Le Royaume-Uni espère obtenir, à la dernière minute, un accord économique avec Washington afin d’éviter – ou au moins d’atténuer – les « droits de douane réciproques » promis pour le 2 avril par Donald Trump, potentiellement sur les importations américaines du monde entier.
– Où en sont les discussions?
L’idée d’un accord économique remonte a la visite du Premier ministre Keir Starmer fin février à Washington, lors de laquelle Donald Trump a attisé les espoirs britanniques, évoquant un accord « dans lequel les droits de douane ne seraient pas nécessaires ».
Les discussions se sont poursuivies depuis, notamment avec la récente visite aux Etats-Unis du ministre britannique du Commerce Jonathan Reynolds.
Elles se sont intensifiées depuis l’annonce mercredi de nouvelles taxes de 25% sur les importations américaines de voiture et se poursuivront ce week-end.
« Nous travaillons d’arrache-pied », a assuré vendredi Keir Starmer dont le gouvernement travailliste, au pouvoir depuis juillet, prend soin d’éviter toute critique à l’encontre de l’Américain.
– Quel enjeu pour le Royaume-Uni?
Selon l’organisme public de prévision budgétaire, l’OBR, des droits de douane de 20% sur les importations américaines du monde entier réduiraient le PIB britannique de 0,6% d’ici 2026.
Avec un effet direct sur les finances publiques au moment où le gouvernement vient d’annoncer des coupes dans les aides sociales.
La situation est problématique pour le secteur automobile britannique dont les Etats-Unis sont le deuxième marché d’exportation.
L’industrie sidérurgique est elle déjà visée par des droits de douane, contre lesquels Londres n’a pas riposté, contrairement à l’Union européenne, tout en affirmant « garder toutes les options sur la table ».
Le Royaume-Uni ne « souhaite pas faire quoi que ce soit qui puisse intensifier ces guerres commerciales », a expliqué la ministre des Finances Rachel Reeves. Surtout avec les Etats-Unis, son deuxième partenaire commercial après l’UE.
– A quoi ressemblerait un accord?
Keir Starmer évoque un « accord économique » pour « atténuer » les taxes douanières pas forcément les supprimer toutes.
Un accord pour « échapper à certains droits de douane est possible » mais « il ne s’agirait pas d’un accord commercial à part entière », relève Jonathan Portes, économiste au King’s College de Londres.
Il ne s’agit pas ici de discussions classiques, souvent très techniques et sur plusieurs années, pour faire baisser les droits de douane, mais d’échanges dans un laps de temps très court afin d’éviter une escalade.
« Au mieux, nous pouvons nous attendre à quelques concessions britanniques en échange de la non-application » de certaines taxes, explique à l’AFP David Henig, du Centre européen pour la politique économique internationale.
– Que pourrait concéder le Royaume-Uni?
La tech est sur la table des négociations: selon la presse britannique, Londres songe à revenir sur sa taxe sur les services numériques (800 millions de livres par an), une décision qui ravirait les puissants patrons américains alliés à Donald Trump.
Cet impôt « n’est pas quelque-chose d’immuable ou dont on ne pourrait jamais discuter », a concédé le ministre Jonathan Reynolds.
« Si Trump tient sa parole et que le Royaume-Uni retire des avantages significatifs, l’élimination d’une taxe pourrait être une bonne affaire », reconnaît David Henig. « Il s’agit toutefois d’un véritable pari. »
Plus direct, Jonathan Portes considère qu' »étant donné que les promesses de Trump ne valent rien, il semblerait très insensé de réécrire la politique fiscale ».
– Londres peut-il dire merci au Brexit?
Outre le traité majeur avec Bruxelles, le Royaume-Uni est parvenu depuis le Brexit à négocier quelques accords commerciaux (Singapour, Australie, Japon, partenariat transpacifique).
Il rêve depuis toujours d’un accord avec Washington, même limité, que les Européens n’ont jamais obtenu.
« Le Brexit est une arme à double tranchant: il donne plus de flexibilité et permet au Royaume-Uni de négocier en fonction de ses intérêts. Mais il signifie également qu’il a moins de poids », explique Jonathan Portes à l’AFP.
En outre, « il existe un risque majeur » qu’un accord « soit perçu négativement par les Européens », souligne David Henig. « Le Royaume-Uni devra agir très prudemment. »
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