Réélue à la tête de la Commission européenne, Ursula von der Leyen a déclaré devant les eurodéputés vouloir proposer « un nouveau Pacte pour une industrie propre au cours des premiers 100 jours » de son nouveau mandat. Celui-ci doit permettre d’orienter « les investissements vers les infrastructures et l’industrie, en particulier les secteurs à forte intensité énergétique. » Dans son discours, elle annonce sa volonté de créer des marchés pilotes dans tous les domaines, et notamment dans celui de l’acier propre dans le but d’accélérer la planification, les appels d’offres et les autorisations.
Il n’en fallait pas moins à l’industrie sidérurgique, à travers l’association européenne de l’acier Eurofer, pour proposer la mise en place de quotas minimums d’acier vert dans la production automobile grâce à l’instauration d’une nouvelle réglementation européenne. Avec une part représentant 17 % de la consommation d’acier en Europe, le secteur automobile pourrait en effet créer une demande en acier bas carbone. Cette proposition a suscité la contestation de l’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA) ; quant à l’industrie automobile allemande, elle estime que le problème ne provient pas d’un manque de demande en acier vert, mais au contraire d’un déficit de l’offre.
L’ONG militante belge T&E (Transport & Environment) n’est pas de cet avis. En se basant sur une étude réalisée à sa demande par la société de conseils britannique Ricardo, elle considère que « l’Europe sera en mesure de produire jusqu’à 172 millions de tonnes d’acier bas-carbone par an d’ici 2030. Cette quantité sera plus que suffisante pour répondre à la demande totale d’acier du secteur automobile, qui a consommé 36 millions de tonnes en 2022. L’étude montre également que la diminution du poids des véhicules réduira l’utilisation de l’acier dans le secteur de l’automobile au cours de la prochaine décennie. »
Un surcoût de seulement 57 euros par voiture en 2030
D’après les simulations réalisées par la société Ricardo, l’incorporation de 40 % d’acier produit avec de l’hydrogène vert, des fours à arc électrique ou de la ferraille recyclée ne coûterait que 57 euros de plus par voiture en 2030, par rapport à l’acier conventionnel. Et atteindre 100 % d’ici à 2040 entraînerait un surcoût de seulement 8 euros, en raison de la tarification du CO2 et de la baisse des coûts de production de l’acier vert. Mais pour atteindre ces objectifs, des milliards d’euros d’investissements vont devoir être mobilisés pour soutenir la production d’acier bas carbone et les producteurs devront avoir l’assurance de leurs débouchés. T&E appelle donc « les législateurs à contribuer à la création d’un marché pilote pour l’acier vert en Europe, en fixant des objectifs d’incorporation pour les constructeurs automobiles à partir de 2030. »
Plusieurs constructeurs se sont d’ores et déjà fixés des objectifs d’incorporer plus d’acier vert dans la fabrication de leurs véhicules. Par exemple, Volvo s’est engagé à utiliser 25 % d’acier recyclé d’ici à 2025, tandis que BMW prévoit d’en employer 50 % d’ici à 2030. De leurs côtés, Mercedes-Benz et BMW ont signé des accords avec la start-up suédoise H2 Green Steel (H2GS) pour s’approvisionner en acier faiblement carboné produit à partir d’hydrogène vert et d’électricité provenant de sources d’énergie 100 % renouvelables.
La production d’acier est une opération à forte intensité énergétique, car elle implique la séparation du fer et de l’oxygène, qui sont étroitement liés dans les minéraux à l’état naturel. Historiquement, son processus de fabrication par la voie des hauts-fourneaux à oxygène (BF-BOF) repose sur l’énergie provenant de la combustion du charbon, une méthode qui libère du CO2 et représente encore un peu plus de la moitié de la production européenne d’acier. Bien que l’industrie sidérurgique ne représente que 6 % des émissions de l’UE, elle est le plus gros émetteur du secteur industriel, responsable de près d’un quart des émissions industrielles européennes.
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