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Pour Boeing, un sauvetage de SpaceX « embarrassant » et malvenu

Posté le par AFP

SpaceX à la rescousse de Boeing: l’image n’est pas flatteuse pour le géant aérospatial.

A cause des problèmes sur le nouveau vaisseau Starliner de Boeing, les deux astronautes qu’il devait ramener sur Terre rentreront finalement de la Station spatiale internationale (ISS) avec l’entreprise concurrente, dirigée par Elon Musk.

L’annonce représente un coup dur — voire une humiliation — pour Boeing, partenaire historique de l’agence spatiale américaine. Et elle ne pourrait pas plus mal tomber, au moment où la branche aviation du groupe est dans la tourmente à cause de dysfonctionnements en série sur ses appareils et deux crashs meurtriers en 2018 et 2019.

« Ce n’est pas une bonne période pour Boeing », euphémise Erik Seedhouse, professeur associé à l’université d’aéronautique Embry-Riddle, en qualifiant « d’embarrassant » le fait que SpaceX doive ramener l’équipage.

L’épisode « pose un problème d’image », et pourrait « mettre en danger de futurs contrats avec la Nasa », abonde Cai Von Rumohr, analyste aéronautique chez TD Cowen.

Mais malgré l’échec de cette mission, le statut et la taille de Boeing lui assurent de pouvoir rebondir.

« Boeing ne va pas s’en aller de si tôt », juge Glenn Lightsey, professeur à la Guggenheim School of Aerospace Engineering.

Le programme Starliner a certes déjà entraîné un surcoût de 1,6 milliard de dollars pour Boeing, à cause de multiples retards de développement et une hausse des prix dans la chaîne d’approvisionnement.

Mais ce montant est à rapporter au chiffre d’affaires de 24,93 milliards de dollars pour la branche Défense, Espace et Services (BDS) de Boeing en 2023 — 77,79 milliards pour le groupe au total.

– « Regagner la confiance » –

Rien ne montre par ailleurs que le vaisseau sera abandonné.

Malgré les retards accumulés, la Nasa n’a jamais désavoué Boeing, à qui elle avait commandé ce vaisseau en 2014, en même temps qu’un autre à SpaceX.

L’agence spatiale n’a depuis cessé de marteler son objectif: disposer de deux véhicules pour acheminer ses astronautes, afin de ne pas se trouver démunie en cas de défaillance de l’un ou l’autre.

« Si vous êtes une entreprise et qu’un sous-traitant (…) dépasse le budget, livre en retard et met la vie de vos employés en danger, la plupart des entreprises le congédieraient », a comparé Erik Seedhouse. « Mais pas la Nasa. »

Compte tenu du temps et des investissements déjà réalisés, tout annuler serait « encore pire », estime-t-il auprès de l’AFP. Et pour Boeing, « la seule manière de regagner la confiance des gens (…) est de réussir à refaire voler une mission, avec un autre équipage. »

L’entreprise estime d’ailleurs que les deux problèmes rencontrés par Starliner — fuite d’hélium et propulseurs défectueux — sont surmontables.

Ces soucis ne sont pas « si surprenants », acquiesce Glenn Lightsey, car le vaisseau en « est encore au début de son développement », avec seulement trois tests orbitaux, dont deux à vide. « Ce n’est qu’après environ cinq missions que l’on peut vraiment dire qu’on a vérifié tous les sous-systèmes », estime l’expert.

Donc « même si cela nécessite encore quelques vols, je ne pense pas que la Nasa les lâche », ajoute-t-il.

– Comparaison gênante –

La comparaison avec SpaceX n’en reste pas moins cruelle.

L’entreprise d’Elon Musk était largement vue comme l' »outsider » en 2014, et le montant de son contrat était moins élevé que Boeing (2,6 milliards de dollars, contre 4,2). Elle assure pourtant déjà le rôle de taxi spatial pour astronautes depuis quatre ans.

SpaceX partait certes avec une longueur d’avance, son vaisseau Dragon ravitaillant déjà l’ISS depuis 2012. Mais Boeing participe au programme spatial américain depuis des décennies.

Le groupe « était impliqué dans le programme Apollo » et « a construit certains modules de l’ISS », rappelle Erik Seedhouse. « Il est donc surprenant qu’en si peu de temps (…), ils soient passés du statut d’entreprise très performante à celui d’entreprise commettant des erreurs en série. »

Même si « une seule raison » ne peut pas tout expliquer, l’expert évoque les « problèmes de contrôle de qualité » soulevés « à la fois pour la branche spatiale et aérienne ».

Boeing est aussi intrinsèquement plus bureaucratique que SpaceX, où les décisions peuvent être prises plus rapidement, ajoute-t-il.

Attention toutefois au péché d’arrogance: dans un environnement spatial à haut risque, les rôles pourraient un jour s’inverser.

« Il y aura un moment dans le futur où SpaceX aura besoin d’aide », prédit Glenn Lightsey. Alors « Boeing pourra rendre la pareille ».

la/ube

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