Le Cerema a publié une étude pour évaluer le gisement de chaleur fatale issue des eaux usées des stations d'épuration grâce à la cloacothermie. Alors que cette énergie est peu exploitée à l’échelle nationale, l'étude démontre qu'il est possible de récupérer un potentiel important de calories disponibles à partir de cette technique.
En France, plus de 20 000 stations d’épuration des eaux usées (STEP) sont recensées sur le territoire. Souvent situées à proximité des centres urbains, leur chaleur fatale peut être récupérée, puis réutilisée afin de faire face à des besoins et être consommée localement. Le gisement de chaleur issu des boues, par séchage puis incinération, a déjà été estimé par l’Ademe et évalué à 0,4 TWh par an. Dans le cadre d’un projet baptisé EnRezo, le Cerema a publié une étude pour évaluer le potentiel de récupération de la chaleur provenant de l’eau traitée.
La technique pour valoriser cette chaleur s’appelle la cloacothermie et peut être mise en œuvre à trois endroits différents : à l’intérieur des bâtiments ayant une forte consommation en eau, dans les collecteurs de réseaux d’assainissement ou en sortie de stations d’épuration. Par exemple, on estime que les eaux usées qui circulent dans les réseaux d’assainissement ont une température comprise entre 10 et 20 degrés. « En hiver, elles sont donc plus chaudes que l’air ambiant, ainsi les calories des eaux usées peuvent être récupérées et exploitées à partir d’une pompe à chaleur pour le chauffage de bâtiment, note le Cerema. De manière équivalente, en été, il est possible à partir du delta négatif de température de mettre en place un rafraîchissement de l’air du bâtiment considéré. »
En sortie de STEP, deux étapes doivent être mises en œuvre pour extraire la chaleur des eaux usées. La récupération des calories est d’abord réalisée grâce à un échangeur thermique qui contient un fluide caloporteur et qui permet de les transférer vers un réseau secondaire. Ces calories sont ensuite envoyées vers une pompe à chaleur et valorisées pour rehausser la température d’un autre circuit. Cette technique peut être assimilée à de la géothermie très basse énergie et est déjà éprouvée. Plusieurs installations existent en France, notamment à Amiens et Orléans pour alimenter des réseaux de chaleur, à Marseille et Bordeaux pour couvrir les besoins en chaleur et en froid via des boucles d’eau tempérée et enfin à Antibes pour alimenter un centre nautique.
Pour estimer le potentiel de chaleur fatale récupérable en sortie de STEP, le Cerema a pris en compte uniquement celles dont la capacité nominale est supérieure à 2 000 équivalents habitants. Au niveau national, le gisement a été estimé à 12,7 TWh et regroupe un total de 2 277 STEP. À noter que ce potentiel concerne uniquement la production de chaleur, car cette étude n’a pas évalué la capacité des STEP à fournir du froid.
Valoriser les gisements grâce à des réseaux de chaleur existants ou à développer
Deux approches ont ensuite été menées pour affiner ce potentiel. La première consiste à identifier les STEP situées à proximité de zones d’opportunités et dont le gisement permettrait d’alimenter des besoins en chaleur. Dans ce scénario, plusieurs critères ont été retenus dont l’un concerne la distance des STEP, qui ne doivent pas être situées à plus d’un kilomètre à vol d’oiseau de cette zone d’opportunité. Au final, le Cerema a identifié 318 STEP pouvant éventuellement alimenter un réseau de chaleur à développer et représentant un potentiel de 4,9 TWh/an.
La deuxième approche consiste à s’intéresser aux STEP disposant déjà de réseaux de chaleur existants et présentant une bonne densité thermique de raccordement. Pour cela, le Cerema a identifié les STEP situées à moins de 2,5 kilomètres à vol d’oiseau d’un réseau de chaleur existant et a simulé des tracés de raccordement. Au total, 151 STEP ont été identifiés et représentent un potentiel de production de chaleur de 5 TWh/an.
Alors que cette énergie est jusqu’ici peu exploitée à l’échelle nationale, cette étude permet de démontrer le potentiel important de valorisation de la chaleur fatale des eaux usées en sortie de STEP grâce à la cloacothermie. Le Cerema précise que « ces gisements ne sont pas simplement cumulables et correspondent à la fourchette haute d’un potentiel valorisable. » Par ailleurs, une étude approfondie sera nécessaire « pour évaluer la faisabilité de l’exploitation de ces gisements au cas par cas. »
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