Le constructeur automobile japonais en difficulté Nissan est en voie de formaliser l’abandon de son projet de rapprochement avec son compatriote Honda, et pourrait se montrer ouvert à d’autres partenaires, selon une source proche du dossier et la presse financière.
« Les dernières conditions imposées par Honda ne sont pas acceptables pour Nissan (…) C’était presque un affront. Il faut l’officialiser, mais dans l’ensemble, c’est fini », a indiqué cette source jeudi à l’AFP, confirmant des informations de médias japonais.
« Le conseil d’administration (de Nissan) a donné mardi la direction » et la décision finale « est entre les mains des directeurs exécutifs » des deux constructeurs, a-t-il précisé.
Nissan avait indiqué mercredi dans une déclaration qu’il prévoyait de « se positionner et de faire une annonce vers la mi-février ». Le groupe publiera ses résultats trimestriels le 13 février.
D’après l’agence Kyodo, le PDG de Nissan, Makoto Uchida, a rencontré jeudi son homologue de Honda, Toshihiro Mibe, « pour lui signifier l’intention (de son entreprise) de mettre un terme aux pourparlers ».
Honda, géant japonais du secteur, et Nissan, son rival en sérieuses difficultés financières, ont ouvert en décembre des négociations en vue d’une fusion pouvant donner naissance au troisième constructeur mondial.
La perspective alors esquissée était de regrouper les deux groupes au sein d’une holding unique. Mais Honda, en position de force, a finalement réclamé de transformer Nissan en simple filiale.
Un scénario inacceptable pour Nissan, soucieux de préserver son autonomie. Le quotidien Nikkei a rapporté mercredi que Nissan préférait mettre un terme au projet, faisant dégringoler l’action du constructeur.
Le français Renault, qui détient quelque 35% du capital de Nissan, s’est dit mercredi déterminé à « défendre les intérêts du groupe et de ses actionnaires ».
-Complémentarité insuffisante-
L’objectif d’une fusion était d’associer les forces de Honda et Nissan, respectivement deuxième et troisième constructeurs japonais derrière Toyota, et même d’y associer un troisième constructeur, Mitsubishi, pour négocier le virage stratégique de l’électrique.
Un créneau dominé par l’américain Tesla et les constructeurs chinois, et où les constructeurs nippons, concentrés sur les hybrides, sont très en retard.
L’idée « flattait l’ego japonais, mais si on rentre dans les détails, Nissan et Honda partagent les mêmes difficultés et sont pratiquement face-à-face sur tous leurs marchés (Etats-Unis, Chine, Japon) », rendant peu évidentes les synergies et complémentarités, analyse la source proche du dossier.
Ce rapprochement était cependant perçu comme providentiel pour Nissan, massivement endetté et dont la marge opérationnelle a fondu.
Son bénéfice net s’est effondré de 94% au premier semestre de son exercice décalé, ses ventes plongeant sur ses deux marchés-clés: aux Etats-Unis, faute de commercialiser des hybrides rechargeables face à une forte demande, et en Chine, en raison de la domination des marques locales sur le tout-électrique.
Sous pression, il a annoncé en novembre supprimer 9.000 postes dans ses effectifs mondiaux et tailler dans ses capacités, pour réduire les coûts et relancer ses ventes.
Honda, dont la capitalisation boursière est cinq fois supérieure à celle de Nissan, avait posé comme préalable la concrétisation de ce plan de restructuration.
Désormais, Nissan va devoir « muscler ce plan, le détailler et le mettre en oeuvre », alors même que d’éventuelles barrières douanières imposées par Donald Trump pourraient perturber ses chaînes de production, souligne la source proche du dossier.
Nissan « devra d’abord résoudre (par lui-même) son problème d’efficacité opérationnelle » et ses difficultés structurelles, mais « il possède un vrai savoir-faire en matière de collaboration et est prêt » à rechercher d’autres alliés potentiels, insiste-t-il.
Quel serait le profil idéal? Le géant taïwanais de l’assemblage électronique Foxconn (Hon Hai) avait déjà approché Nissan à l’automne pour acquérir une participation majoritaire, selon la presse japonaise. Sollicité par l’AFP, il s’est refusé à tout commentaire.
De son côté, Bloomberg, citant des sources non identifiées, rapportait jeudi que Nissan était plutôt en quête d’un nouvel allié issu du secteur tech basé aux États-Unis, son principal marché.
La perspective d’un rebond rapide avec d’autres partenaires réconfortait les investisseurs, permettant à l’action Nissan de se reprendre avec vigueur jeudi, avec un gain de plus de 7%.
« Nissan a toujours besoin d’un partenaire solide, mais sa position de négociation est affaiblie par ses faibles perspectives de bénéfices et le repli de ses actions », ont commenté jeudi les analystes du cabinet CreditSights (Fitch Group). Ils pointaient aussi « le manque de clarté concernant l’avancement et l’issue de ses initiatives de redressement ».
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