Automobile: il faut revoir l'échéance de 2035 pour l'équipementier OPmobility

Il faut revoir l’interdiction des moteurs thermiques en Europe en 2035, sans quoi la production automobile sera fortement impactée, a prévenu vendredi le patron de l’équipementier OPmobility (ex-Plastic Omnium), Laurent Favre.

« On a eu une approche très dogmatique en disant qu’il fallait que 100% des voitures vendues en 2035 soient électriques » (à l’échappement), a lancé Laurent Favre. « Notre inquiétude, c’est que le marché s’effondre. Et c’est ce qui se passe. L’Europe a perdu 20 % de sa production depuis 2019 ».

« On est seulement à la moitié de l’objectif qui a été défini pour l’année 2025″ pour l’électrification des ventes de voitures neuves. Ca veut dire que quelque chose ne marche pas. On peut fermer les yeux. Mais quand le Titanic a vu l’iceberg, il était trop tard », a prévenu M. Favre depuis son siège à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine), en marge du Mondial de l’automobile.

De nombreux constructeurs ont averti en septembre que leurs résultats annuels seraient plus bas que prévu à cause d’un marché européen très faible, dans un contexte économique compliqué et avec des acheteurs hésitant à passer aux modèles électriques, encore trop chers.

Plusieurs constructeurs, ainsi que le lobby européen des équipementiers (Clepa), ont demandé à la Commission européenne une révision des objectifs d’émissions de CO2 à court terme, pour continuer à vendre des voitures thermiques plus longtemps. Mais sans toucher à l’objectif de 2035.

M. Favre constate « des impacts sociaux déjà très forts et d’autres à venir » sur l’industrie automobile si l’on ne revient pas sur cet objectif.

« Et si le marché continue à se tasser, ça fait autant de revenus en moins qui sont nécessaires pour investir dans des nouvelles technologies », engendrant une spirale infernale pour l’industrie européenne, selon lui.

Le groupe a déjà une « longue liste » de sous-traitants en difficulté: pris en étau entre l’inflation et la baisse du marché, « certains sont en train de mourir », selon M. Favre.

Début octobre, les difficultés d’un industriel italien, empêchant la livraison de pièces de radiateur, ont perturbé l’usine Stellantis de Sochaux (Doubs).

Depuis 2019, cette filière de sous-traitants a vu son chiffre d’affaires baisser de 10,1% et ses effectifs fondre de 17% en France, selon leur fédération (FIEV).

Les plus gros équipementiers comme OPmobility sont structurellement plus solides, avec des marchés hors d’Europe, souligne M. Favre.

– Hybrides rechargeables –

« Il vaut mieux remplacer le parc (actuel de voitures en Europe) par des voitures qui polluent trois fois moins que celles d’aujourd’hui, plutôt que d’essayer de vendre des voitures qui ne se vendent pas, qui sont à zéro gramme de CO2, mais que les gens ne peuvent pas se payer », a poursuivi M. Favre, qui vient d’être renouvelé au conseil d’administration du groupe.

Il faudrait que l’Europe « s’ouvre à d’autres technologies », comme les hybrides rechargeables (avec un moteur à essence mais aussi un moteur électrique et une grosse batterie qu’on branche pour la recharger), quitte à contrôler électroniquement qu’ils roulent au maximum sans polluer – et donc sur la batterie.

OPmobility produit notamment des pare-chocs et des réservoirs mais le groupe pourrait remplacer à terme sa production de réservoirs en Europe (700 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2023) par des activités à l’étranger ou dans dans d’autres énergies comme l’hydrogène, assure M. Favre.

A l’image de BMW, Toyota, ou OPmobility, propriété de la famille Burelle, « tous les industriels qui ont un actionnariat stable et familial ont développé des multi-technologies, en se disant que le monde est multiple, que ses besoins sont multiples », souligne M. Favre.

Le chiffre d’affaires d’OPmobility a atteint 5,4 milliards d’euros au premier semestre, porté par les Etats-Unis. En Europe, le principal marché du groupe, l’activité est restée stable malgré la baisse de la production automobile.

tsz/abb/nth