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Jacques BRISBOIS : Assistant du Chef du Département d’Évaluation de Sûreté à l’Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire
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Les installations nucléaires présentent des risques spécifiques dus aux rejets, en fonctionnement accidentel, de produits radioactifs dangereux dans l’environnement. La prise en compte de ces risques, lors de leur conception, est faite en s’appuyant sur le concept de défense en profondeur qui conduit à mettre en œuvre une série de lignes de défense indépendantes, de telle façon que le rejet de produits radioactifs ne puisse se produire que si l’on a une perte simultanée de plusieurs d’entre elles. Les études probabilistes de sûreté visent à évaluer la fréquence annuelle de destruction de ces barrières ainsi que les rejets de produits radioactifs associés et leurs conséquences sur la population environnante.
Bien que les premières études aient été effectuées en Grande-Bretagne dans les années 60-70, le développement de cette technique a débuté avec l’étude dirigée par le Professeur Rasmussen et publiée en 1975 . Cette étude, commandée par l’Atomic Energy Commission (AEC) américaine, visait à comparer les risques encourus par la population du fait des réacteurs nucléaires avec les risques industriels et naturels. En fait, il est apparu rapidement que les domaines d’application de cette étude étaient beaucoup plus larges, car elle permettait d’apprécier les composantes élémentaires du risque, et mettait donc en évidence les points forts et les points faibles de la conception des réacteurs nucléaires étudiés.
Cette étude suscita à l’époque beaucoup de critiques, car elle remettait en cause partiellement certaines méthodes déterministes de conception. Cela conduisit la Nuclear Regulatory Commission (NRC) à demander au Professeur Lewis d’effectuer une expertise de cette étude qui conclut que la méthodologie proposée était correcte, en estimant toutefois que les incertitudes étaient sous-évaluées, mais qu’en tout état de cause ce type d’étude était susceptible d’apporter des éléments importants d’appréciation de la sûreté.
En fait, ce n’est qu’après l’accident de Three Mile Island, en 1979, que le développement de cette technique a pris un essor considérable.
En 1994, une étude probabiliste de sûreté a été effectuée ou est en cours pour chaque centrale nucléaire de puissance dans le monde. Dans les étapes de ce développement, il convient de citer l’étude publiée par la NRC en 1990, portant sur l’évaluation des risques de cinq réacteurs américains et qui représente l’état de l’art de cette technique .
En France, Électricité de France et l’Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire ont effectué respectivement les études probabilistes de sûreté pour les réacteurs à eau sous pression d’une puissance électrique de 1 300 MW et de 900 MW . Compte tenu de la standardisation des réacteurs français, ces études couvrent en fait l’ensemble du parc nucléaire.
Bien que, dans leur principe, les études probabilistes de sûreté soient envisageables pour toutes les installations nucléaires ou chimiques, le développement de cette technique a porté essentiellement sur les réacteurs nucléaires, et plus particulièrement sur les réacteurs à eau ordinaire. On peut noter que des études de ce type ont été réalisées à l’étranger sur des réacteurs à haute température et à neutrons rapides.
Pour les réacteurs nucléaires, le relâchement des produits radioactifs ne peut se produire en quantités significatives que si l’on a, d’une part, une fusion du combustible et, d’autre part, une défaillance de la barrière de confinement. C’est pour cette raison que l’on distingue différents niveaux de l’étude :
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niveau 1 : fusion du cœur ;
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niveau 2 : relâchement des produits de fission ;
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niveau 3 : dommages sur le public (exprimés le plus souvent en termes de probabilité annuelle de mort ou de cancer par individu vivant à proximité de l’installation).
La présentation faite ci-après porte uniquement sur la méthodologie utilisable pour l’étude de niveau 1 qui fait l’objet d’un consensus international, alors que l’état de l’art des études de niveau 2 et 3 ne semble pas encore consolidé.
C’est aux États-Unis que le développement de cette technique est le plus avancé, notamment en ce qui concerne l’étude des agressions externes (incendie et séisme) ainsi que les études de niveau 2 et niveau 3. La NRC a en effet demandé à tous les exploitants nucléaires de réaliser des évaluations de risque incluant les agressions internes et externes pour leurs installations afin d’estimer leur vulnérabilité vis-à-vis des accidents graves et de proposer éventuellement des améliorations de conception et d’exploitation pour porter remède aux points faibles mis en évidence.
Ces études sont pratiquement terminées à l’heure actuelle et font l’objet d’une analyse par la NRC qui doit en tirer des conclusions génériques sur l’amélioration éventuelle du niveau de sûreté des réacteurs en exploitation.
Dans les autres pays industrialisés ayant un programme nucléaire, le développement de ces études se déroule en suivant le développement américain. Il est aujourd’hui reconnu que les réévaluations de sûreté des réacteurs nucléaires effectuées périodiquement devront s’appuyer sur des évaluations probabilistes.
Pour ce qui concerne les réacteurs nucléaires de la prochaine génération, les autorités de sûreté de tous les pays exigent maintenant qu’une étude de niveau 1 et quelquefois de niveau 2 ou 3 soit effectuée lors de la conception du réacteur avant le début de la construction. Cette étude doit être actualisée pendant la phase de réalisation et intégrée au rapport de sûreté.
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2. Conduite d’un projet
Une étude probabiliste de sûreté d’un réacteur nucléaire est une étude lourde et complexe, nécessitant des moyens humains importants pendant plusieurs années. Elle doit donc être conduite avec les méthodes de gestion d’un projet.
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Il est important de fixer précisément, dès le lancement du projet, les spécifications détaillées de l’étude qui ont des conséquences sur le type de modélisation retenue. Il convient de définir :
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la nature des résultats de base recherchés ;
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le besoin d’évaluer les incertitudes ;
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les utilisations envisagées, et en particulier les types d’études de sensibilité aux données utilisées ;
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le niveau d’informatisation ;
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les possibilités de modification de la modélisation.
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Il est important d’assurer une cohérence d’ensemble de l’étude, au niveau des hypothèses et des méthodes générales. Cela conduit à mener en parallèle les analyses des différentes séquences accidentelles. La solution qui semble la mieux adaptée consiste à décomposer le projet en phases distinctes.
Dans la phase préliminaire, on modélise le fonctionnement de l’installation (arbres d’événements, arbres de défaillance) et on effectue une préquantification qui permet notamment d’éliminer des séquences de probabilité trop faible.
À l’issue de cette phase, qui conduit à soulever des questions de toute nature, on effectue dans une deuxième phase les études nécessaires pour y répondre (études thermohydrauliques, analyse spécifique de l’expérience d’exploitation, essais sur simulateur, etc.).
Enfin, la quantification définitive est effectuée dans la phase finale.
Il est important que l’étude soit complètement documentée, de manière à conserver les approches qui ont été effectivement mises en œuvre pour résoudre les problèmes.
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Compte tenu de la complexité d’un tel projet, il est indispensable de mettre en place une procédure d’assurance qualité spécifique au projet. On peut distinguer trois niveaux d’assurance qualité :
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premier niveau : c’est...
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