Fraises, avocats, tequila, ou encore carburants et produits électroniques: le porte-monnaie des Américains devrait souffrir dès l’application des nouveaux droits de douane infligés par l’administration Trump au Mexique, au Canada et à la Chine.
« Le consommateur va très probablement constater un effet dans les deux ou trois prochains jours », a expliqué Brian Cornell, patron de la chaîne de supermarchés Target, sur CNBC.
Les produits frais venus du Mexique, dont dépendent les Etats-Unis surtout en hiver, ont une « chaîne d’approvisionnement très courte » et donc les tarifs douaniers vont avoir un impact très rapidement, a-t-il relevé.
Selon le ministère américain de l’Agriculture, 72,5% des importations agricoles depuis le Mexique étaient constituées en 2023 de fruits et légumes (fraises, framboises, avocats, tomates, poivrons) et de boissons et spiritueux (bière, jus de fruits, tequila).
Le Budget Lab de l’université Yale a estimé que les droits de douane de 25% sur les importations mexicaines et canadiennes (10% pour les hydrocarbures canadiens) et la surtaxe de 20% sur les produits chinois devraient entraîner une hausse des prix de 1% à 1,2%, soit un surcoût annuel de 1.600 à 2.000 dollars en moyenne par foyer.
Ces droits de douane interviennent au moment où l’inflation s’était rapprochée de l’objectif de 2% de la Banque centrale américaine, après des pics jusqu’à 9,5% en rythme annuel du fait de la pandémie de Covid-19.
Mais experts, indicateurs et industriels continuaient d’évoquer la prudence persistante du consommateur face aux incertitudes macroéconomiques et géopolitiques mondiales.
– Véhicules –
L’industrie automobile devrait être particulièrement affectée. Les analystes de Bank of America craignent que ces tarifs n’entraînent « un choc dans la chaîne d’approvisionnement similaire au Covid ».
Matt Blunt, président de l’American Automotive Policy Council (AAPC) – représentant les constructeurs historiques Ford, General Motors et Stellantis -, considère que ces droits de douane vont « nuire à (la) compétitivité ».
Selon lui, devraient être exemptés les produits respectant les « stricts critères » de l’Accord Canada-Etats-Unis-Mexique (ACEUM), en vigueur depuis 2020.
Il semble avoir été entendu, en partie: la Maison Blanche a annoncé mercredi que « tous les véhicules importés dans le cadre de l’ACEUM » seraient exemptés pendant un mois.
« C’est un sursis bienvenu », a réagi Jessica Caldwell, du cabinet Edmunds, tandis que M. Blunt a salué cette décision.
En réaction, l’action de GM bondissait de 7,21% à la fermeture de la Bourse de New York et celle de Ford de 5,81%.
Si l’exemption n’était pas pérennisée, le surcoût atteindrait entre 4.000 et 10.000 dollars par véhicule assemblé en Amérique du Nord, a calculé l’Anderson Economic Group, sans intégrer de possibles taxes sur l’acier et l’aluminium.
« Le président Trump a beaucoup parlé de rendre l’industrie automobile américaine plus forte, de produire davantage ici, d’innover davantage », relevait récemment Jim Farley, patron de Ford. Mais, « jusqu’à présent, tout ce que nous constatons, ce sont beaucoup de coûts et de chaos ».
Pour Mme Caldwell, « il n’y a aucune échappatoire concernant le fait que les coûts supérieurs seront répercutés au final sur le consommateur ».
En janvier-février, 48,6% des véhicules neuf vendus chez les concessionnaires ont été fabriqués aux Etats-Unis, 17,4% au Mexique, 7,4% au Canada et 26,5% ailleurs, précise le cabinet Edmunds.
John Bozzella, président de l’Alliance pour l’innovation automobile, rappelle que les constructeurs, fabricants de batteries et autres fournisseurs investissent actuellement « des milliards » dans l’outil industriel américain mais « ne peuvent relocaliser (…) en une nuit ».
– Carburants –
Les tarifs vont aussi gonfler les prix à la pompe: jusqu’à 40 cents par gallon (3,78 litres) d’ici mi-mars, selon les régions, anticipe le site comparatif GasBuddy, prévoyant une hausse également du fioul domestique et du kérosène.
L’industrie aéronautique et de défense, premier exportateur net américain, examine « des stratégies d’atténuation pour minimiser l’impact », a indiqué Dak Hardwick, un dirigeant de l’Aerospace Industries Association (AIA).
Même chose pour le secteur de la construction puisque les nouveaux tarifs de 25% sur le bois canadien s’ajoutent aux 14,5% déjà existants pour certaines catégories.
Carl Harris, président de l’Association nationale des constructeurs américains (NAHB), relève que plus de 70% des importations des deux matériaux essentiels – bois et gypse (plâtre) – viennent du Canada et du Mexique.
Pour la chaîne de bricolage Home Depot, les droits de douane « ont toujours un gros impact sur (le) secteur » même si la « grande majorité » de ses produits proviennent des pays où sont situés ses magasins.
Pour les dirigeants de la chaîne de produits électroniques Best Buy, une hausse des prix est « hautement probable » mais la situation est « très fluctuante ».
Le ministre américain du Commerce Howard Lutnick a en effet indiqué mercredi que certains secteurs pourraient finalement être exemptés.
elm/bpe
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