Les aliments à base de soja -desserts, yaourts, lait, steaks végétaux, tofu et surtout biscuits apéritifs-, contiennent trop d’isoflavones, des substances végétales proches des hormones féminines aux effets potentiellement nocifs pour la santé, alerte l’Anses, qui recommande de ne pas en servir en restauration collective.
L’agence sanitaire invite aussi « les acteurs de l’agroalimentaire à revoir les techniques de production et de transformation du soja », afin de réduire les teneurs en isoflavones de leurs produits, dans un avis publié lundi, sollicité par les ministères de l’Alimentation et de la Santé.
Les isoflavones sont des phytoestrogènes, des substances végétales proches des hormones féminines (oestrogènes) présentes dans les légumes secs, les légumes, et principalement le soja.
Ils « peuvent interférer avec le fonctionnement hormonal physiologique, et donc conduire à des effets indésirables pour le système reproducteur », explique à l’AFP Aymeric Dopter, chef de l’unité d’évaluation des risques liés à la nutrition à l’Anses.
« Le soja étant la principale source d’isoflavones, l’Anses recommande de ne pas servir d’aliments à base de soja en restauration collective pour éviter une surconsommation », des crèches aux écoles, collèges, lycées, aux restaurants d’entreprises, Ehpad, hôpitaux et cliniques, donc pour « toutes les catégories d’âge ».
« Il ne s’agit pas de jeter l’opprobre sur le soja en tant qu’aliment, mais plutôt sur les teneurs en isoflavones que les produits au soja contiennent actuellement », précise M. Dopter. « En attendant d’avoir des sojas moins riches en isoflavones, il faut lever le pied sur la consommation de ces produits », résume-t-il.
– 100 fois plus dans les biscuits apéritifs –
L’Anses a tout d’abord défini pour la première fois, grâce aux connaissances scientifiques disponibles, des seuils toxicologiques en-dessous desquels il n’y a quasiment pas de risque pour la santé (« valeurs toxicologiques de référence »): ils sont de 0,02 mg par kg de poids de corps et par jour pour la population générale et 0,01 mg/kg pour les femmes enceintes et en âge de procréer ainsi que les enfants prépubères.
Puis elle a comparé ces valeurs aux niveaux d’exposition alimentaire de la population et constaté un « risque de dépassement » pour les consommateurs d’aliments à base de soja.
Ces seuils sont ainsi dépassés par 76% des enfants de 3 à 5 ans consommant des aliments au soja, 53% des filles de 11 à 17 ans, 47% des hommes âgés de 18 ans et des femmes âgées de 18 à 50 ans.
En conséquence, l’Agence conseille de « diversifier les aliments d’origine végétale, sachant que les légumes secs autres que le soja sont nettement moins riches en isoflavones ».
Elle s’adresse aussi aux industriels de l’agroalimentaire: si les teneurs en isoflavones dépendent de la variété de soja, des conditions de culture et du degré de maturité de la plante, il est possible de les réduire en utilisant certaines techniques agronomiques et procédés de fabrication.
Ainsi les teneurs en isoflavones peuvent varier du simple au double d’un dessert au soja à l’autre, et il y en a 100 fois plus dans les biscuits apéritifs à base de soja que dans la sauce soja. En effet, ces derniers « sont faits avec de la graine de soja toastée, qui va concentrer les isoflavones, alors qu’une fois bouillie la graine va les perdre en partie », détaille Perrine Nadaud, adjointe de M. Dopter.
« Dans la préparation des produits du soja, que ce soit par lavage, trempage, toute une série d’opérations, des techniques traditionnelles en Asie permettent de réduire les teneurs de ces isoflavones », complète-t-elle, ainsi qu’en amont, « la sélection des variétés, la localisation, le degré de maturation de la graine ».
L’Anses va maintenant partager ses valeurs toxicologiques de référence avec ses homologues européens.
Son avis contribuera à la révision de l’arrêté relatif à la qualité nutritionnelle des repas en restauration scolaire – le texte en vigueur, datant de 2011, devant être remis à jour.
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