Un vélo à hydrogène consomme trois fois plus d’électricité qu’un vélo à batterie. Il faut en effet produire l’hydrogène par électrolyse (où alors à partir de gaz fossile), puis le compresser et le stocker avant de le faire passer dans la pile à combustible qui utilise du platine, un élément rare. Affirmer qu’il s’agit d’une solution écologique est donc discutable car il faut multiplier par trois les capacités solaires, éoliennes ou nucléaires. Mais les promoteurs de l’hydrogène mettent en avant que le vélo à hydrogène Bhyke peut être rechargé « en une minute » et qu’il a une autonomie « de 100 kilomètres ».
Or échanger une batterie vide de vélo par une autre chargée, cela prend aussi 1 minute. C’est très simple à faire. Et un vélo électrique coûtant 10 à 20 fois moins cher que les Bhyke peut tout à fait avoir une autonomie de 100 kilomètres. «Les batteries procurent en général une autonomie d’une centaine de kilomètres, très variable selon l’usage, le terrain, le poids du conducteur et le mode d’assistance sélectionné» explique le journaliste Nicolas Valeano dans le magazine « Flottes automobiles » n°240 de juillet 2018 dans un article intitulé «Les vélos à assistance électrique : une solution sûre et efficace». Chercher à faire croire que seuls les vélos à hydrogène permettent d’atteindre une autonomie de 100 kilomètres serait tout simplement mensonger. Le vélo à hydrogène, dans sa version actuelle, est déjà particulièrement volumineux. Il faudrait qu’il le soit encore davantage si l’on voulait doubler son autonomie et la porter à 200 kilomètres. Et il est tout à fait possible d’un point de vue théorique de développer des vélos électriques ayant une telle autonomie.
100 kilomètres à 20 km/h en moyenne, c’est une ballade de 5 heures, soit assez pour la plupart des utilisateurs. Par conséquent il n’est pas nécessaire de charger la batterie ou de changer de batterie durant une promenade ordinaire. Il est rare qu’un touriste à vélo veuille parcourir 500 kilomètres en une journée. Il n’y a donc aucun avantage objectif à recourir à la très coûteuse et particulièrement inefficiente solution hydrogène.
«Pour financer des expérimentations hasardeuses il y a un pognon de dingue, et pour le plan vélo ?» a interrogé un cycliste, précisant que l’altitude moyenne de Saint-Lô est de 50 mètres et que le secteur est relativement plat. «C’est pourtant simple à comprendre : l’hydrogène est particulièrement énergivore à produire. Et tout ça pour faire fonctionner 15 vélos (sur du plat, l’altitude moyenne de Saint-Lô est de 50 mètres). Encore une écoloTartufferie ! Pas besoin d’hydrogène !» a-t-il ajouté. Un autre cycliste, qui a osé faire preuve d’esprit d’analyse, lui a répondu: «Oui mais si pas de vélo à hydrogène, alors pas d’innovation, pas de presse et pas de touristes qui se pressent pour découvrir la grande nouveauté de la ville».
«Une méthodologie spécifique, basée sur des approches qualitatives (entretiens avec les usagers), sera mise en œuvre au cours de ce projet afin de mieux comprendre en quoi la mobilité par le vélo à hydrogène répond à des besoins effectifs, en quoi elle ouvre de nouveaux horizons de déplacement» précise le magazine du conseil départemental de La Manche.
Les subventions apportées au projet se composent de la manière suivante selon le magazine normand: subventions ADEME : 337 981 €, subvention conseil départemental de la Manche : 75 748 €, subvention Agglomération de Saint-Lô : 50 000 €, subvention Cherbourg-en-Cotentin : 50 000 €, subvention Région Normandie : 50 000 €, subvention Région Aquitaine Limousin Poitou-Charentes dans le cadre de l’accompagnement au développement de la Société Pragma : 18 000 €. Ce qui fait un montant global de subvention de 581 729 €, plus d’un demi million d’euros, pour 20 vélos à hydrogène. C’est le montant total du projet hors-taxes. La contribution des industriels est par conséquent vraiment symbolique. C’est le contribuable qui trinque.
A Chambéry (Savoie) des vélos à hydrogène ont été couplés avec une minuscule portion de route solaire, un système photovoltaïque extrêmement coûteux et dont la production et la durée de vie sont particulièrement faibles comparativement au solaire classique. A croire que la France, larguée face à l’Asie (et l’Amérique) dans le domaine des batteries et du photovoltaïque standard, cherche à battre le record du monde de l’inefficacité énergétique. L’échec du Minitel n’aura donc pas encore servi de leçon.
Un vrai plan vélo en France, c’est pour quand ? D’après Le Parisien il serait en train de se dégonfler. Il a été reporté à l’automne, un report qui inquiète les associations de promotion de la bicyclette qui rappellent qu’à ce stade la seule mesure qui a été prise par le gouvernement est le durcissement des conditions d’obtention d’un vélo électrique. Pour Olivier Schneider, le président de la Fédération des usagers de la byclette (FUB) dont les propos ont été rapporté par le Nouvel-Obs, c’est «le signe que le ministère de la Transition écologique ne parvient pas à convaincre Bercy et Matignon de l’intérêt de mettre en place une vraie politique publique en faveur du vélo».
Selon l’appel lancé par 200 Députés en faveur d’un vrai plan vélo au royaume de la voiture diesel, en France la part modale du vélo est de moins de 3%, contre 26% aux Pays-Bas, 19% au Danemark et 10% en Allemagne. A titre d’exemple rares sont les enseignants français qui se rendent à l’Ecole primaire, au Collège ou au Lycée à vélo. La grande majorité d’entre eux réside pourtant à moins de 10 kilomètre du lieu de travail mais préfère néanmoins venir en voiture, donnant alors le mauvais exemple aux élèves. Les cours d’éducation à l’écocitoyenneté et à la santé sont alors sans substance concrète et purement théoriques. De son côté France-inter (service public) a diffusé le 13 août l’émission Le vélo, petite reine ou dictateur du milieu urbain ? En France le début du commencement de la révolution écologique n’est pas encore là.
Jean-Gabriel Marie
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