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Valérie PESEUX : Docteur en histoire des techniques du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)
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Les procédés du « cinéma traditionnel » (ensemble des procédés, habituellement employés et normalisés, permettant d’enregistrer photographiquement et de projeter des vues animées) ont été exposés dans l’article précédent Restitution d’images sur grand écran- Cinéma traditionnel. Les différents formats du cinéma « professionnel » (35 mm, Scope, formats panoramiques, Super 35, 70 mm) et du cinéma « substandard » (8 mm, Super 8, 9,5 mm, 16 mm, Super 16, 17,5 mm) ont été décrits, et l’évolution technique du numérique abordée. Dans cette deuxième partie, nous consacrons essentiellement notre propos aux procédés du cinéma à grand spectacle. Rappelons que la notion de cinéma à grand spectacle est employée ici en tant que volonté de créer un effet sensationnel qui amplifie la projection et le sujet du film, alors qu’habituellement, elle s’entend avec le déploiement de moyens financiers particuliers pour donner à voir une mise en scène fastueuse où se pressent figurants et vedettes.
Les formats spéciaux (formats et procédés du cinéma non traditionnel) regroupent à la fois les formats larges et les procédés panoramiques, hémisphériques, circulaires, stéréoscopiques, dynamiques et olfactifs. Recherchés depuis la naissance du cinématographe (1895), ils ont été conçus afin de parvenir à une représentation cinématographique saisissante de « réalité », au moyen d’images gigantesques ou tridimensionnelles, de sons multiples, ou de conception de salles et d’écrans originaux. L’impression de réalité spécifique au cinéma se manifeste principalement par l’illusion du mouvement et de la profondeur. Les formats spéciaux tendent à reproduire, quant à eux, une image « plus vraie que nature ». Cette recherche se réfère en général aux cinéastes qui subordonnent la représentation filmique à la restitution la plus fidèle possible d’une supposée vérité, mais qui s’éloigne en fait des conventions du cinéma traditionnel [1].
Notre volonté à présent est de décrire les inventions et les innovations développées, pour certaines, au cours de l’Histoire. Cependant, pour des raisons de complexité technique et d’informations non exhaustives, les procédés du cinéma en relief et ceux du cinéma olfactif ne seront pas cités. Ils mériteraient pourtant un approfondissement dans un article à lui seul. Ainsi, les formats spéciaux, tant au stade de prototypes qu’à celui des produits commercialisés, seront présentés et leurs principes explicités. Les impératifs d’ordre technique, esthétique et physiologique seront également abordés pour considérer les atouts et les handicaps de ces techniques.
Le sommaire de notre étude témoigne de la richesse créative et de la volonté originelle des inventeurs, artistes et promoteurs de concevoir des dispositifs novateurs s’appliquant à reproduire au cinéma les sens du spectateur, cela afin de le placer « au cœur de l’image ». Ces procédés supposent cependant une mécanique complexe et des choix optiques et de sources de lumière adaptés.
L’objectif essentiel de cet article, qui a vocation à être un outil de travail et de décision appréciable, est de fournir au lecteur (technicien, ingénieur, entrepreneur de spectacle, projectionniste, directeur de salle, universitaire ou étudiant) des informations lui permettant de faire un état des lieux rapide sur les tentatives, au fil de l’Histoire, en matière de « cinéma à grand spectacle ». À l’origine de nombreux procédés, le 70 mm est le format clé de la société canadienne Imax Corporation, leader sur le marché de l’écran large avec l’Imax (projection sur écran géant plat) et l’Omnimax (projection sur écran géant hémisphérique). De nos jours, la France accueille deux sites où ces projections sont à l’honneur : la Planète Futuroscope à Poitiers et la Géode à la Cité des sciences et de l’industrie de la Villette à Paris. Reflets des « techniques de l’avenir » (pour certains), ils symbolisent la tendance actuelle au grand écran.
L’auteur tient à remercier les personnes suivantes, pour l’aide qu’elles lui ont apportée dans la réalisation de ce document : Jean‐Luc Audy, Marie-Pierre Frère et Patrice Juin de la Planète Futuroscope ; Jean‐Luc Jacques et Corinne Licoppe de la Géode.
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3. Projection multiple et panoramique
3.1 « Triptyque » d’Abel Gance (1927)
Cinéaste français de renom, Abel Gance est considéré comme un pionnier du cinéma français. Novateur et poète dans l’âme, il s’ingénie à explorer les ressources esthétiques de l’outil cinématographique [42]. Convaincu de la nécessité de révolutionner le cinéma traditionnel, il met au point en 1926 une invention artistique qui préfigure la projection sur écran géant des années 1950, et notamment le Cinérama [2].
Dans son film Napoléon vu par Abel Gance, il renouvelle la richesse expressive de l’image par l’emploi d’une triple projection [43]. Animé par la volonté de parvenir à une représentation audacieuse et de s’évader des limites de l’écran, Gance emploie à la prise de vues, un dispositif synchronisé de trois caméras Parvo L, fourni par les Établissements Debrie. À l’Opéra (1927), un dispositif synchronisé de trois projecteurs est installé [44]. Seul le moment le plus fort du film, le Départ de l’Armée d’Italie, est projeté sur un triple écran de 30 m [45]. L’impression produite sur les spectateurs est étonnante : les vues panoramiques et multiples sont saisissantes.
Malgré l’innovation marquante pour l’écriture cinématographique, le « triptyque » ne peut être développé [46]. Les producteurs et exploitants s’y refusent, la complexité technique de la triple projection et le coût d’installation d’un tel dispositif étant considérables. Enfin, l’avènement du cinéma sonore et parlant, avec le succès du film The Jazz Singer (1927), écarte toute autre innovation du cinéma traditionnel.
HAUT DE PAGE3.2 Polyvision et Protérama d’Abel Gance (1954)
Plus de vingt ans après le succès du triple écran, Gance, désireux de revendiquer la paternité du Cinérama, entre en compétition lors de la « course aux nouveautés ». Il est alors l’un des seuls à concevoir une nouvelle écriture cinématographique — verticale et horizontale —, adaptée à l’écran panoramique multiple [47], et à tenter une révolution...
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ANNEXES
1.1 Coûts de construction d’une salle en formats spéciaux
Le Kinémax au Futuroscope (équipement compris) a coûté l’équivalent de 6,8 millions d’euros.
Une salle Omnimax de type Géode s’élève entre 10,7 et 18,3 millions d’euros, selon les choix architecturaux.
La Géode de Paris (salle et équipement compris) a coûté l’équivalent de 19,8 millions d’euros.
La construction d’une salle Imax 3D coûte entre 6,8 et 7,6 millions d’euros.
Le pavillon de l’Imax 3D au Futuroscope a nécessité un investissement de 10,6 millions d’euros environ.
La salle Le Défi d’Atlantis au Futuroscope a représenté un investissement de l’ordre de 13,1 millions d’euros.
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