C’est le grand défi de la bioimpression : rendre les tissus fonctionnels pour pouvoir les implanter sur des êtres humains. “Il est beaucoup plus simple de réaliser un tissu qui ressemble à un tissu humain – une composition de cellules – que de faire un tissu avec une fonction” confie Christophe Marquette, coordinateur de la plateforme 3DFab de Lyon dont une partie des travaux concerne l’impression de peau pour grands brûlés. Cette fonction est par exemple la solidité du tissu ou encore son élasticité. Nous sommes encore loin des organes artificiels implantables sur l’humain, mais les réalisations récentes – au-delà de nos frontières – montrent que les travaux sont sur la bonne voie.
Des cœurs humains
La création d’un organe fonctionnel, à partir de cellules prélevées directement sur le patient, offre un espoir pour les personnes en attente d’une greffe. L’utilisation des propres cellules du futur hôte permettrait ainsi d’éviter les potentiels rejets d’une transplantation d’organe étranger. Deux cœurs de petite taille imprimés en 3D ont été dévoilés cette année.
Le premier, en avril, a été conçu par une équipe de recherche israélienne de l’université de Tel Aviv à partir de cellules souches. Pour concevoir l’encre, les scientifiques ont utilisé des cellules du tissu adipeux qu’ils ont reprogrammées en cellules souches pluripotentes induites, puis différenciées en cardiomyocytes (cardiaques) et endothéliales (vaisseaux sanguins). La matrice extracellulaire est transformée en hydrogel. Les deux types de cellules sont ensuite combinés séparément avec l’hydrogel pour réaliser l’encre destinée aux tissus cardiaques et de vaisseaux sanguins. Le réseau de vaisseaux est, selon les chercheurs, “encore limité”. L’évolution des techniques d’impression permettant leur réalisation avec précision pourrait changer la donne.
Le second, de l’entreprise américaine Biolife4D, est un mini-cœur fonctionnel. La société a mis au point une encre composée d’éléments de la matrice extracellulaire reproduisant les propriétés du cœur des mammifères. Des cellules sanguines ont été reprogrammées en cellules souches pluripotentes induites pour ensuite les différencier en cellules cardiomyocytes. Ces cellules ont été couplées à la bio-encre pour imprimer le cœur.
Des techniques de vascularisation
D’autres équipes de recherche travaillent quant à elles sur des techniques pour vasculariser les tissus et permettre leur fonctionnement. C’est le cas des scientifiques des universités de Rice et de Washington qui ont mis au point une technique s’appuyant sur la photopolymérisation, en utilisant des cellules vivantes et des hydrogels, pour imprimer des réseaux vasculaires complexes. Celle-ci permet de réaliser des réseaux vasculaires enchevêtrés complexes qui imitent les réseaux naturels pour le passage de fluides tels que l’air, le sang ou encore la lymphe. Pour démontrer leur technique, les scientifiques ont imprimé une petite poche d’air entourée de vaisseaux sanguins afin de montrer la robustesse des vaisseaux lors de la circulation sanguine. En se remplissant d’air et en se dégonflant, elle reproduit le mécanisme naturel d’un poumon.
Les scientifiques de l’institut Wyss de Harvard se sont penchés quant à eux sur une autre technique : “l’écriture sacrificielle”. Celle-ci consiste à imprimer des vaisseaux sanguins dans une matrice composée de tissus dérivés de cellules souches, puis à retirer l’encre pour laisser place à des canaux fonctionnels. L’équipe a réussi à créer du tissu cardiaque capable de battre de manière synchrone pendant sept jours.
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