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EnglishNOTE DE L'ÉDITEUR
Cet article est la mise à jour de l’article de même titre et du même auteur, publié par les Techniques de l’ingénieur en 2017.
RÉSUMÉ
En 2008 Satoshi Nakamoto définissait un nouveau modèle de monnaies, dont l'émission et la gestion s'opèrent sur un réseau pair-à-pair sans contrôle centralisé. Le Bitcoin qui est la première monnaie cryptographique créée sur ce modèle existe depuis janvier 2009. Il tient très bien. Comme les 7000 autres monnaies du même type créées à sa suite, il fonctionne grâce à une blockchain. C'est un fichier partagé et collectivement contrôlé par un réseau pair-à-pair. Il peut servir à bien d'autres buts que la création de monnaie. Une multitude d'applications sont, grâce à cette technologie, étudiées et mises en place progressivement, en particulier dans le monde des banques et de la finance.
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Jean-Paul DELAHAYE : Professeur émerite à I’université de Lille, Centre de recherche en informatique, signal et automatique de Lille (CRISTAL), UMR CNRS 9189, France
INTRODUCTION
La cryptographie mathématique a acquis une maturité remarquable depuis la Seconde Guerre mondiale. En même temps, les progrès dans la conception et la réalisation matérielle des réseaux informatiques ont conduit à en concevoir fonctionnant sans centre principal de commande : les réseaux pair à pair. Ces deux éléments associés à la puissance de calcul et de mémorisation dont chaque machine dispose aujourd’hui ont rendu possible la conception de nouveaux moyens de paiement qui ne ressemblent à aucun autre et sont susceptibles de bouleverser l’économie et la finance, voire bien d’autres secteurs d’activité.
Fin 2008, l’énigmatique Satoshi Nakamoto – c’est un pseudonyme – publie sur les réseaux un texte décrivant comment il est possible de mettre en place un système d’échange d’unités monétaires (qu’il nomme les bitcoins) qui n’a besoin d’aucun contrôle centralisé pour fonctionner, contrairement à toutes les monnaies usuelles émises par les banques centrales et à tous les systèmes de paiement en ligne. Le 3 janvier 2009, les programmes nécessaires au lancement de cette première « crypto-monnaie » sont prêts et elle est créée. Après des débuts confidentiels où seuls quelques experts en cryptologie connaissent son existence et s’y intéressent, elle se met à prospérer. Son cours, dérisoire en 2009, prend son envol, lui donnant une réalité concrète. Début 2013, un bitcoin vaut une dizaine d’euros. L’année 2013 est celle du décollage du bitcoin qui acquiert alors une notoriété mondiale. Il voit son cours multiplié par 50 en un an, pour atteindre 580 euros, le 1er janvier 2014. Après une période d’hésitations et de baisses qui dure deux ans, il repart à la hausse et le 1er janvier 2017, il s'échange contre 885 euros. L'année 2017 est une année folle qui le conduit le 17 décembre 2017 à 16 870 euros. Il est depuis redescendu et oscille autour de 11 000 euros (11 130 euros le 27 octobre 2020 par exemple). Contrairement à ce qui avait été annoncé par de nombreux analystes hostiles à cet étrange objet numérique souvent mal compris, le bitcoin se maintient somme toute assez bien même si c'est avec des à-coups imprévisibles et inquiétants. Aujourd’hui, la capitalisation totale des 18,5 millions de bitcoins émis dépasse 206 milliards d’euros (le 27 octobre 2020).
À partir de rien, la cryptologie mathématique et la technologie réseau ont donc créé des devises numériques qui s’échangent contre de l’argent sonnant et trébuchant, permettant par exemple à un étudiant norvégien – Kristoffer Koch – qui avait acquis pour 25 euros de bitcoins en 2009, d’en revendre une partie pour s’acheter un appartement au centre d’Oslo. Plusieurs milliers de crypto-monnaies, copiant plus ou moins le bitcoin ont été introduites, mais le bitcoin reste très largement dominant : sa capitalisation représente 65 % environ de la capitalisation de toutes les crypto-monnaies.
L’idée de cette monnaie est que, grâce à un subtil agencement de protocoles cryptographiques, on peut émettre une monnaie dont le contrôle se fait collectivement sur un réseau pair à pair, sans qu’aucune autorité ne dispose du pouvoir d’agir sur elle... et en particulier d’émettre de nouveaux bitcoins. Le protocole de Nakamoto a été rendu possible grâce aux fonctions de hachage cryptographique (qui assurent l’intégrité d’un gros fichier de comptes), aux protocoles de signatures à double clé (qui certifient que seul le détenteur d’un compte l’utilise), au concept de preuve de travail (qui organise un système d’incitation pour que de nombreux utilisateurs participent à la gestion et à la surveillance du système).
Ces primitives, convenablement assemblées, réalisent un dispositif numérique qu’on pensait impossible auparavant. La mise en place du protocole bitcoin doit aussi son existence à la puissance informatique dont chacun dispose et qui fait qu’avec son ordinateur personnel il peut contribuer à la surveillance de la monnaie bitcoin au travers d’un réseau pair à pair. Ceux qui le souhaitent peuvent télécharger des logiciels open source et participer à la surveillance de la monnaie bitcoin, c’est-à-dire vérifier que personne ne crée des bitcoins non prévus par le protocole, et que toutes les transactions se déroulent conformément aux règles définies au départ par Nakamoto (ces règles peuvent évoluer, mais seulement lentement, et à la suite de sortes de votes où seuls participent ceux qui contribuent collectivement à sa gestion).
Le registre des comptes qui détient une trace de chaque transaction entre comptes bitcoin depuis 2009 se nomme la blockchain. Chaque nœud principal (ou nœud validateur, ou « full node ») du réseau (c’est-à-dire participant à sa gestion) en détient une copie et c’est cette information partagée, indestructible et infalsifiable qui assure la sécurité des comptes. Il y a aujourd’hui environ 10 000 nœuds principaux. Personne ne peut manipuler un compte, personne ne peut créer d’autres bitcoins que ceux prévus par le protocole qui, grâce à cette blockchain, engendre et maintient la confiance des utilisateurs. Ce succès a conduit à envisager d’autres applications de telles blockchains. On les utilise pour mémoriser et garantir les informations d’un cadastre, pour enregistrer les données sur la localisation d’œuvres d’art, pour détenir et garantir l’authenticité des listes des diplômes délivrés par des écoles et des universités et qu’on souhaite rendre consultables par tous, pour organiser toutes sortes de transactions, jeux, votes ou paris, etc. De tels fichiers partagés et collectivement surveillés semblent fournir plus de garanties et de fiabilité que les méthodes traditionnelles à base de tiers de confiance (un opérateur central qui détient le fichier doit le mettre à jour, le sécuriser et le rendre accessible, partiellement le plus souvent). C’est la raison d’un intérêt croissant depuis 2012 pour cette technologie des blockchains directement inspirée du bitcoin. Notons qu’elle n’en dépend pas et s’en éloigne souvent, tant les variantes sont nombreuses et s’ajustent à des applications variées et innovantes.
Dans ce texte nous avons utilisé des extraits de textes publiés par nous précédemment au sujet du bitcoin et des blockchains (voir https://www.cristal.univ-lille.fr/profil/jdelahay#page4. Le texte ici proposé est cependant une synthèse nouvelle et originale d’informations et une mise à jour aussi précise que possible à la date du 27 octobre 2020 sur ce sujet en évolution rapide.
VERSIONS
- Version archivée 1 de mars 2017 par Jean-Paul DELAHAYE
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BIBLIOGRAPHIE
-
(1) - ANTONOPOULOS (A.) - Mastering Bitcoin: unlocking digital cryptocurrencies. - O’Reilly Media, Inc. (2014 et 2018).
-
(2) - ANTONOPOULOS (A.) - Mastering ethereum: building smart contracts and dapps. - O’reilly Media (2018).
-
(3) - DELAHAYE (J.-P.) - Comment déjouer les points faibles du Bitcoin, - The Conversation, Décembre 2019. https://theconversation.com/comment-dejouer-les-points-faibles-du-bitcoin-126875.
-
(4) - DELAHAYE (J.-P.) - Mathématiques et mystère. - Éditions Belin, [Trois chapitres consacrés respectivement au bitcoin, aux blockchains, aux preuves de travail (2016).
-
(5) - DELAHAYE (J.-P.) - Du bitcoin à Ethereum : l’ordinateur-monde, - Pour la science, pages 104-109, novembre 2016.
-
(6) - DELAHAYE...
DANS NOS BASES DOCUMENTAIRES
ANNEXES
[BBU] The 184 Billion BTC Bug : https://news.bitcoin.com/bitcoin-history-part-10-the-184-billion-btc-bug/ (page consultée le 27 juin 2020)
[BLN] Lightning-Network : https://bitconseil.fr/bitcoin-lightning-network-histoire-fonctionnement/ (page consultée le 27 juin 2020)
[BNS] Bitcoin Network Shaken by Blockchain Fork : http://bitcoinmagazine.com/3668/bitcoin-network-shaken-by-blockchain-fork/ (page consultée le 27 juin 2020)
[CEV] Vulnerabilities : CVE-2010-5139 https://en.bitcoin.it/wiki/Common_Vulnerabilities_and_Exposures#CVE-2010-5139 (page consultée le 27 juin 2020)
[CHOI] Choisir votre portefeuille bitcoin : https://bitcoin.org/fr/choisir-votre-porte-monnaie (page consultée le 27 juin 2020)
[DEL] Bitcoin, Blockchains, Cryptomonnaies : https://www.cristal.univ-lille.fr/profil/jdelahay#page4 (page consultée le 26 juin 2020)
[PEO] 927 People Own Half Of All Bitcoins : http://www.businessinsider.com/927-people-own-half-of-the-bitcoins-2013-12 (page consultée le 27 juin 2020)
[PLA] Plateforme d’échange bitcoin : https://bitcoin.fr/acheter-bitcoin/ (page consultée le 27 juin 2020)
[STA] Stablecoins : https://www.bilan.ch/opinions/yves-bennaïm/stablecoins-cryptomonnaies-stables...
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