La victoire de Donald Trump aux élections présidentielles tient en partie à son discours économique dirigé aux déçus de la mondialisation. Son plan de relance économique et de protectionnisme vise à « rapatrier aux Etats-Unis les emplois et les capitaux » partis à l’étranger.
C’est par une vidéo de 2 minutes 30 que Donald Trump a balayé le 22 novembre les principales mesures qu’il comptait prendre lors des 100 premiers jours de sa présidence.
Relance économique
Donald Trump l’a répété tout le long de sa campagne électorale, une de ses premières décisions sera le lancement d’un grand plan d’investissement dans les infrastructures pour rénover « les routes, les ponts, les ports et les aéroports ». Ce plan de relance – « Make America Great Again » – doit faire repartir la machine économique et reposer les bases du cercle vertueux de la croissance. Sur son site de campagne, le candidat calculait que pour chaque point de PIB investi, l’économie crée 1,2 millions d’emplois, estimant ainsi pouvoir généré pas moins de 18 millions de nouveaux emplois sur 10 ans (2 mandats présidentiels). Pour financer ce plan d’investissement massif (estimé au bas mot à 1 000 milliards de dollars), le Président mise sur des partenariats public-privé et des baisses d’impôts aux entreprises. C’est l’autre pilier de sa politique économique interne.
Baisses d’impôts
Le Tax Plan est l’un des sujets sur lequel Donald Trump a donné le plus de détails. Il consiste en une baisse massive d’impôts pour les entreprises et les particuliers. Les Américains n’auront plus que trois tranches d’impôts (voir tableau) et tout revenu annuel inférieur à 30 000 dollars (28 269 €) sera non-imposable. L’impôt sur les successions devrait également être supprimé.
Les entreprises devraient quant à elles voir leur taux d’imposition chuter de 35% à 15%, afin de convaincre les multinationales pratiquant l’optimisation fiscale de revenir au pays. Donald Trump propose d’accorder une seule grâce fiscale pour permettre de « rapatrier les profits détenus à l’étranger à un taux de 10% seulement ». Ce choc fiscal s’accompagnera de remise en cause des traités de libre-échange en vigueur ou en négociations.
TPP mort-né
Le Partenariat trans-pacifique (TPP, en initiales anglaises) sera le premier à faire les frais du changement d’administration américaine. « Dès mon premier jour à la Maison Blanche, je notifierai ma volonté de sortir du TPP », a expliqué Donald Trump dans sa vidéo. Ce traité de libre-échange a été signé en février 2016 par douze pays ayant une façade sur le Pacifique (Etats-Unis, Canada, Mexique, Chili, Pérou, Australie, Nouvelle-Zélande, Japon, Singapour, Vietnam, Malaisie et Bruneï) à l’exception notable de la Chine. Il représentait 40% de l’économie mondiale et visait à harmoniser les normes administratives, fiscales, et environnementales pour favoriser les échanges. Le chef du gouvernement japonais, Shinzo Abe, premier chef d’Etat à rencontrer Trump après son élection avait prévenu qu’un retrait des Etats-Unis rendrait le TPP vide de sens. Au risque de favoriser le projet concurrent porté par la Chine : le Regional Comprehensive Economic Partnership (RCEP). Il s’agit également d’un traité de libre-échange entre une organisation existante : l’Asean (Bruneï, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Myanmar, Philippines, Singapour, Thailande, Vietnam) et l’Australie, Chine, Inde, Japon, Corée du sud et Nouvelle-Zélande.
Le nouveau Président-élu souhaite remplacer ces traités de libre-échange par des accords commerciaux « équitables ». Faute de quoi Donald Trump a prévenu qu’il était prêt à rétablir des barrières douanières, « jusqu’à 45% pour les produits chinois ». Une promesse qui dépendra du Congrès très divisé sur la question. Les prérogatives du Président des Etats-Unis ne l’autorisent pas à imposer un taxe supérieure à 15%, et ce pendant 150 jours. Prolonger ce délai nécessiterait l’instauration de l’état d’urgence. Par ailleurs, il est plus que probable que de telles mesures seraient suivies des mêmes mécanismes de rétorsion en Chine contre les produits américains. Une perspective qui n’enchante guère les officiels chinois convertis au libéralisme économique. Le Président chinois, Xi Jinping, a d’ailleurs tenu a réaffirmé à Lima le 20 novembre la volonté de son pays « de continuer son intégration dans la mondialisation (…) en apportant plus d’ouverture à l’économie Asie-Pacifique ». La grande inconnue réside dans l’attitude du Congrès américain où les Républicains, majoritaires, sont très divisés entre partisans d’une ligne libérale d’une part et d’une ligne protectionniste d’autre part.
Inflation
La politique économique présenté par Donald Trump n’est pas sans risque. Le premier est qu’en augmentant fortement les investissements (plan de relance) tout en diminuant les recettes fiscales (baisse d’impôts), le budget risque de devenir fortement déficitaire et que la dette se creuse encore davantage — elle est estimée à 20 000 milliards de dollars, soit 106% du PIB. Un équilibre d’autant plus compliqué qu’avec l’instauration possible de droits de douane, les importations verront leur prix renchéri tirant l’inflation à la hausse. Se posera alors la question de la politique monétaire qu’adoptera la Réserve fédérale. La présidente de la FED, Janet Yellen, devrait être évincée par le Président qui n’a eu de cesse de critiquer les taux faibles qui alimentent la bulle économique. Pourtant, dans la stratégie de Trump, adepte du crédit, une hausse des taux directeurs semble très improbable selon les experts de Wall Street. Elle aurait comme conséquence une appréciation du dollar qui irait à l’encontre de l’objectif de réindustrialisation du nouveau Président. Une perspective d’argent bon marché visiblement appréciée par les marchés financiers en grande forme depuis l’annonce de l’élection de Trump. Le Dow Jones a ainsi pris 1 000 points en dix jours.
Romain Chicheportiche
Réagissez à cet article
Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous et retrouvez plus tard tous vos commentaires dans votre espace personnel.
Inscrivez-vous !
Vous n'avez pas encore de compte ?
CRÉER UN COMPTE