences humaines et sociales, notamment ceux qui relèvent de la philosophie, de l’histoire et de la sociologie des sciences et techniques, pourrait permettre aux ingénieurs une meilleure compréhension de la construction de leurs modes de penser et d’agir. Etape nécessaire pour les conduire à développer des capacités et une pratique réflexive plus adaptées aux nouvelles attentes sociétales.

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Auteur(s)

  • Catherine ROBY : Chargée d’enseignement, département des sciences de l’éducation, université Rennes 2, France - Chercheuse associée au Centre de recherche sur l’éducation, les apprentissages et la didactique CREAD (EA 3875)

INTRODUCTION

Malgré la richesse et la diversité des travaux des historiens et des sociologues qui se sont intéressés aux ingénieurs français, ceux-ci restent des professionnels peu ou mal connus, alors même que nous utilisons au quotidien les objets matériels qu’ils conçoivent et les services associés qu’ils proposent. Les bouleversements engendrés dans nos vies par les évolutions autant de la technologie que des modes de production et d’organisation du travail sont conséquents, tant pour les individus que pour l’humanité, pour le meilleur comme pour le pire. Quels sont donc les valeurs et les rapports au monde qui sous-tendent les modes d’agir des ingénieurs ? Quelle est leur conscience sociale et politique ? Curieusement, ces questions restent peu travaillées par la recherche alors que, par essence, les activités des ingénieurs, qu’elles soient de conception, de production ou d’expertise, les conduisent inéluctablement à la question de leur responsabilité sociétale, par les décisions qu’ils prennent et qui engagent l’avenir des sociétés humaines et de leur environnement.

Pour comprendre pourquoi cette notion de responsabilité sociétale semble parfois difficile à percevoir ou à saisir par les ingénieurs, parfois surpris par des mobilisations citoyennes ou des législations politiques, il s’avère pertinent de faire un retour sur la sociohistoire des ingénieurs et de leurs formations.

L’article propose dans un premier point d’exposer la sociohistoire des ingénieurs et de leur formation de la moitié du XVIIIe siècle à la moitié du XXe siècle. Cette présentation permet de prendre conscience du poids de l’ancrage historique français des ingénieurs, du côté de l’ordre militaire et de la rationalité des sciences et des techniques, étendue par la science industrielle à l’organisation de la production et du travail, en lien avec le développement du rôle social de l’ingénieur. Puis dans un second point, le regard porté sur les évolutions advenues dans la seconde moitié du XXe siècle met en évidence la difficulté pour les ingénieurs de se départir autant de la relation linéaire établie entre progrès technique et progrès humain et social que de leur rôle social. Enfin, le troisième point montre en quoi certains apports de sciences humaines et sociales, notamment en termes de recherches sur les sciences et techniques en société, pourraient permettre une meilleure prise en compte des questions de responsabilité sociétale dans l’exercice des activités professionnelles des ingénieurs appelés à devenir des praticiens réflexifs.

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DOI (Digital Object Identifier)

https://doi.org/10.51257/a-v1-ag109


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4. Conclusion

La sociohistoire des ingénieurs français et de leur formation témoigne d’un puissant ancrage historique dans l’Ancien Régime jusqu’à la période charnière entre le XIXe et le XXe siècle. Cet ancrage renvoie autant à ce qui concerne leur position et leur rôle dans la société qu’à leurs modes de pensée et d’action. Cette période est en effet marquée par le lien profond que les ingénieurs ont noué entre leurs activités conçues au service du progrès technique et des préoccupations d’ordre social (amélioration du bien-être humain). Cette période est tout autant marquée par l’ordre militaire et mathématique, accompagné par la consécration des sciences physiques, au fondement de l’activité des ingénieurs.

Au XIXe siècle, la science industrielle, comprise comme une technologie globalisante pour l’entreprise ou comme une recherche industrielle appliquée, a cherché à légitimer le travail productif d’organisation réalisé par les ingénieurs dans les entreprises industrielles. Ce nouveau mode d’organisation va de pair avec une hiérarchisation scrupuleuse des activités des individus, dans laquelle exécution et conception ou direction ne sauraient se confondre. Mais cette extension de la légitimité scientifique sur le contrôle de la sphère industrielle et sociale, sous-tendue par un projet de rationalisation, a été confrontée à la fin du XIXe à des bouleversements sociaux. Sous l’impulsion du catholicisme social, l’ingénieur a alors intégré un rôle social pour garantir la paix sociale, idéal rêvé d’une époque troublée.

Pour dépasser la lutte des classes, le rôle social de l’ingénieur renvoie entre autres à ses capacités de prise en compte des dimensions économiques et sociales du travail, d’éducation technique, professionnelle et morale des ouvriers, de médiation, afin que patrons et ouvriers cessent de s’opposer. Ce rôle s’intègre donc dans une conception hiérarchique et autoritaire des rapports sociaux dans l’entreprise prenant appui sur le paternalisme patronal et sur l’ordre rationnel de la production industrielle basée sur l’idée de neutralité de la science et des techniques.

La notion de rôle social de l’ingénieur s’est fortement développée entre les deux guerres et a perduré jusqu’à...

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BIBLIOGRAPHIE

  • (1) - PICON (A.) -   L’invention de l’ingénieur moderne : l’École des ponts et chaussées.  -  1747-1851, Presses de l’École nationale des ponts et chaussées, Paris (1992).

  • (2) - BELHOSTE (B.) -   La formation d’une technocratie : l’École polytechnique et ses élèves de la Révolution au Second Empire.  -  Belin, Paris (2003).

  • (3) - PICON (A.) -   French engineers and social thought, 18-20th Centuries: an archeology of technocratic ideals.  -  Hist. Technol., 23, p. 197-208 (2007).

  • (4) - SHINN (T.) -   Des Corps de l’État au secteur industriel : genèse de la profession d’ingénieur, 1750-1920.  -  Rev. Fr. Sociol., 19, p. 39-71 (1978).

  • (5) - THOENIG (J.-C.) -   L’ère des technocrates : le cas des ponts et chaussées.  -  L’Harmattan, Paris (1987).

  • ...

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