À proximité de Pau, une unité de méthanisation couplée à une seconde de méthanation vont être construites pour valoriser les boues d'une station d'épuration. Objectif : produire dix types d'énergie et ressources locales issues des eaux usées et en synergie avec des infrastructures environnantes.
La communauté d’agglomération Pau Béarn Pyrénées va transformer son unité de dépollution des eaux usées située à Lescar en une biofactory. Grâce à la construction d’une unité de méthanisation couplée à une seconde de méthanation, le nouvel ensemble permettra de produire dix énergies et ressources locales issues des eaux usées et en synergie avec des infrastructures environnantes. Il s’agit de biométhane, méthane de synthèse, l’électricité verte, l’hydrogène, chaleur, biochar, azote, oxygène, eau réutilisée et culture maraîchères (ou aquaponie). Les travaux doivent débuter en début d’année prochaine pour une durée de 2 ans et se chiffrent à 33 millions d’euros. La construction et l’exploitation de ces équipements ont été confiées à un groupement mené par Suez et composé entre autres de Storengy, une filiale d’Engie.
Selon les porteurs de ce projet, deux premières technologiques mondiales vont être mises en œuvre sur le site. Ainsi, les boues vont subir un procédé d’ultra-déshydratation par carbonisation hydrothermale qui permettra de diviser par quatre leur volume en consommant 3 à 4 fois moins d’énergie qu’un sécheur thermique conventionnel, tout en réduisant les nuisances potentielles associées au séchage. Ce procédé, développé par Suez, « accroît sensiblement la production de biométhane et produit une nouvelle ressource matière supplémentaire, le biochar, valorisable soit par retour à la terre, soit par combustion pour la production d’énergie », détaille un communiqué de presse.
Cette carbonisation hydrothermale (ou HTC pour hydrothermal carbonization) est une technologie inspirée du procédé naturel de transformation de la matière organique en charbon. Elle consiste ici en un conditionnement thermique à haute pression et haute température des boues d’épuration digérées, grâce à la vapeur d’eau récupérée sur l’unité de valorisation des ordures ménagères située à proximité du site.
100 % du CO2 capté par l’unité de méthanation
Deuxième innovation technologique : un processus de méthanation catalytique va permettre de capter le CO2 émis par l’unité de méthanisation. Alors qu’il est habituellement rejeté dans l’atmosphère, ce CO2 sera couplé avec de l’hydrogène vert afin de produire du méthane de synthèse, qui a les mêmes caractéristiques chimiques que le biométhane. « La technologie innovante de méthanation catalytique, mise en place par Storengy pour la première mondiale au stade industriel sur une telle installation, permettra de transformer la totalité du CO2 émis en méthane de synthèse, gaz vert renouvelable », indique un communiqué.
L’hydrogène sera quant à lui fabriqué par électrolyse de l’eau à partir de l’électricité produite grâce à l’implantation de 12 000 m² de panneaux photovoltaïques à proximité immédiate du site. Le surplus d’électricité non utilisée par la méthanation sera réinjecté sur le réseau électrique pour alimenter la station.
Concernant le méthane de synthèse, la Communauté d’Agglomération Pau Béarn Pyrénées déclare avoir obtenu de la Commission de régulation de l’énergie une partie des dérogations nécessaires à l’injection du méthane de synthèse dans le réseau de gaz naturel et a sollicité auprès du ministère de la Transition écologique l’octroi des autorisations complémentaires. Cette expérimentation, dont le gestionnaire de réseau GRDF sera partenaire, doit permettre à terme de décliner un cadre technique, réglementaire et financier pour le développement de la filière Power-to-Gas.
Au total, le méthane injecté dans le réseau de gaz de ville devrait représenter à terme 13 000 MWh/an, soit l’énergie équivalente au chauffage de 1 200 foyers. De plus, le site disposera de chaleur excédentaire, valorisable en tant qu’externalité positive, par exemple sur des cultures maraîchères proches ou une ferme aquaponique.
De l’azote produit à partir des résidus liquides de la biométhanisation
La récupération des énergies fatales du site permettra la mise en œuvre de boucles énergétiques vertueuses. Par exemple, la réaction de méthanation catalytique, qui a la particularité d’être exothermique, permettra la valorisation des calories pour alimenter d’autres briques de process. De la même façon, la chaleur récupérée sur la carbonisation et sur l’électrolyseur permettra le chauffage du méthaniseur et la valorisation de l’azote.
Car en plus du biométhane, du méthane de synthèse, de l’électricité verte, de l’hydrogène, de la chaleur et du biochar, le site valorisera d’autres ressources, dans une démarche d’économie circulaire en boucle courte. Il est ainsi prévu de fabriquer de l’azote à partir des résidus liquides de la biométhanisation. Ceux-ci sont en effet chargés en azote, un composé qu’il faut éliminer avant traitement par l’unité de dépollution. « Plutôt qu’un traitement coûteux, l’azote est extrait par stripping grâce à la chaleur verte récupérée sur le site. Le produit obtenu est une solution ammoniacale valorisable localement en engrais agricole : avec 320 m³ de sulfate d’ammonium, ce sont 570 ha de cultures de maïs qui peuvent être fertilisées annuellement », précise un dossier de presse.
Le site produira également de l’oxygène grâce à l’électrolyse de l’eau, qui sera recyclé sur l’unité de dépollution des eaux usées afin d’aérer les bassins biologiques. Enfin, l’eau réutilisée permettra d’irriguer certains espaces verts du site.
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