La Fédération nationale d’agriculture biologique (Fnab) a appelé mercredi à « faire la transparence » sur les contaminations des cultures bio par le prosulfocarbe, un herbicide très volatil largement utilisé pour traiter les céréales.
Le mouvement a annoncé une « première mobilisation » sur le terrain jeudi après-midi devant la Direction départementale des territoires (DDT) de l’Yonne, à Auxerre.
Ce pesticide « contamine régulièrement des cultures non cibles comme le sarrasin qui, pour être à maturité, est récolté en automne, bien souvent au moment des traitements chez les agriculteurs non bios », explique la Fnab dans un communiqué.
« On nous avait promis l’an dernier une indemnisation avec la hausse des taxes sur les pesticides et finalement tout a disparu avec les mobilisations agricoles. On nous balade depuis quatre ans, ça ne peut plus durer », déplore Philippe Camburet, président de la Fnab et « producteur bourguignon de sarrasin contaminé ».
Autorisé en France depuis 1990, le prosulfocarbe est aujourd’hui la deuxième substance active la plus vendue, derrière le soufre et devant le glyphosate.
En 2023, l’agence de sécurité sanitaire Anses a imposé aux agriculteurs utilisant cet herbicide, employé notamment pour le blé et les pommes de terre, de respecter une zone tampon d’au moins 10 mètres avec les zones d’habitation et de diminuer les dosages, après une nouvelle évaluation des risques ne pouvant exclure un dépassement des seuils de sécurité pour les enfants.
Mais pour la Fnab, ces distances sont inopérantes du fait de l’extrême volatilité de cette substance, dont elle demande l’interdiction pure et simple.
« Aujourd’hui, si on veut que notre sarrasin soit collecté, on doit prouver qu’il n’a pas été contaminé en faisant faire à nos frais des analyses toxicologiques », explique Loïc Madeline, producteur de sarrasin bio en Normandie, cité dans le communiqué.
S’appuyant sur les données d’organismes certificateurs et de collecteurs, la Fnab affirme que depuis 2018 plus de 400 récoltes biologiques de sarrasin ont été contaminées par du prosulfocarbe. Entre 2020 et 2022, cela a représenté au moins 550 tonnes de sarrasin et une perte estimée à 550.000 euros pour les producteurs.
« Ces données ne concernent que des fermes au nord de la Loire, essentiellement en Ile-de-France et dans le Grand-Est. On ignore l’ampleur des contaminations au niveau national », a précisé Philippe Camburet à l’AFP.
« Cela pose clairement la question de l’avenir de la filière: aujourd’hui on produit 21.000 tonnes de sarrasin en France, dont 40% en bio. Faudra-t-il demain importer du sarrasin bio parce qu’on ne peut plus le produire en France ? », demande-t-il.
Au niveau européen, l’autorisation du prosulfocarbe a été prolongée jusque fin janvier 2027, le temps pour l’État chargé de réévaluer le produit, le Portugal, de terminer son travail.
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