Révolutionner l’humanité ou la détruire ? Les personnages du dramaturge Matthew Gasda, qui s’est inspiré d’OpenAI et de son fameux agent conversationnel ChatGPT, sont aux prises avec des questions existentielles sur la trajectoire de l’intelligence artificielle (IA).
« Doomers » (catastrophistes), qui se joue à New York à partir de vendredi dans plusieurs lieux successivement, se concentre sur l’épisode du renvoi, en novembre 2023, de Sam Altman de la start-up OpenAI, dont il est le patron.
Le conseil d’administration avait justifié sa décision par le manque de transparence du jeune dirigeant et sa volonté de développer l’IA à marche forcée, quitte à reléguer au second plan les questions de sécurité que pose cette technologie.
Après quelques jours de crise, marqués par une pression intense des actionnaires du groupe, dont Microsoft, Sam Altman a été rétabli dans ses fonctions et la quasi-totalité du conseil a été remplacé.
« Mon instinct dramatique s’est éveillé » en suivant cet épisode, se souvient Matthew Gasda, auteur avant-gardiste dont plusieurs pièces ont été remarquées sur la scène new-yorkaise alternative. « Au début, j’ai vu une bonne histoire, un personnage fascinant, avec beaucoup de secrets. »
« Mais une fois que j’ai commencé à faire des recherches, à rencontrer des gens du milieu », poursuit l’auteur, « j’ai compris qu’il y a quelques centaines de personnes qui avaient la conviction que le sort de l’humanité était entre leurs mains. C’est ça, le thème central de la pièce. »
Depuis le lancement de ChatGPT, en novembre 2022, l’IA s’invite régulièrement sur les planches, souvent incarnée par une créature technologique, robot humanoïde ou autre.
L’an dernier, « McNeal », avec l’acteur oscarisé Robert Downey Jr a été saluée pour son questionnement sur l’utilisation de l’IA dans le processus créatif.
Mais « Doomers » va plus loin en saisissant un instant crucial et médiatisé de la jeune histoire de l’IA pour en faire une réflexion sur son avenir, sur la collision entre technologie, utopie et argent, mais aussi sur le pouvoir.
Dans le premier acte, Seth, personnage figurant Sam Altman, fraîchement débarqué, assène à plusieurs cadres de sa start-up sa vision d’une progression inéluctable de l’IA, se moquant du malaise de certains collaborateurs.
La seconde partie met en scène les membres du conseil d’administration tourmentés par les conséquences de leur décision d’écarter Seth.
Dans les deux cas, la pièce, qui sera jouée en mars à San Francisco, n’offre pas d’issue, les personnages usant d’un échappatoire qui les éloigne de leurs interrogations.
« C’est tout à fait volontaire », explique Matthew Gasda. « L’idée, c’est qu’il n’y a pas de manière rationnelle d’appréhender les conséquences de tout cela. »
Le dramaturge a effectué plusieurs lectures avec des professionnels de l’IA pour s’assurer de la justesse technologique des dialogues et des situations.
Il observe que ses pièces attirent souvent le milieu de la tech et s’attend à ce qu’une partie des spectateurs de « Doomers » en soit issue.
Mais « j’essaie de m’adresser aux deux publics », connaisseurs et béotiens. « Je veux que les gens qui n’y pensent pas se mettent à y réfléchir. »
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